Depuis deux mois, la France tente discrètement de revendre à des pays étrangers une partie de ses vaccins contre la grippe A, achetés en juillet dernier, à une époque où la menace était supposée très grave.
Quand la décision a-t-elle été prise ?
Le 1er novembre, le ministère français de la Santé reçoit une note de l’Agence européenne de la santé (Emea) qui indique qu’une seule injection de vaccin est nécessaire pour être protégé contre le virus, et non plus deux, comme les experts le prétendaient jusqu’alors. « Ce jour-là, on a compris qu’avec les 94 millions de doses achetées en juillet, nous détenions trop de vaccins », explique-t-on au ministère de la Santé. Une réunion est alors organisée dans le bureau du directeur de cabinet de Roselyne Bachelot, où la décision est prise formellement de vendre des vaccins aux pays qui en feraient la demande. Ces ventes devraient s’ajouter aux 9,4 millions de doses que le président de la République a choisi, dès septembre, de donner à l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour les pays les plus démunis. Des dons qui ont d’ailleurs déjà été effectués.
Qui dirige l’opération de vente ?
Une opération conjointe est menée depuis la mi-novembre entre le ministère des Affaires étrangères et celui de la Santé en direction des ambassades étrangères. Les diplomates sont priés de faire remonter rapidement l’information vers Paris si les pays font état d’un manque de vaccins. « Nous avons travaillé ensemble sur ce dossier avec les équipes du ministère de la Santé », explique-t-on au ministère des Affaires étrangères. La question de la revente des vaccins est abordée succinctement en cellule de crise interministérielle : « Madame Bachelot a indiqué que des négociations étaient en cours avec différents pays, mais sans donner les noms, pour des raisons de confidentialité », indique Gérard Gachet, porte-parole de la cellule de crise interministérielle, au ministère de l’Intérieur. Matignon et l’Elysée sont régulièrement tenus au courant des contacts et ont le pouvoir de validation final. Des négociations ont été rapidement engagées avec le Qatar, l’Egypte, le Mexique, la Bulgarie, la Roumanie et l’Ukraine.
A quel prix sont cédés les vaccins ?
La France a adopté une position de principe : elle vend au prix où elle a acheté les quatre types de vaccin (soit : 6,25 € la dose pour le Sanofi-Pasteur, 7 € le GSK, 9,34 € le Novartis et 10 € le Baxter). Les pays demandeurs sont ceux qui n’ont pas pu se procurer suffisamment tôt le vaccin. La France doit aussi faire face à la concurrence internationale des autres « grands pays » qui veulent revendre leurs vaccins. C’est le cas en Ukraine, où la France et l’Allemagne ont soumis des offres aux autorités. La Suisse et les Pays-Bas, qui avaient acquis beaucoup de lots, ont ouvertement proposé à la revente une partie de leurs stocks.