« Le génie artistique de Karl Lagerfeld, sa générosité et son intuition exceptionnelle qui lui donnaient un temps d’avance ont largement contribué au rayonnement de la Maison Chanel dans le monde. Au-delà du grand créateur auquel j’ai donné carte blanche au début des années 80 pour réinventer la marque, c’est un véritable ami et complice que je perds aujourd’hui. » (Alain Wertheimer, CEO de Chanel)
Créateur de génie, personnage énigmatique, couturier rigoureux et passionné, Karl Lagerfeld s’est éteint ce mardi 19 février à l’hôpital américain de Neuilly. Il avait, on le suppose, 85 ans.
On le suppose, car sa date de naissance est toujours restée un mystère que personne n’atteste avoir percé, au même titre que celui de sa vie privée. Le directeur artistique à la verve cinglante, au catogan poudré et lunettes de soleil opaques aura bouleversé l’histoire de la mode en général et celle des maisons de couture Chanel et Fendi (pour le prêt-à-porter femme) en particulier, parvenant toujours à capter l’air du temps avec humour.
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Comme une suite logique à la jeunesse aisée qu’il a menée outre-Rhin, Karl Lagerfeld, fils d’un homme d’affaires scandinave, pose ses valises dans un hôtel particulier germanopratin du quai Voltaire, en 1954. À peine débarqué dans la capitale de la mode, les vents lui sont favorables. Ainsi, le jeune Karl remporte le premier prix du concours du « Secrétariat international de la laine », ex æquo avec un autre jeune couturier, Yves Saint Laurent – son futur meilleur ennemi. Le couturier Pierre Balmain, qui fait partie du jury, le remarque et le recrute alors comme assistant.
La folie Lagerfeld
Puis tout s’accélère : après avoir fait ses armes chez Balmain, il est nommé directeur artistique chez Jean Patou. Le styliste en herbe a la bougeotte et entame une carrière de designer indépendant. Rapidement, il crée des vêtements pour les marques Chloé et Fendi qui font respectivement appel à ses services en 1963 et 1965. Il dépoussière durablement l’image de marque de Fendi, à l’origine maison de fourrure romaine, en inventant l’idée d’un luxe ludique, loin de la silhouette bourgeoise de l’époque.
En 1983, douze ans après la mort de Coco Chanel, il est nommé directeur artistique de la maison de la rue Cambon. À ce moment, la griffe vit des heures difficiles et l’intervention du celui qu’on surnommera plus tard le « Kaiser de la mode » lui redonne un second souffle. Puis en 1984, il lance sa marque éponyme, et en 1986 le fameux dé d’or – la sacro-sainte distinction à l’époque dans le milieu – vient couronner son travail. Plus rien n’arrête Karl Lagerfeld, qui semble détenir la formule pour réveiller les belles endormies – et les réinscrire dans la modernité.
Autodérision et persiflage
À l’aube de l’an 2000, Karl Lagerfeld s’offre une nouvelle image. Il perd 40 kilos pour pouvoir se glisser dans les costumes Dior Homme dessinés par Hedi Slimane.
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Le côté pile de sa verve cinglante ? Son sens poussé de l’autodérision. La preuve : en 2008, il prête son image à la Sécurité routière en vantant les mérites du gilet jaune dans un spot publicitaire : « C’est jaune, c’est moche, ça ne va avec rien, mais ça peut vous sauver la vie. » Autres faits d’armes, en 2010 : il apparaît dans le clip de Jean Roch auprès de Snoop Dogg jouant le rôle de Dieu. Et Karl Lagerfeld de conclure par une pirouette : « La chose la plus importante que vous devriez savoir sur moi, c’est que tout ce que vous ont dit les autres n’est pas nécessairement vrai. »
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Voici Le Grand entretien de France Inter (par le bien pâle François Busnel) consacré à Karl Lagerfeld...