Au cours de ces 5 dernières années, la France a particulièrement fait preuve de fermeté avec les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et l’Allemagne afin de contraindre l’Iran à collaborer avec l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) au sujet de son programme nucléaire controversé en raison de ses visées militaires supposées, lesquelles vont de pair avec le développement de missiles balistiques.
Cette ligne dure s’explique aussi par la nécessité de convaincre Israël de ne pas tenter une opération militaire contre les sites nucléaires iraniens, ce qui aurait de graves conséquences non seulement dans la région arabo-persique mais aussi sur l’économie mondiale.
Actuellement, et à quelques jours d’une nouvelle rencontre cruciale avec les grandes puissances à Bagdad, Téhéran négocie avec l’AIEA un accès à la base de Parchin où le régime iranien est soupçonné d’avoir effacé toute trace d’éventuelles activités militaires nucléaires.
Et c’est dans ce contexte que l’ancien Premier ministre Michel Rocard s’est rendu en Iran pour une visite de trois jours, alors qu’à Paris, le nouveau président, François Hollande, s’apprête à prendre ses fonctions. D’où des interrogations sur un éventuel changement de cap de la diplomatie française à l’égard de Téhéran.
Quoi qu’il en soit, le régime iranien ne s’est pas fait prier pour sortir le grand jeu. En effet, l’ancien Premier ministre a été ainsi reçu par Ali Akbar Salehi, le ministre des Affaires étrangères, Saïd Jalili, le secrétaire du Conseil suprême de sécurité nationale et par ailleurs principal négociateur sur le dossier du nucléaire.
« Les Iraniens connaissent bien Michel Rocard » a affirmé, le 12 mai, Michel Dubois, un collaborateur de l’ancien Premier ministre. « Nous espérons que sa visite facilitera les premiers contacts entre le prochain gouvernement français et l’Iran » a-t-il ajouté.
« Je n’ai eu aucun engagement concret mais j’ai le sentiment que les Iraniens veulent faire passer un message de bonne volonté avant Bagdad » a expliqué, deux jours plus tard, Michel Rocard, tout en indiquant avoir insisté auprès de ses interlocuteurs sur la nécessité pour Téhéran de « »répondre concrètement et dans les détails » aux questions de la communauté internationale concernant ses activités nucléaires et souligné que Paris ne remettrait pas en cause « sa position de fermeté ».
Seulement, cette initiative passe mal aux yeux des alliés de la France étant donné qu’elle a été l’occasion pour le régime iranien de la présenter comme un geste d’apaisement de Paris à l’égard de Téhéran et donc un fléchissement de la position jusque-là affichée par la diplomatie française.
Voilà donc de quoi mettre dans l’embarras l’équipe de François Hollande, qui s’est désolidarisée de l’initiative de Michel Rocard. Ce dernier « n’est porteur d’aucun message ni investi d’aucune mission » a-t-on fait valoir dans l’entourage du président fraîchement élu.
« La position de François Hollande au sujet du programme nucléaire iranien est connue. L’Iran doit se conformer à ses obligations internationales et respecter les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies en cessant ses activités nucléaires sans finalité civile crédible » a-t-on également fait valoir. D’autre part, l’entourage de Michel Rocard a indiqué qu’il s’agit d’un voyage « prive », qui avait été initialement prévu en avril dernier, avant d’être annulé pour raison de santé
Cette visite de Michel Rocard a donné des munitions à l’UMP, alors que vient la campagne pour les élections législatives. « Soit il s’agit d’une initiative purement personnelle. Elle traduit alors déjà l’absence d’autorité du président élu sur sa majorité. Soit François Hollande était informé de ce déplacement qui constitue une forme de diplomatie parallèle et de recours aux petites officines, et je le condamne fermement » a lancé Jean-François Copé, le secrétaire général de l’ancien parti présidentiel.