À Chypre, au cours de la semaine passée, tandis que les citoyens ordinaires faisaient la queue aux distributeurs automatiques de billets pour retirer quelques centaines d’euros, d’autres déposants ont utilisé tout un ensemble de techniques pour accéder à leur argent, et le mettre en sécurité.
Alors que les dirigeants européens réfléchissaient à une solution pour éviter à Chypre de tomber en faillite, ils ont compris que quelque chose ne tournait pas rond lorsqu’ils ont appris que la Banque Centrale de Chypre avait emprunté plus de liquidités à la BCE que ce qui aurait été nécessité par ces retraits aux distributeurs de billets, rapporte Reuters :
« Personne ne sait exactement combien d’argent est sorti des banques de Chypre, ni où il est allé. Les deux banques au centre de la crise, Cyprus Popular Bank, aussi appelée Laiki, et Bank of Cyprus, ont des succursales à Londres qui sont restées ouvertes tout au long du weekend et qui n’ont fixé aucune limite pour les retraits. Bank of Cyprus possède également 80% de la banque russe Uniastrum Bank, qui n’a pas fixé non plus de restrictions sur les retraits exécutés en Russie ».
Dès dimanche, l’un des participants aux négociations a indiqué qu’il ne restait quasiment plus de capitaux dans la banque Laiki, alors qu’elle recelait auparavant 2,5 milliards d’euros de dépôts de clients étrangers.
On estime que les Russes avaient confié près de 20 milliards d’euros à des banques chypriotes, soit près d’un tiers de tous les dépôts de l’île et plus que le PIB du pays.
Selon un rapport du BND, l’agence allemande du renseignement extérieur, environ 80 oligarques russes ont obtenu la nationalité chypriote et se seraient ainsi établis sur le territoire de l’UE. Même si leurs comptes étaient bloqués comme ceux des autres citoyens chypriotes dans les banques de l’île, ils pouvaient aisément ordonner des transferts depuis des succursales étrangères de ces banques.
On a appris que la Banque Centrale Européenne avait contacté la Lettonie, un autre pays vers lequel se tournent les Russes qui souhaitent déposer de l’argent, mais également un candidat à l’adhésion à l’euro, pour la mettre en garde de ne pas accepter les capitaux russes provenant de Chypre.
Finalement, ce ne seront pas les oligarques russes qui payeront pour la crise chypriote, mais les PME locales et des citoyens chypriotes modérément riches, qui n’avaient pas la possibilité de déplacer leur argent. Maintenant que l’argent russe a disparu, les deux banques en difficulté vont s’emparer de l’argent de ces Chypriotes, et il est probable que leurs pertes seront bien plus importantes que les 40% qui avaient été estimés.
En effet, l’assiette des coupes de cheveux s’est beaucoup réduite avec la disparition de l’argent des Russes, mais les banques vont également enregistrer de plus fortes pertes, conséquence des pertes de revenus liées au volant d’affaires perdu avec ces capitaux. Quant aux Russes, il est plus que probable qu’ils ne reviendront pas.
« C’est ce qui passe pour de la real-politic monétaire dans le New Normal », écrit Zéro Hedge. « On se rabat sur une nation entière offerte en garantie alors que l’on ne souhaitait s’en prendre qu’au groupe des riches. Et le « groupe des riches » est victorieux à la fin, et en dépit de tout … »