En pleine tempête médiatique, sanitaire et économique, Donald Trump tente de gérer la crise du coronavirus. Certains commentateurs estiment que le Covid-19 pourrait compromettre ses chances à la Présidentielle de 2020. Gérald Olivier, spécialiste des questions politiques outre-Atlantique, n’en est pas si sûr. Il explique pourquoi à Sputnik.
Qu’elle doit sembler lointaine, l’époque bénie du début de mandat pour Donald Trump, lorsque tous les voyants économiques étaient au vert, lorsqu’il avait le vent politique en poupe et que rares étaient les observateurs et acteurs qui pariaient sur sa défaite à l’élection présidentielle de 2020.
L’histoire est pourtant tragique, et Donald Trump l’a appris à ses dépens. En quelques semaines, le coronavirus a rebattu les cartes du jeu politique aux États-Unis et de nombreux médias américains, plutôt Démocrates, prédisent désormais sa défaite en novembre. Pourtant, son avenir politique n’est pas nécessairement menacé par sa gestion de la crise, explique à Sputnik Gérald Olivier, journaliste, chercheur associé à l’Institut de Prospective et Sécurité en Europe (IPSE), et rédacteur en chef du blog « France-Amérique ».
« Donald Trump a fait ce que tous les présidents d’États fédéraux doivent faire. Il a suivi les recommandations de ses conseillers scientifiques et a émis des recommandations. Les États-Unis étant un état fédéral, Washington ne peut pas imposer des mesures partout, ça, c’est le rôle des gouverneurs. »
Néanmoins, Donald Trump a tout de même tardé à prendre la pleine mesure de la pandémie et de ses conséquences, car « il ne voulait pas que la crise sanitaire entache son bilan économique », indique Gérald Olivier. Il a donc minimisé l’impact du Covid-19 dans un premier temps pour protéger les acteurs économiques, puis s’est projeté directement dans l’après-coronavirus et le redémarrage de l’économie américaine. Un choix qui lui a largement été reproché, en particulier par les médias Démocrates.
Une base électorale toujours aussi solide
Mais Donald Trump n’a pas choisi cette stratégie au hasard. Il l’a fait pour s’assurer le soutien de son atout le plus indéfectible : sa base électorale. Une armée d’électeurs convaincus et qui, pour rien au monde, ne voteraient pour un candidat démocrate, et surtout pas Joe Biden, incarnation suprême de « l’establishment » aux États-Unis. Au contraire, celle-ci se satisfait plutôt de sa gestion de la crise, pour plusieurs raisons :
« La base Républicaine n’a jamais admis la nécessité du confinement. Celle-ci est plus individualiste, plus pragmatique et dépend surtout de métiers libéraux qui ont besoin que l’économie tourne pour pouvoir continuer à travailler, contrairement aux fonctionnaires. »
« D’autre part, le virus a touché les États-Unis de manière inégale géographiquement. Les nids épidémiques se situent dans les grandes métropoles, sur les côtes, et le reste est relativement moins affecté. Ces personnes qui vivent en Alabama ou au Texas ne comprennent pas pourquoi il doit y avoir une réponse centralisée et globale pour un virus qui n’est ni centralisé, ni global. Ils soutiennent donc la démarche de Donald Trump. »
Néanmoins, plus la situation liée au Covid-19 empire aux États-Unis, plus les critiques à son encontre se font entendre, en particulier concernant sa communication, souvent hasardeuse. D’autant que cette fois-ci, ces critiques ne viennent pas seulement de ses adversaires, mais également de l’intérieur de l’appareil Républicain. Cette grogne remet-elle en question sa position de leader pour la présidentielle ? Là aussi, Gérald Olivier tend à nuancer :
« Le coronavirus n’a pas compromis les chances de réélection de Donald Trump. Au contraire, ce sont plus les chances de Joe Biden qui ont été compromises. Ce dernier souffre énormément de cette crise, car il est totalement absent de la scène politique et médiatique américaine. Donald Trump au contraire est tous les jours devant les médias pendant une heure et bat des records d’audience. »
Ces mêmes médias risquent d’être l’adversaire principal de Donald Trump pour l’élection, comme ils l’ont été lors de la précédente campagne présidentielle et depuis le début de son mandat, en particulier ceux proches du parti Démocrate. D’où la défiance de l’actuel pensionnaire de la Maison-Blanche à leur égard. Mais ils ne seront pas nécessairement déterminants dans l’élection à venir, estime Gérald Olivier.
« Si vous lisez des médias Démocrates, il est évident que vous n’allez rien lire de positif sur le Président. Le contraire se passe si vous lisez des médias conservateurs. Le plus important au final est de regarder sa cote de popularité. Et en vérité, lorsque vous observez celle-ci, elle varie très peu, que ça soit durant les trois années précédentes, mais depuis le début de la crise également. »
Toutes les options sont donc encore sur la table pour l’élection présidentielle de 2020 aux États-Unis. Et contrairement à ce que l’on peut penser de notre côté de l’Atlantique, Donald Trump n’est pas en mauvaise posture.