Sergio Massa, ministre (de l’Économie) du gouvernement actuel de centre gauche, sort en tête de ce premier tour mais avec une courte avance (36 %) sur le candidat trumpien Javier Milei (30 %), l’homme aux yeux de loup (on dirait Jack Nicholson dans Wolf).
Après le judéo-bolchevisme, le judéo-libéralisme
Milei se présente en candidat anti-Système, alors que c’est un néolibéral ultra. Dans un pays qui connaît une inflation folle (138 % sur un an), et qui voit revenir l’effondrement de 2001 (prêt du FMI contre rigueur brutale, chômage de masse, chaos social) avec angoisse, Milei fait à la fois envie – de changement – et peur, pour la brutalité de ses méthodes.
Ceux qui s’étonnent de voir Massa mener la course alors qu’il est le ministre d’une économie avec une inflation à trois chiffres, doivent savoir que s’il n’a pas résolu le problème, il maintient le pays au bord du ravin. Le Monde écrit :
Plus « politique » que technicien, homme de dialogue et surtout pragmatique, Massa a su manœuvrer en maintenant le dialogue avec le Fonds monétaire international (FMI) sur les ajustements requis. Tout en gardant l’oreille des syndicats, et sans déclencher d’incendie social. Mais sans enrayer le rognage du pouvoir d’achat. Un peu comme un médecin « qui n’a pas guéri la maladie, mais dont le malade n’est pas encore mort », railla Clarin, quotidien proche de l’opposition.
Comme Trump ou Bolsonaro, Milei a du bon – il ne croit pas à la fable du réchauffement climatique – et du moins bon : ce petit malin envoie un message lourdingue à Tel-Aviv en déclarant qu’il veut se convertir au judaïsme et qu’il étudie la Torah. Mieux, il veut convertir la monnaie nationale en dollar US ! Autant dire qu’il s’aligne sur l’axe israélo-américain. Il a d’ailleurs déclaré que ses « deux grands alliés sont les États-Unis et Israël ». Au moins, il n’avance pas masqué.
« Si je deviens président, comment vais-je faire à Shabbat ? Vais-je me déconnecter du pays du vendredi au samedi ? Certaines questions rendraient [la religion] incompatible. Le rabbin qui m’aide à étudier dit que je devrais lire la Torah du point de vue de l’analyse économique. » (Mieli à El Pais)
S’il est élu, Milei veut réduire drastiquement les dépenses publiques, comme Sarkozy en 2007. On connaît la suite. Le peuple argentin balance donc entre un homme du Système, une sorte de Juppé à la tête d’un superministère, et un anarcho-libéral à moitié dingue mais qui sait où est le vrai pouvoir. Times of Israel ne peut que l’adorer :
Lors de ses apparitions publiques, Milei cite souvent des passages de la Torah. Au début du mois, il est monté sur scène lors d’un événement de campagne dans une arène de Buenos Aires au son d’un shofar, la corne de bélier que l’on souffle à Roch Hachana.
Il a visité le musée de la Shoah de Buenos Aires et s’est rendu en juillet dernier à New York, où il s’est recueilli sur la tombe du rabbin Loubavitch Menachem Mendel Schneerson, l’ancien chef spirituel influent du mouvement Habad-Loubavitch.
C’est toujours le même merdier avec l’alternance : d’abord une gouvernance de (fausse) gauche qui trompe le peuple, suivie d’une cure d’austérité de droite pour remettre les comptes à niveau, suivie logiquement d’un chaos social, suivi à nouveau d’un pouvoir de (fausse) gauche porté par la colère populaire...