Patrick & Isabelle sont le running gag de la démocratie vacillante. Ils font rire la France depuis quatre décennies – notamment grâce aux révélations du Canard enchaîné – et pourtant, leur enrichissement pose question. Théoriquement, à moins d’être déjà riche, un homme politique ne peut pas s’enrichir avec la fonction : un député gagne 7 000 euros environ, un ministre 10 000, un Premier ministre 15 000. C’est pourtant ce qui est arrivé aux Balkany.

Traduction : la démocratie nationale (on parle de la locale plus bas) coûte environ 100 millions aux Français par an. Pas la peine de hurler, c’est normal. Mélenchon a raison, un élu de la République ne navigue pas en soute avec les bagages, il voyage en première, que ce soit en avion ou en TGV. Tiens, 100 millions, comme le budget de la DILCRAH. Le salaire cumulé des élus de la Nation (comprenant les ministres qui ne sont pas forcément élus, sauf par le président de la République) correspond au budget du ministère de la Répression de la liberté d’expression. Mais ne nous égarons pas.

La ville de Levallois-Perret dont Patrick Balkany est le maire compte 64 000 habitants. Les salaires de Patrick et Isabelle s’inscrivent donc dans la grile suivante :

Conclusion : même à la tête d’une ville riche (Levallois) dans un département riche (les Hauts-de-Seine), comment un élu et sa femme peuvent-ils se payer des résidences de luxe dans des endroits paradisiaques ? On a bien vu dans les années 80 Jack Lang trouver un appartement à un prix miraculeux dans la très convoitée place des Vosges parisienne mais là, la somme – prouvée – des propriétés balkanyennes ne correspond pas aux salaires cumulés de maire et de première adjointe. Le couple aurait dissimulé 13 millions au fisc.

Mediapart révèle le 7 mars 2018 que le couple a été renvoyé devant le tribunal correctionnel pour des faits de « fraude fiscale massive ». C’est le juge Van Ruymbeke qui instruit la procédure. Fraude fiscale... il y a des années que les Balkany sont envoyés devant un juge, et des années qu’ils reprennent ni vu ni connu leur job, ou leurs jobs...

En octobre 2015, Mediapart révélait une partie de la fortune de ces deux « élus » :

« Pour lister les villas et les mètres carrés de piscines, chiffrer les 4×4 et les actifs offshore des Balkany, l’inspectrice des impôts a besoin de s’étaler sur quarante-sept pages. À la fin de ce courrier annonciateur d’un futur redressement fiscal, adressé au couple en décembre dernier et consulté par Mediapart, elle évalue leur patrimoine taxable à 16,5 millions d’euros. Depuis l’éclatement de l’affaire et l’ouverture d’une information judiciaire en décembre 2013, c’est la première fois qu’une estimation de la fortune des élus de Levallois-Perret (Hauts-de-Seine) est ainsi avancée par les services de Bercy. »

Ne jouons pas aux cons : Patrick Balkany a une place importante dans le dispositif du pouvoir profond français. Ce cofondateur du RPR qui a mis Sarkozy en selle avec un soutien israélo-américain symbolise le basculement d’un parti gaulliste fondé sur un axe social et national vers un parti libéral dont l’intérêt national était le cadet des soucis. Le nationalisme social des années 60 s’est métamorphosé en un libéralisme très international. Enrichissement, corruption et trahison ont été les signes visibles de ce changement.