Les relations russo-ukrainiennes, la politique de Bruxelles et de Washington à l’égard de Moscou, la place de la Russie dans le monde et les pressions exercées par les États-Unis sur leurs alliés européens sont autant de thèmes abordés mardi par le président Vladimir Poutine lors de sa rencontre avec les ambassadeurs russes et les représentants permanents de la Russie auprès des institutions internationales. La crise politique en Ukraine a été évoquée en priorité.
Le président Porochenko responsable de la situation
Selon le chef de l’État russe, le président ukrainien Piotr Porochenko assume l’entière responsabilité de la situation en Ukraine, notamment des conséquences de l’opération militaire dans le sud-est du pays.
"Jusqu’à présent, Piotr Porochenko n’avait pas de rapport direct avec l’ordre de lancer les opérations militaires. Actuellement, il assume pleinement cette responsabilité. Il s’agit d’une responsabilité non seulement militaire, mais aussi - et ce qui est beaucoup plus important - politique", estime Vladimir Poutine. Après avoir indiqué que "l’assassinat de journalistes était absolument inadmissible", le président russe a souligné qu’il s’agissait d’une "liquidation intentionnelle de représentants de la presse" par "ceux qui ont peur d’une information objective".
Les événements en Ukraine montrent que l’ordre mondial unipolaire est un leurre, et que le "deux poids, deux mesures" à l’égard de la Russie ne fonctionne pas, a déclaré Vladimir Poutine dans son discours devant les ambassadeurs russes.
"Ceux qui ne cessent d’affirmer leur exclusivité n’apprécient pas du tout la politique indépendante de la Russie. Les événements en Ukraine l’ont confirmé, comme ils ont confirmé que le modèle de relations reposant sur le « deux poids, deux mesures » avec Moscou ne fonctionnait pas", a constaté M. Poutine.
Une tentative d’endiguer la Russie
Les événements provoqués par l’Occident en Ukraine constituent, pour Vladimir Poutine, une tentative d’endiguer la Russie en créant un foyer de tension à ses frontières. "Les événements provoqués en Ukraine sont l’expression condensée de la fameuse politique de confinement pratiquée à l’égard de la Russie", a déclaré le chef de l’État, ajoutant que cette politique "n’a malheureusement pas été abandonnée après la fin de la guerre froide".
D’après le président russe, l’Europe a besoin d’un "filet de sécurité pour que les scénarios irakien, libyen, syrien, ainsi que le scénario ukrainien […] ne deviennent pas une maladie contagieuse". La Russie est prête à travailler dans le cadre de différents formats internationaux à condition que ses intérêts soient pris en compte, car le rôle de simple observateur ne lui convient pas, estime M. Poutine. "Si on nous réserve le rôle de simples observateurs sans voix déterminante sur des questions clés ayant un intérêt vital pour nous, ces formats ne nous intéressent pas", a-t-il déclaré devant les diplomates russes.
Russie-USA : les relations dans une mauvaise passe
Après avoir constaté que les relations entre la Russie et les États-Unis traversaient une période difficile, le dirigeant russe a toutefois souligné que Moscou était prêt à un dialogue constructif sur un pied d’égalité. "Nous avons toujours aspiré à être des partenaires prévisibles, à mener des affaires sur un pied d’égalité, mais en contrepartie nos intérêts légitimes ont souvent été ignorés", a affirmé Vladimir Poutine. "Nous ne cessons d’entendre des ultimatums et des sermons", a indiqué le chef de l’État russe, ajoutant pourtant que Moscou était prêt à traiter avec Washington d’égal à égal.
Impact économique de la crise ukrainienne
Désireux de "punir" la Russie pour sa position sur la crise ukrainienne, les États-Unis n’hésitent pas à recourir au chantage en exerçant une pression sur la France afin de la dissuader de fournir des porte-hélicoptères Mistral à la Russie. "Nous sommes au courant des allusions selon lesquelles si les Français ne livrent pas les Mistral, les sanctions frappant des banques françaises [BNP Paribas, Crédit agricole et Société générale, ndlr] seront levées ou, tout au moins, minimisées. Qu’est-ce sinon du chantage ?", a constaté le président russe.
La crise politique ukrainienne s’est également répercutée sur les tentatives de l’Union européenne de bloquer la construction du gazoduc South Stream censé acheminer du gaz russe vers l’Europe en contournant l’Ukraine. Néanmoins, a assuré Vladimir Poutine, la Russie continuera à réaliser ce projet. "Nous tenons beaucoup à notre réputation de fournisseur fiable de ressources énergétiques et investissons dans le développement des infrastructures gazières. Comme vous le savez, nous avons construit avec des entreprises européennes un nouveau système de transport de gaz baptisé Nord Stream, qui passe au fond de la mer Baltique. Malgré les difficultés bien connues, nous continuerons également à réaliser le projet South Stream", a souligné mardi le président dans son discours devant les ambassadeurs russes et les représentants permanents de la Russie auprès des institutions internationales.