A l’heure où ces lignes sont écrites, le sort de Mouammar Kadhafi ne semble faire aucun doute chez les commentateurs politiques. Sa volonté de s’accrocher au pouvoir au prix d’un bain de sang indigne, parmi les dirigeants occidentaux, ceux qui la veille encore le recevaient avec tous les honneurs. Le dirigeant libyen rejoindra sans doute, après Ben Ali et Moubarak, le club des « dictateurs Kleenex » que l’Occident rejette après usage. Souhaitons que cela serve de leçon aux éventuels candidats à ces postes : les arrogants de l’USraël et de l’Union européenne ne font aucun sentiment lorsqu’on cesse de leur être utile !
Nous espérons que le peuple libyen reprenne rapidement ses destinées en main, mettant ainsi fin au bain de sang en cours. Encore faut-il que cette révolution ne soit pas confisquée, et surtout qu’elle ne serve pas de prétexte à une intervention militaire de l’OTAN (organisation politico-militaire rassemblant de nombreux pays occidentaux autour des États-Unis). Cette menace est de plus en plus à l’ordre du jour.
Déjà, le 21 février dernier, Fidel Castro (le leader de la révolution cubaine) évoquait ouvertement la possibilité d’une intervention de l’OTAN en Libye. Ce risque a également été évoqué quelques jours plus tard par Dmitri Rogozine, ambassadeur de Russie auprès de l’OTAN. Selon ce diplomate, l’OTAN souhaiterait étendre son emprise en Afrique du Nord et au Moyen-Orient.
La Libye est un pays à faible densité humaine, dont le sous-sol regorge de matières premières en plus du pétrole. Sa structure politique, à dominante clanique et communautaire, fragilise d’autant plus ce pays. Sa situation géographique est exceptionnelle. La Libye fait en effet la jonction entre le Maghreb (via sa frontière avec la Tunisie) et le Moyen-Orient (via sa frontière avec l’Égypte). Elle possède par ailleurs une longue frontière avec trois pays africains riches eux aussi en matières premières : le Niger, le Tchad et le Soudan.
Rappelons que le Soudan a récemment été amputé d’un bon tiers de son territoire, riche en pétrole : le Darfour. Cette sécession s’est produite après une longue guerre menée par des séparatistes, soutenus par Israël, l’Union européenne et les États-Unis. En France, les principaux soutiens aux séparatistes du Darfour ont été Bernard Henry Levy, Bernard Kouchner, et tout le lobby sioniste installé à Paris. Comme le Kurdistan irakien, le Darfour grouille déjà de conseillers de toutes sortes, mais qui ont tous un point commun : ils sont majoritairement israéliens ou /et américains.
Tout cela indique qu’un redécoupage de la région est probablement à l’ordre du jour. Et dans ce contexte, la situation stratégique de la Libye n’a pas échappé à l’USraël. Profitant de l’impopularité des vieilles dictatures corrompues et de la légitime révolte des peuples arabo-musulmans, l’Occident cherche à la fois à préserver ses intérêts, et à affaiblir davantage les peuples de la région en encourageant les forces communautaires ou séparatistes (comme ce fut donc le cas au Soudan, mais pas au Liban où le Hezbollah a su éviter ce piège !).
Les heures et les jours à venir nous dirons si l’OTAN ose intervenir directement en Libye. En cas d’intervention de l’OTAN, et donc des États-Unis, les patriotes libyens devront continuer leur révolution contre la nouvelle oppression. Le Liban, l’Afghanistan et l’Irak montrent amplement que la résistance est possible, et que l’ennemi risque ici aussi de s’embourber, avant de connaître la défaite.
Voilà pourquoi une « transition en douceur », avec le soutien nord-américain, se prépare sous nos yeux. Les défections de nombreux responsables libyens, jusque-là piliers du régime, en sont le signe le plus apparent. Dans ce cas, l’OTAN interviendrait juste après, pour « aider » à consolider la jeune démocratie…
Dans tout le monde arabo-musulman, la Révolution est à la croisée des chemins. Les termes de l’alternative sont simples : mener le combat jusqu’à l’émancipation totale, ou se faire confisquer la révolution par les mêmes forces qui oppriment la région, à savoir l’américano-sionisme et son allié européen. Dans ce dernier cas, le combat ne pourra que se poursuivre : la prise de conscience des peuples et les sacrifices consentis ont été trop importants pour que la révolte s’arrête à mi-chemin.
Seuls l’extension et l’approfondissement de ces révolutions peuvent éviter qu’elles ne soient dévoyées. En ce domaine, l’Iran et le Liban ont su montrer le chemin. Aux peuples arabo-musulmans de s’en inspirer !