Une grenouille piquée par des frelons ? Non. Une citrouille passée sous un camion ? Non plus. Chantal Sébire, voyons ! Une institutrice de Plombières (Côte-d’Or) atteinte d’une tumeur rarissime qui lui défonce le nez, lui boursoufle les paupières, puis la gueule tout entière devenue une sorte de sculpture inachevée, mauve et verdâtre. Son cruel cancer déformant en a fait une extraterrestre, mais une extraterrestre avec les pieds bien sur terre...
Pendant des semaines, ce spectacle pénible nous a été infligé. Une prof condamnée s’exhibant elle-même avec la complicité faussement culpabilisée des médias comme un phénomène de foire, et pas de n’importe quelle foire. La foire de la mort ! Je croyais que la mère Humbert était la reine de l’acharnement antithérapeutique pour son fameux fils, Vincent, mais là, elle vient d’être dépassée par Chantal Sébire, un monstre, si j’ose dire, de volonté. Toute petite, maigre, dans son pull en V violet, elle avance comme un mannequin vers les caméras et les micros du monde entier, avec à peine la force de supporter son énorme tête d’où sortent par on ne sait quel trou (la bouche, le nez, les oreilles ?), et d’une voix coupante, des arguments si fermement assénés qu’on aurait pu les croire justes.
Le combat de Chantal restera longtemps dans la mémoire des bons vivants : « Je veux mourir ! Et au plus vite ! Tuez- moi si vous avez un cœur, bande de salauds ! » supplie-t-elle à tous ceux qui croisent son regard de batracienne en souffrance. Pour Chantal, la « fin de vie » n’est pas assez légiférée en France. Qu’est-ce que c’est que cette manie de vouloir toujours être encadré par la loi ? Pour chaque moment de sa vie, l’homme du X X I e siècle a besoin qu’on lui donne la permission de le vivre. Même pour mourir il ne veut pas être hors la loi.
La quinquagénaire défigurée ne veut pas être hospitalisée, elle ne veut pas qu’on atténue sa douleur physique mais qu’on obéisse aux caprices de sa douleur morale ! Son trip, qu’on la pique comme une chatte à bout de force. Elle tape du pied pour qu’on s’aligne sur la Suisse ou les Pays-Bas qui pratiquent l’euthanasie « active ». La « passive » ne lui suffit pas ! Le Leonetti qui l’a mise en place en 2005 est à ses yeux tuméfiés un de ces empêcheurs de crever en rond qui sévissent dans ce pays arriéré qu’est la France... Chantal ne veut pas être plongée dans un coma artificiel et qu’on la laisse mourir à petit feu, mais que la loi et la médecine, main dans la main, la tuent d’un seul coup. Et puis quoi encore ? Gourmande, va ! On lui donne une euthanasie passive et elle veut un suicide assisté ! Et ici ! Dans son pays qu’elle place décidément bien haut pour le traiter si mal... Incapable de se rendre à Bruxelles ou à Amsterdam pour se faire piquer puisque là-bas c’est admis. Non, il faut que la loi plie, mais elle ne pliera pas, bien sûr, c’est mal connaître la loi. Chantal ne veut pas faire comme la comédienne Maïa Simon qui a dis- crètement pris son dernier train pour Genève et est allée mourir sans se montrer, sans en foutre partout, tout le contraire de l’instit’ autoritaire de Plombières.
Madame Sébire veut faire de sa mort une cérémonie, au milieu de tous les siens, comme la Vierge Marie en dormition entourée de ses apôtres. D’abord une teuf pré-euthanasie toute la nuit, champagne et cotillons, danse des canards, et puis à l’aube, épuisée de rire et de bonheur, elle se ferait piquer par son toubib. Aïe et adios ! Une piqûre douce comme un baiser, de ceux qui transforment un crapaud en princesse charmante, car c’est comme ça qu’elle se voit, Chantal, morte : ressuscitée en quelque sorte, comme au bon vieux temps d’avant son cancer !
Oui, mais ça ne marche pas comme ça, la vie, Chantal... Encore moins la mort ! Tant qu’il y a de la vie il y a du désespoir. Personne au fond ne veut mourir, pas même Chantal. Se balader dans tous les médias comme une Miss France à l’envers est une façon de se raccrocher à la vie, de repousser finalement cette stupide évidence qu’elle s’est, ou qu’on lui a plutôt, mise dans la tête : qu’elle doit disparaître parce que trop moche et « incurable ». Évi- demment, elle refuse qu’on l’opère, et soigne son cancer du nez à coup d’Aspégic ! Tu m’étonnes qu’elle souffre !
Chantal Sébire est d’une vitalité, d’une conscience exceptionnelles, mais tant pis. Elle veut qu’on la crève. Elle en mourrait, sinon... C’est avec une poigne incroyable pour un petit bout de femme pareil qu’elle a relancé le débat sur l’euthanasie. Elle ne réclame pas qu’on la fasse mourir, mais qu’on autorise un médecin à lui donner des médicaments qui lui permettraient de partir dans la dignité. L’euthanasie, c’est le règne de l’euphémisme... Pour ses partisans, la définition de « mourir assassiné » c’est donc : « Partir dans la dignité. » Comme on part aux Seychelles ? Aucune mort n’est un départ (ce serait plutôt une arrivée) et encore moins dans la « dignité ». Personne n’est jamais mort dignement, à part certains condamnés à mort... Saddam Hussein ou Charlotte Corday, oui, sont morts avec dignité.
Maurice Pialat disait : « Je suis contre l’euthanasie, parce que pour moi la vie c’est tout compris ». Depuis quand il ne faut pas souffrir pour vivre, et encore moins pour mourir ? Beaucoup de malades veulent se faire euthanasier, simplement parce qu’ils craignent de ne plus être les mêmes, comme si on arrivait sur Terre avec un patrimoine phy- sique et moral qu’il s’agirait de ne pas entamer pendant son existence ! Mais depuis la naissance, et parfois avant, on n’est « plus les mêmes ». On verra bien ce que la vie va faire de ce corps. Jusqu’au bout. Tout plutôt que se faire tuer avec la bénédiction de l’administration dans un lit d’hôpital aseptisé, bien proprement, bien mortellement... Comme si l’euthanasie était une baguette magique qui guérit de tout. Le plus fort, c’est que Chantal n’est pas la seule à penser ainsi. C’est une épidémie, un cancer ! L’euthanasie est devenue une tumeur morale de la société, il faut la détruire.
« Passive » ou « active », l’euthanasie, c’est une horreur. Le cœur des pro-euthanasie est mille fois plus répugnant que la tête de Chantal Sebire. Ils le cachent d’ailleurs, de peur qu’on s’en rende compte, au fond de leur « huma- nité ». Facile, la charité quand il s’agit de tuer quelqu’un qui ne vous a rien fait d’autre que souffrir. Ils appellent ça un « geste d’amour ». D’entendre ça, l’amour doit se retourner dans sa tombe.
C’est toute la racaille antimétaphysique qui incite à se faire euthanasier. Ils présentent ça comme un droit. Le droit de mourir se confond avec celui de tuer. Pour les connasses de Elle du genre Dorothée Werner, le droit du malade à se faire assassiner en toute légalité est dans la droite ligne des droits de la femme à avorter en toute liberté. L’euthanasie comme progrès social : celui de pouvoir disposer de son corps. Puisque les femmes ne s’avortent pas elles-mêmes, il n’y a pas de raison que les malades se tuent sans assistance ! Logique absurde appuyée « philosophi- quement » par quelques « intellos », il faut le dire vite (et entre guillemets ). Tout un tas de laïcs dépressifs, un ramassis d’antichrétiens et d’antimusulmans (c’est pareil), des anti-vie terrestre et anti-vie éternelle (c’est pareil aussi), comme ce con de Comte-Sponville, ou bien cette salope de Michel Polac... Qu’est-ce qui pousse toutes les crapules hypocritement libérales à tenir tant que ça à abréger les souffrances d’autrui par la mort donnée ?
La peur, évidemment. La peur de l’avenir. Aveuglés narcissiquement par l’image qu’ils se font d’eux-mêmes, ils se projettent dans celle des gens diminués. La déchéance leur est insupportable. Sous couvert de lutter pour plus de charité et de compassion entre les êtres, les militants de l’euthanasie encouragent un rencentrage répugnant sur soi, son petit cas, sa mesquine névrose de vouloir disparaître en fonction de son paraître. Bientôt on parlera de cette « intervention de fin de vie » comme d’une opération de chirgurgie esthétique, pas plus...
Ça commence : une autre pro-euthanasie vient de demander qu’on l’exécute ! Ça va être « la porte ouverte à toutes les fenêtres » comme écrit dans Le Monde Carla Bruni-Sarkozy citant Gad Elmaleh dans La vérité si je mens. Clara Blanc est une névrosée qui réclame qu’on la tue alors qu’elle apparaît à la télé parfaitement normale, disant qu’elle anticipe sur l’évolution de sa maladie. Refusant de se voir dans un fauteuil roulant dans dix ans, elle pré- voit sa dépendance, alors autant la suicider tout de suite ! Et si on lui propose l’euthanasie passive, elle rejette ce pis- aller d’un geste de la main. Mépris ! Pas assez hard pour les candidats à l’exécution, les assoiffés d’émotions fortes, les addicts de potion létale !
Le seul geste d’humanité, maintenant, c’est d’assassiner quelqu’un qui souffre ! De l’euthanasie considérée comme un des beaux-arts... Si elle avait été mise en pratique à la grande époque, je n’aurais pas donné cher de la peau des condamnés d’avance par le destin : les Lautrec, les Chick Webb, les Roland Kirk et autres Django...Vous ima- ginez si en 1930 un « comité éthique » de sinistres toubibs avait accepté que, puisque le Manouche Jean-Baptiste Reinhardt, après son terrible accident, ne pourrait plus jouer de guitare à cause de sa main gauche atrocement brûlée, il serait mieux pour abréger ses souffrances qu’on le pique au Penthotal un matin, dans sa roulotte ?...
Je croyais que l’euthanasie, c’était mal vu depuis que les nazis, et le docteur Morell en particulier, l’avaient pra- tiquée avant la guerre sur des handicapés, ce qui d’ailleurs a donné l’idée plus tard à Franck et à Himmler d’étendre le concept à d’autres couches de la population. Je vais plus loin : la société a décrété que le nazisme était le mal absolu pour mieux le refouler et le régurgiter sous d’autres formes bien cachées sous la couche de fausse démo- cratie dans laquelle on nous oblige à vivre. Sous le désir d’euthanasier légalement les « volontaires », il y a encore la bonne vieille pulsion meurtrière des SS qui ne demandaient pas leur avis aux « déchets » de la société pour les liquider.
Pourquoi veut-on absolument que les malades soient supprimés ? Parce que l’extermination manque, il y a une nostalgie de la civilisation postnazie pour le Troisième Reich où les forts euthanasiaient les faibles sans sourciller. Déjà des médecins s’en chargeaient. Avec l’État derrière et la Justice... Tout ce que la pauvre Chantal a essayé de secouer sans s’apercevoir qu’elle ne faisait que jouer le jeu du pouvoir social !
Est-ce bien catholique ? Vouloir maîtriser sa mort alors que c’est le job de Dieu. Même le suicide est encore une volonté divine, car c’est Dieu qui a inoculé dans l’âme du suicidaire la force (ou la faiblesse, on peut en discuter) de vouloir se tuer soi-même. Dans l’euthanasie, c’est le médecin (misérable ersatz de Dieu !) qui administre dans le simple corps du patient une vulgaire dose de poison mortel. Dans un cas, la personne est consciente tout en dé- pendant d’une force qui la dépasse ; dans l’autre, elle se croit consciente parce qu’elle remet, pour ne pas dire trahit, son destin entre les mains d’autres hommes qui l’ont influencée. Ils l’assistent pour l’assassiner. C’est de l’assassistance !
Quand on souffre trop, il n’y a que deux façons de mourir : ou bien attendre la mort naturelle (quels que soient le temps et les souffrances que ça prendra) ou bien se supprimer. Ceux qui veulent vraiment mourir se cachent, comme les animaux, rois de la dignité... Chantal était « violemment hostile » au suicide. Ce qui peut paraître ab- surde. Elle attendait qu’on lui donne la permission de mourir ! Mais il fallait la prendre. Les falaises d’Étretat ne sont pas faites pour les chiens...
Le suicide fait encore partie de la vie, pas l’euthanasie qui fait partie de la mort.Voilà pourquoi l’une a si bonne presse et l’autre est toujours tabou. Se faire euthanasier, c’est mourir avec plus de dignité que se suicider ? Première nouvelle. Dans l’histoire, il ne doit pas y avoir eu beaucoup de Japonais qui demandaient l’euthanasie ! Je vois mal un samouraï atteint d’une tumeur en train de supplier l’empereur de lui faire hara-kiri à sa place ? Je ne parle même pas des grands esprits qui depuis la nuit des temps ont élevé le suicide au rang de l’art. De Socrate à Guy Debord, les exemples pullulent. L’euthanasie est un suicide au rabais.
Chantal Sébire est finalement morte. Mais de quoi ? On l’a euthanasiée en douce ? Elle a succombé à sa maladie ? Elle a eu une crise cardiaque en se regardant dans la glace ? Mais non ! Elle a été violée, bien sûr. Il y a tant de pervers. Un type a dû être excité de la voir se trémousser toute la journée dans sa télé, surgir dans son appart’ et l’étouffer avec un coussin après lui avoir fait une éjac’ faciale. Une euthanasie comme une autre. Portrait-robot du tueur ? La même gueule qu’elle !
Il parait que Chantal Sébire avait beaucoup d’humour. C’est à voir. J’aurais bien voulu qu’elle lise ce texte avant de crever. Ceux qui n’en ont aucun, à coup sûr, c’est le trio sinistre qui l’accompagnait partout : le président de l’ADMD, un gras politicard séropositif autoproclamé ; le vice-président de l’association, devenu son avocat pour plaider une cause qu’il savait perdue d’avance ; et son petit médecin traitant, puceau larmoyant qui se caressait la seringue au fond de sa poche... Tous les suppôts de la société dans la bande à Chantal ! Tous alléchés par la bonne cliente grande gueule que Chantal représentait pour leur petite boutique morbide, ils lui ont fait croire qu’elle était foutue, et qu’elle devait « bardir dignebent » comme elle le répétait en parlant du nez, si on pouvait encore appeler ça un nez... On aurait pu lui éviter une fin aussi tragique si les croque-morts de l’Association pour le Droit à Mourir dans la Dignité et Autres Conneries ne lui avaient bourré le mou.
On l’a convaincue de reporter la laideur de sa situation sur l’État qui ne l’autorisait pas à se faire tuer, alors que la laideur, elle était dans l’acharnement des euthanazis qui la poussaient à exiger cet automeurtre. Tous ont fait mijoter Chantal et ses trois enfants dans l’espoir qu’elle obtiendrait satisfaction. Jusqu’à Kouchner qui s’en est mêlé et qui a dit qu’il allait peut-être autoriser pour elle une exception... Malgré son état de fatigue, elle est allée au tribunal de Dijon « soutenue » par sa garde rapprochée d’ordures, presque aveugle, canne blanche plus épaisse que ses jambes, elle a même fait une hémorragie dans la voiture.
Putain ! Il fallait s’attendre à ce que Chantal perde les pédales, jour et nuit les vautours la harcelaient, les journa- listes l’appelaient, lui rendaient visite comme au zoo. Elle était d’ailleurs devenue méchante avec ces voyeurs fausse- ment compatissants. Ah, qu’est-ce qu’ils ont pris dans la gueule les journalistes ! Elle les insultait, piquait des colères, les cassait, les infantilisait, à la fin plus personne ne pouvait la voir en peinture. Pourtant dans la pénombre, sur son canapé, elle avait encore quelque chose de pictural : le Francis Bacon le plus soutinien n’a pas de plus belles nuances. Les derniers jours, ça s’était aggravé. Coque ficelée sur l’œil, pansements, éponge suintante sur les coquards de la paupière... Ce n’est plus une femme, c’est une installation !
C’est la médiatisation bien sûr qui l’a tuée. Exactement comme Jean-Dominique Bauby, mort au moment exact de son apothéose médiatique. Son « Bouillon de culture », il ne l’a jamais vu... Enterré la veille ! Hasard ? Mon œil ! Ou plutôt, son œil ! Exploitant son fantasme d’être enfin reconnu comme un « écrivain », on lui a fait faire un livre dicté à la paupière, on en a préparé le lancement, Jean-Jacques Beinex est allé le filmer à l’hosto, l’enfermant dans des images d’une indécence puant l’exhibo-voyeurisme, tout ça sous couvert d’apporter un témoignage pudique, bouleversantetc.(onconnaîtlesmédias !).« Jean-Do »amêmeeuletempsdepréparersesréponsesauquestion- naire de Bernard Pivot...Tout était stratégiquement calculé, un plan média au poil, sauf qu’il ne lui restait plus qu’à mourir pour que les ventes triplent, quadruplent, s’envolent comme des papillons qu’on libère de leur sca- phandre...
Bauby (je l’ai connu moi, Bauby, et en forme !) est mort parce qu’il a voulu absolument revenir de Bercq à Paris pour jouir de son triomphe. Puni ! L’image de soi qu’on accepte de donner aux médias en échange de leur faux amour est fatale aux fragiles. Chantal a poussé loin le don de sa personne aux chaînes déchaînées, France 3 et M6 surtout. Elles n’avaient pas assez de mots durs et indignés pour se scandaliser que la « société » n’accorde pas à la Sébire ce qu’elledemandait.Salesociété !Maislasociété,cen’estpasseulementceuxquil’ontfrustréedesefaireeuthanasier, c’est aussi ceux qui ont tout fait pour lui faire croire qu’elle pourrait y parvenir. D’ailleurs, les pro-euthanasie repro- chent maintenant à ceux qui ont refusé à Chantal le droit de mourir de l’avoir assassinée ! En refusant de l’assassiner, ils l’auraient incitée au suicide ! Ça devient le pire des crimes de ne pas vouloir tuer son prochain !
Chantal voulait finir sa vie dans le respect et la dignité, mais en se médiatisant pour soi-disant montrer l’exemple, elle a perdu tout respect et toute dignité. Elle a fini par le comprendre à la toute dernière minute, en récupérant un peu d’elle-même tant jetée en pâture, en se rassemblant dans un dernier effort pour s’euthanasier elle-même, c’est-à-dire se suicider, enfin, la pauvre !...
En bonne maîtresse d’école, madame Sébire a voulu punir la collectivité de ne pas lui avoir laissé le droit de mourir autrement. François Hollande a osé dire qu’elle avait « rendu service à toute l’humanité », une Christ, en somme, à qui on aurait tendu une éponge de vinaigre, mais pan ! dans l’œil, comme si le Romain avait mal visé ! Chantal a eu un moment de clairvoyance et a décidé de se supprimer. Elle a eu la révélation que des bonnes âmes dégueulasses l’avaient ridiculisée en l’exhibant comme une clownesse déglinguée. Médias, justice et médecine n’ont même pas eu besoin de la tuer eux-mêmes. Oui, l’euthanasie est un meurtre, même quand le malade s’en charge seul... Au départ, Chantal n’était pas pour le suicide, mais à l’arrivée elle s’y est résolue en prenant des bar- bituriques à faire crever les chiens.
Le dernier jour de l’hiver, toute seule dans son salon, Chantal Sébire s’est couchée par terre, au milieu de ses fauteuils et de son divan qu’elle avait emmaillotés de housses comme des fantômes, pour éviter qu’ils ne s’abîment, avec le temps.