6 janvier / Café-Librairie Michèle Firk / Montreuil, Métro Croix de Chavaux / 19h30.
Plaisir anal et capitalisme – Soirée animée par la revue Jef Klak et Javier Sàez venu spécialement de Madrid, auteur de Théorie queer et psychanalyse, 2005 et de l’article « Le mâle vulnérable » dans le numéro 2 de Jef Klak, « Bout d’ficelle ». Marco Vidal présentera également son livre Fist paru aux éditions Zones et participera au débat.
Dès l’éducation des enfants, le genre est déterminé par un apprentissage du rôle de l’anus comme sale et dédié uniquement aux excréments. N’étant pas une zone érogène légitime, il devient ensuite un point de différenciation entre masculin et féminin : si l’anus n’est pas destiné au plaisir sexuel, alors l’homme n’a pas de zone qui puisse être pénétrée. Le masculin devient donc l’impénétrable et le féminin le pénétrable par définition. Le masculin prend pour définition par défaut ce que n’est pas la femme, avec des effets de domination comprises comme pénétration active et action passive de se faire pénétrer. Une femme ne pourrait pas pénétrer un homme, une femme ne pourrait pas pénétrer une femme, un homme ne pourrait pas pénétrer un homme, etc.
Cette distinction se retrouve dans le langage courant (dans ton cul, vas te faire enculer, trou du cul, etc.) et jusque dans les rapports entre homosexuels où les rôles de domination se répètent autour des positions de sodomie passive ou active.
Partant de ces considérations sur le rapport de la société à l’anus et après un détour par la théorie freudienne du stade anal qui tourne autour des effets de rétention et de libération de la puissance accumulée (troubles de l’avarice et du mutisme, etc.), Javier Sàez tente de lier les rapports au social à l’anus dans une perspective genrée et anticapitaliste. S’attaquer aux constructions de genre et aux discriminations bâties sur le refoulement du plaisir anal permettrait de mieux s’attaquer aux rapports de domination internes aux capitalisme.
Fist
Par Marco Vidal
Éditions Zones
Le XXe siècle aurait inscrit une seule innovation au répertoire des pratiques sexuelles : le fist fucking. Fallait-il en rester à cette doxa popularisée par nombre d’intellectuels et de chercheurs ? Combinant érudition historique, réflexions théoriques, récits à la première personne, quasi-poèmes en prose, Fist peut se lire au choix comme une apostille à Histoire de la sexualité de Michel Foucault ou comme un roman queer.
La singulière généalogie érotique qu’il nous propose s’ouvre sur des photographies de Robert Mapplethorpe et se clôt par une relecture du Cantique des cantiques. Entretemps, on aura visité Les Catacombes, mythique club privé du San Francisco des années 1970 ; relu Koltès, Sade, Homère, Ovide, Ronsard et Henry James ; croisé Amerifist, acteur star de ce sousgenre du cinéma porno ; compulsé des traités de médecine du XIXe siècle pour y découvrir d’étranges prescriptions ; passé des petites annonces sur des sites spécialisés ; fait quelques rencontres et pris rendez-vous chez un proctologue…
Réduire le fist fucking à la violence du « poing » est un contresens. Le plaisir civilise la main pour mieux réinvestir les puissances imaginaires du corps, dans une union improbable qui pourrait bien aussi s’appeler « amour ».