Il a la trentaine, un travail intellectuel et prépare un doctorat en sciences humaines. Coutumier des manifestations nantaises contre la loi El Khomri, Antoine (prénom d’emprunt) défend une action radicale, violente et ciblée contre des symboles. Il détaille les raisons qui l’ont amené à faire ces choix, son organisation et sa vision du militantisme.
Je n’appartiens à aucune structure hiérarchisée, à aucun parti, syndicat ou association. L’organisation existe mais elle se fait autour de personnes qui partagent les mêmes idées et se greffent sans étendard affiché. On se rencontre dans des lieux d’assemblées pour se coordonner autour de la mobilisation. On peut, certes, partager les idées de militants classiques, mais nos moyens d’action sont en rupture avec leurs organisations qui nous semblent être des rouages de la mise en place des lois qu’on conteste. Nous ne voulons pas être des partenaires sociaux, nous ne négocions pas avec l’État.
On procède à des destructions symboliques ciblées contre l’oppression capitaliste : des banques, des pubs, des entreprises d’économie mixte – Vinci, Decaux, Tan (la société de transport nantaise, NDLR) – qui montrent que le service public se privatise. Une vitrine qui tombe symbolise cette opposition.
Ces actions sont radicales. Mais que représentent-elles par rapport à un travailleur subissant un système bancaire qui l’exploite ? Et quels moyens d’action a-t-on lorsque l’État, lui, augmente son niveau de radicalité ?
On n’accepte ni 49.3, ni la matraque
La violence, il faut la déconstruire. La première, c’est celle de l’État et des forces de l’ordre. La loi travail est représentative d’un gouvernement qui fait tout passer au nom de l’efficacité et de la crise. Nous, on n’accepte ni le 49.3, ni la matraque. On est contre cette loi, son monde et ses formes d’oppression, contre le capitalisme et la précarité généralisée.
Et on critique le comportement des forces de l’ordre. Elles n’agissent plus comme si elles faisaient du maintien de l’ordre. Elles utilisent des Lanceurs de balle de défense (LBD), tentent de « nasser » les manifestants, utilisent l’hélicoptère, instaurant une atmosphère proche de la guerre coloniale avec la présence de la BAC pour rafler des personnes dans la foule.
Aujourd’hui, on assiste à une distanciation entre l’État et les individus, à une rupture du dialogue social. Et de plus en plus de personnes se détachent des moyens d’action traditionnels pour entrer dans la radicalité. Moi, je ne veux plus de manifs derrière le camion de la CGT avec les galettes saucisses.