Après avoir accepté d’accueillir un radar d’alerte avancé du système antimissile de l’Otan, la Turquie a demandé aux Etats-Unis de déployer sur son sol des drones Predator, après le retrait des forces américaines d’Irak, qui sera effectif à compter du 31 décembre 2011.
Depuis au moins 2007, l’armée américaine partage avec son homologue turque les informations obtenues au cours des vols de ses drones au-dessus du Kurdistan irakien, où le PKK, le mouvement séparatiste kurde, a établi des bases.
Environ 2.000 combattants du PKK ont trouvé refuge au Kurdistan irakien, à partir duquel ils mènent des attaques en territoire turc. Depuis juillet, une quarantaine des membres des forces de sécurité turques ont ainsi été tués, ce qui a poussé Ankara à réagir avec le bombardement, dès la mi-août et pour la première fois depuis un an, de positions rebelles kurdes situées dans le nord de l’Irak.
Selon l’armée turque, environ 260 membres du PKK auraient été « neutralisés » (comprendre tués) au cours de ces frappes aériennes, réalisées en plusieurs vagues. Et d’avertir que ses opérations se poursuivront « si nécessaire ». Et le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, d’annoncer une « nouvelle ère » et de prédire que « ceux qui ne s’écartent pas du terrorisme en paieront le prix ».
Cette intensification des opérations du PKK coïncide avec les évènements qui se déroulent en Syrie, où le régime de Bachar el-Assad réprime durement ses opposants. Cette attitude de Damas a été condamné par les autorités turques. D’où l’hypothèse avancée par le quotidien Milliyet d’un possible soutien syrien aux opérations des rebelles kurdes.
Du côté de Washington, l’aide fournie à Ankara se justifie par le fait que le PKK est considéré comme étant une organisation terroriste. Aussi, les Etats-Unis, alliés traditionnels de la Turquie, par ailleurs membre de l’Otan, ont indiqué qu’ils continueraient à aider l’armée turque dans ses opérations, en lui donnant des renseignements. Dont ceux obtenus par les drones Predator.
Pour autant, d’après les déclarations faites par de hauts responsables militaires américains au Washington Post, la décision de donner une suite positive à la requête d’Ankara pour l’installation d’une base de drones en Turquie n’a pas encore été prise par la Maison Blanche.
Les Etats-Unis craignent en premier lieu d’être entraînés dans un conflit qui n’est pas le leur. Mais d’un autre côté, répondre favorablement à la demande turque permettrait de renforcer leur relation avec la Turquie, à l’heure où Ankara semble prendre ses distances avec l’Occident et s’oppose à Israël au sujet de la situation dans la bande de Gaza, ainsi que de disposer d’une base proche de l’Irak et de l’Iran, où les Predator seraient potentiellement amenés à opérer.
Mais ce n’est pas tant la Maison Blanche que les autorités turques devront convaincre. En effet, bien que les présidents Bush Jr et Obama ont autorisé l’exportation de drones MQ-9 Reaper à destination de la Turquie, le Congrès s’y est toujours opposé.