L’Inde traverse une période difficile. Alors que le pays est va entrer en campagné électorale, les signaux économiques sont dans le rouge. Son taux de croissance est en berne (+5% seulement, soit la plus mauvaise progression depuis 10 ans), l’activité industrielle s’essouffle, l’état des finances publiques se dégrade, et, surtout, la roupie ne cesse de se déprécier, sa valeur ayant perdu plus de 20% par rapport à celle du dollar depuis le début de cette année.
Plusieurs raisons expliquent ce ralentissement économique. Il y a d’abord les facteurs externes, avec le départ des capitaux étrangers vers les Etats-Unis, où la Réserve fédérale laisse planer le doute au sujet d’un éventuel bémol sur sa politique d’assouplissement quantitatif, qui consiste, pour faire simple, à faire tourner la planche à billets. A cela s’ajoute la hausse du prix du pétrole, causée par les tensions en Syrie. Et puis, il y a aussi des problèmes structurels propres à l’Inde, comme l’absence de réformes économiques, un déficit courant élevé, le manque de main d’oeuvre qualifiée, les insuffisances en matière de production d’énergie, etc.
Dans ce contexte, le budget indien de la Défense, d’un montant de 37 milliards de dollars pour l’année fiscale en cours, subit de plein fouet la chute de la roupie, étant donné que New Delhi achète la plupart de ses équipements militaires à l’étranger.
En clair, une dépréciation de 20% de la roupie par rapport au dollar réduit d’autant l’enveloppe qui était prévue pour l’importation de certains armements. Du coup, les responsables du ministère indien de la Défense ont deux options : soit demander une rallonge budgétaire, soit retarder certains programmes en accordant la priorité à ceux qui sont déjà avancés.
D’après DefenseNews, les acquisitions d’avions de transport C-130J Hercules, des ravitailleurs A-330 MRTT et d’obusiers pourraient être concernées par une telle mesure. De même que le projet de remotorisation des chasseurs-bombardiers Jaguar avec des moteurs Honeywell. Qui plus est, avec l’incident qui a causé, le mois dernier, la perte du submersible INS Sindhurakshak, les capacités sous-marines de la marine indienne sont devenus prioritaires.
Et le programme Medium Multi-Role Combat Aircraft (MMRCA), qui doit, à terme déboucher sur une commande de 126 avions Rafale ? Il n’est évidemment pas question de l’annuler car le remplacement des MiG-21 indiens est une nécessité. Seulement, la signature du contrat final, attendue d’ici la fin 2013, pourrait être remise à la prochaine année fiscale, qui commence le 1er avril en Inde.
Or, pour assurer le maintien de la chaîne d’assemblage des Rafale, compte tenu de ce que prévoit le projet de Loi de Programmation Militaire 2014-2019 (26 appareils à livrer aux forces françaises), il est impératif pour Dassault Aviation de décrocher, au plus vite, un contrat à l’exportation. Faute de quoi, à raison de 11 avions produits par an, le programme risquerait de s’arrêter en 2016. Et il faudra 3 ans au constructeur français pour livrer le 1er appareil à l’Inde à partir de la date de signature du contrat…
C’est ce qui inquiète d’ailleurs le président de la Commission des Affaires étrangères et de la Défense du Sénat, Jean-Louis Carrère. "Si le contrat avec un pays comme l’Inde ou d’autres, était signé, ce serait très bien pour que la loi n’ait pas besoin d’être révisée de ce point de vue", a-t-il affirmé, le 9 septembre, à Pau, lors de l’Université d’été de la défense. "Il est évident que si ce n’est pas la cas on aura besoin de revoir" la loi, a-t-il ajouté.