Des documents révélés mardi par The Independent indiquent que des tractations internationales concernant l’exploitation du pétrole irakien avaient commencé un an avant le déclenchement des hostilités. Une histoire d’or noir et d’ordures...
Le 6 février 2003, le raffiné Tony Blair distillait que "la théorie de la conspiration du pétrole est honnêtement l’une des plus absurdes qui soient quand on l’analyse". "Honnêtement"... ? Sans aucun doute, puisque BP, le 12 mars 2003, déclarait n’avoir "aucun intérêt stratégique en Irak". Confirmé par Shell, qui indiquait le même jour n’avoir "ni recherché ni participé à des réunions avec des membres du gouvernement britannique à propos de l’Irak". Et nous étions priés de croire tout ce beau monde sur parole... Mais, mardi, changement de ton : The Independent a révélé des documents obtenus de haute lutte par l’activiste Greg Muttitt, au nom du Freedom of Information Act. Et le résultat n’est pas beau à lire.
Shell a menti. Durant l’année qui a précédé le déclenchement de la guerre, la compagnie a rencontré des responsables gouvernementaux à au moins cinq reprises, en compagnie de BP, pour s’assurer des retombées pétrolières de l’invasion. BP a menti. Pendant qu’elle démentait solennellement avoir des vues sur l’Irak, la firme faisait pression sur le gouvernement britannique en affirmant que l’Irak était "plus important que ce qu’ils avaient pu voir depuis longtemps".
Opération pétrole contre pourriture
Et que dire de ce mémo du ministère des Affaires étrangères, rédigé le 13 novembre 2002, après une réunion avec BP : "l’Irak est le gros fournisseur potentiel de pétrole. BP veut absolument en être et s’inquiète que les accords politiques lui fassent perdre cette opportunité. Le potentiel à long terme est énorme..."
Ou de cette fulgurance de la baronne Symons, alors ministre du Commerce, cinq mois avant l’invasion de mars 2003, qui estimait que les firmes britanniques devraient recevoir une part des immenses réserves irakiennes en récompense de l’engagement militaire de Tony Blair aux côtés des troupes américaines. Lady Symons avait d’ailleurs, selon les documents, accepté de mener une opération de lobbying pour BP auprès de l’administration Bush, alors que le géant pétrolier craignait d’être exclu des tractations que Washington était en train de mener secrètement auprès des gouvernements et compagnies pétrolières américaines, françaises et russes.
Hasard ou coïncidence, cette Lady Symons a par la suite décroché un poste de consultante pour une banque d’affaires britannique qui a signé de grassouillets contrats de reconstruction dans l’Irak d’après-guerre. Et, le mois dernier, la pétroleuse a mis fin à ses activités de conseillère bénévole (humaniste avec ça...) au Conseil national de développement économique de Libye... après que son Boss, le Colonel Kadhafi, eut commencé à tirer sur les manifestants.
Résultat : Les contrats de 20 ans signés suite à l’invasion constituent les plus importants de l’histoire de l’industrie pétrolière. Ils couvrent la moitié des réserves irakiennes. De la belle ouvrage...