Le mouvement pro-palestinien en France est traditionnellement contrôlé par l’extrême gauche, afin de chasser des cortèges une opposition à la politique d’Israël authentiquement dissidente et patriote. Un encadrement internationaliste, rabiquement anti-français et destiné à valider auprès de l’opinion publique le choc des civilisations qui se réalise aujourd’hui.
Alors que début juillet Tsahal lance l’opération « Bordure protectrice » sur Gaza, le « Collectif national pour une paix juste et durable entre Israéliens et Palestiniens » s’empare de la vague de protestation qui s’exprime dans la rue. Composé d’une cinquantaine d’associations, syndicats et partis politiques (CGT, UNEF, LDH, NPA, PCF, etc.), ce collectif est représenté, auprès des autorités, par Alain Pojolat, un pilier du NPA, et dans les médias institutionnels, par Youssef Boussoumah, membre fondateur du Parti des Indigènes de la République et compagnon d’Houria Bouteldja.
Dès la manifestation parisienne du 13 juillet, ce binôme, bancal au premier abord, allait se retrouver confronté aux provocations de la Ligue de défense juive (LDJ) aux abords de la synagogue de la rue de la Roquette (Paris 11ème). Provocations qui allaient servir de prétexte à une levée de boucliers médiatiques qui conduira le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve à prononcer des interdictions pour les manifestions suivantes. Au motif que « la République n’est pas compatible avec la haine. La République n’est pas compatible avec la xénophobie, l’antisémitisme ne peut pas parler une seconde fois », dixit Cazeneuve, la préfecture de Police interdira la manifestation du 19 juillet. Mais le NPA appelle tout de même à manifester : « Compte tenu de l’escalade à Gaza, la colère est très grande et va vouloir s’exprimer. Que la manifestation soit autorisée ou non, il va y avoir des centaines ou des milliers de jeunes qui vont converger vers Barbès samedi », explique alors Alain Pojolat (Libération, 18 juillet 2014). Toutefois, le lendemain, alors que la situation dégénère à Barbès, Pojolat est aux abonnés absents.
Le même jour, l’affaire de l’attaque de la synagogue de la rue de la Roquette s’est définitivement démontée. De nombreuses vidéos circulant sur Internet ont pointé la responsabilité de la LDJ, dont les militants attaquent délibérément, les armes à la main, les manifestants pro-palestiniens avant de se réfugier derrière les gendarmes mobiles. Mais ce jour-là c’est Serge Benhaïm, le président de la synagogue Don Isaac Abravanel située rue de la Roquette, qui reconnaît au micro d’i>Télé qu’« aucun projectile n’a été lancé sur la synagogue […] À aucun moment nous n’avons été physiquement en danger. »
Toujours le 19 juillet, pour assurer la protection des manifestants contre les agressions impunies de la LDJ, la Gaza Firm, composée de supporters du PSG, parmi lesquels Mathias Cardet, défile en chantant l’hymne national français, et la quenelle popularisée par Dieudonné fait florès dans les cortèges pour finalement devenir, de fait, le nouveau signe de ralliement des sympathisants français de la cause du peuple palestinien. Au grand dam des autorités et de l’encadrement officiel des manifestations. Dans leur viseur commun, le collectif Cheikh Yassine et la Gaza Firm : « Des consignes ont été données pour que les cortèges conservent une totale imperméabilité vis-à-vis de ces gens », indiquera Alain Pojolat (Libération, 6 août 2014).
Quant à Youssef Boussoumah, il estimera sur RMC (1er août), à propos de la manifestation du 26 juillet, que les débordements étaient le fait d’un « groupe qui s’appelle Gaza Firm » et dont les membres « sont des fachos […] Ils sont 40, ils sont ultra-minoritaires et ils seront absolument exclus. »
L’histoire d’Alain Pojolat et de Youssef Boussoumah s’inscrit dans la crise de la représentation qui touche à la fois les syndicats et les partis politiques, même groupusculaires. C’est l’histoire d’un ancien employé de la BNP, figure historique des milieux gauchistes et d’un professeur de collège aux faux airs de Pierre Richard…
Alain Pojolat, vieux routier des milieux gauchistes
« Communiste avant tout, et forcément libertaire parce que communiste… »
Alain Pojolat, entretien avec Sebastien Schifres dans La Mouvance autonome en France de 1976 à 1984, 2004
« Viré de la CFDT, récupéré plus tard par la CGT qui en fit un de ses permanents, Pojolat est un retraité de la banque qui, au fond, se rêve encore en révolutionnaire professionnel. »
Le Nouvel Observateur, 7 août 2014
Né à Paris en mars 1948, Alain Pojolat est issu d’une famille d’ouvriers. Son père, membre du Parti communiste, l’emmène, le 8 février 1962, à la manifestation contre l’OAS. Un événement qui l’a marqué et à eu une influence déterminante sur son futur engagement politique. Employé à la BNP à partir de 1967, il rejoint les Comités Vietnam de la Jeunesse communiste révolutionnaire (JCR) lancée par Alain Krivine, Henri Weber (futur sénateur socialiste) et Daniel Bensaïd. Il rejoint ensuite la Ligue communiste (section française de la IVe Internationale) dès sa création en avril 1969, dans le sillon du journal Rouge. Comme le résumera des années plus tard la revue communautaire Passages (octobre 1990) :
« De nombreux cadres de l’extrême gauche sortaient de l’Hachomer [Hachomer Hatzaïr, littéralement “la jeune garde”, sioniste socialiste, NDLR]. En 1973, le bureau politique était ashkénaze, le Comité central juif, les permanents protestants et la base d’origine catholique. »
En 1973, Pojolat adhère à un groupuscule gauchiste particulièrement actif, Révolution !, d’inspiration maoïste et pro-Pol Pot, né, deux ans plus tôt, d’une scission de la Ligue communiste. Animé par Henri Maler (aujourd’hui universitaire et animateur du site Acrimed), Isaac Joshua et la féministe Maya Surduts, avec l’appui d’anciens militants de la Gauche prolétarienne, le groupe reproche au mouvement d’Alain Krivine son attitude « attentiste » vis-à-vis de la gauche, son électoralisme et préconise la création d’un « front anti-impérialiste » englobant la petite bourgeoisie, les jeunes et les femmes afin d’opérer, dans la tradition marcusienne, une politique de « contournement du mouvement ouvrier ». La stratégie suivie depuis les années 2000 par le think tank socialiste Terra Nova, qui, au lieu de s’appuyer sur la classe ouvrière, voit dans les marginalités immigrée, homosexuelle, féministe, etc. le nouveau terreau des électeurs socialistes. Comme l’avait dit Georges Marchais des gauchistes :
« Ces faux révolutionnaires doivent être énergiquement démasqués car, objectivement, ils servent les intérêts du pouvoir gaulliste et des grands monopoles capitalistes. »
Publiant le journal Révolution ! de 1971 à 1976, ce groupuscule participera à tous les grands « happenings » des années 70 (Lip, Larzac, Canjuers, etc.), dont la classe ouvrière se tiendra toujours soigneusement écartée. Dès cette époque, Pojolat et consorts confondent classe ouvrière et Lumpenproletariat, le véritable ennemi du prolétariat (comme les vigiles de supermarché en général d’origine étrangère) prêt à trahir au profit du capitalisme en raison de sa non-appartenance de classe : « C’est-à-dire que déjà nous, au niveau de “Révolution !”, on commence à prendre en compte le fait qu’il y a toute une partie de la classe ouvrière qui est pas organisée : c’est déjà la précarité, les sans-papiers, l’immigration, les boîtes de sous-traitance, tous ceux qui sont pas directement organisés… Et donc nous notre ligne politique c’est les “comités syndiqués – non-syndiqués” » expliquera Pojolat en 2004.
Pendant toute cette époque, comme employé à la BNP, il est syndiqué à la CFDT, structure préexistante utilisée dans la lutte contre le Parti communiste. C’est là qu’il se lie à Nathalie Ménigon, née en 1957, future égérie d’Action directe. Il quitte Révolution ! en 1976 lors de sa mutation en l’OCT (Organisation communiste des travailleurs) suite à une fusion avec la Gauche ouvrière et paysanne (GOP), alors dirigée par Alain Lipietz (et où milite Dominique Voynet). Toujours en 1976, Ménigon et Pojolat sont exclus de la CFDT, et forment un collectif autonome de la BNP, collectif qui durera jusqu’en 1978. Radicalisés, ils gravitent alors autour d’un des premiers groupes du mouvement autonome, Camarades (avec 60-70 personnes), du nom de la revue animée par Yann Moulier (qui enseignera par la suite à l’École normale supérieure et à l’Institut d’études politiques de Paris, à l’Université de technologie de Compiègne et à l’Université de Binghamton-New York). Pojolat raconte :
« J’allais à toutes les réunions de Camarades. Et Nathalie Ménigon y allait au départ très régulièrement. Ensuite il y a eu le fait qu’il y a eu un certain nombre de militants des GARI [Groupes d’action révolutionnaires internationalistes] qui sont venus sur Paris. » (op. cit.)
C’est certainement à cette époque qu’il a fait la connaissance de Jean-Marc Rouillan, alors membre des GARI.
Sur ces activités dans la période 1979-1987, « Pojo » entretient volontiers le flou : « Après l’Autonomie moi j’ai pas adhéré à une orga politique. […] je suis resté en dehors… » (op. cit.) En réalité, il semble qu’il ait été un très proche d’Action directe. Il a d’ailleurs été fiché comme tel comme devait le rapporter Le Spectacle du Monde en 1987, étant même cité comme membre à part entière du groupe terroriste par Michael Y. Dartnell dans Action direct : ultraleft terrorism in France (1979-1987). Passé entre les gouttes, il passera un mois et demi en prison en 1986-1987, échappant au sort de Nathalie Ménigon et Jean-Marc Rouillan, entre autres, qui passeront 20 ans derrière les barreaux. Il sera animateur du Comité de soutien aux prisonniers d’Action directe et hébergera Jean-Marc Rouillant en décembre 2012 « sans jamais désespérer de le faire adhérer au NPA » (Le Nouvel Observateur, 7 août 2014).
À sa sortie de prison en 1987, il a embrassé la carrière plus confortable de syndicaliste, ayant adhéré à la CGT (1987), dont il deviendra permanent en 1999 tout en restant dans l’orbite de la LCR, signant un « Appel pour une amnistie des révoltés de novembre » daté du 12 décembre 2005 avec, entre autres Oliver Besancenot et Alain Krivine. Ce, sous l’appellation « Révoltés de novembre », qui fleure bon la phraséologie pseudo-révolutionnaire bourgeoise, entendre les délinquants responsables de la mise à sac, à l’automne 2005, des biens et infrastructures des travailleurs habitant en banlieue. Pilier du NPA, il en est membre du comité exécutif (organe de direction) depuis sa création en 2009. Bien que « complètement athée », Alain Pojolat prendra position pour le port du voile lors de la polémique interne au NPA suite au renvoi d’une candidate qui portait le hijab. Un soutien toutefois conditionnel :
« À partir du moment où ils restent anticapitalistes et féministes, ils ont leur place au NPA. […] Quand je la vois se battre pour des valeurs féministes, en luttant contre des fermetures de centres IVG ou contre l’imposition du voile, alors j’ai confiance en elle pour me représenter. [ …] Notre idéalisme est complètement empreint de tradition judéo-chrétienne. [ …] Les sans-papiers sont par exemple croyants à 95 %, certains sont polygames, mais ce n’est pas écrit sur leur front : est-ce que l’on doit les refuser pour autant ? Évidemment, il ne s’agit pas de tourner le dos à ces contradictions mais de faire évoluer la conscience des uns et des autres dans le cadre commun que constitue le parti. »
Et de conclure, lucide :
« Si nous ne sommes pas bien représentés dans les quartiers, c’est qu’on ne mérite pas d’y être, que nous n’avons pas encore accompli un travail politique suffisant. Aujourd’hui, la composition sociologique naturelle du NPA est fortement marquée par le personnel enseignant et les professions du tertiaire. La seule solution pour faire avancer les idées anticapitalistes et féministes dans les couches populaires, c’est de trouver les bons médiateurs. Avec ou sans voile. » (Rue89, 2 décembre 2010)
Il a par ailleurs signé dans la revue du NPA Que faire ? (mai 2012) : « Ras l’front ou l’expérience d’un réseau efficace. » Engagé dans le combat pour les immigrés clandestins, il figure dans les remerciements d’un livre signé par trois universitaires, On bosse ici, on reste ici ! La grève des sans-papiers : une aventure inédite (La Découverte, 2011)
Il avait été condamné en juin dernier par la cour d’appel de Paris à 1500 euros d’amende avec sursis pour avoir organisé une manifestation en faveur du militant libanais Georges Ibrahim Abdallah. Négociateur du parcours de la manifestation du 13 juillet dernier, il verra les manifestations de Barbès (19 juillet) et de la place de la République (26 juillet) interdites par les autorités, avec pour motif la faiblesse du service d’ordre. Il a malgré tout maintenu l’appel à manifester tout en se gardant bien de descendre dans la rue. Pour ces faits, il est convoqué le 22 octobre devant la 24e chambre du TGI de Paris.
Des Indigènes sous contrôle de la gauche, comme au temps des colonies
« Aussi douloureux que cela puisse être ressenti par les écorchés du drapeau et les thuriféraires d’une France éternelle et gauloise, nous transformons la France. En d’autres termes, elle aussi, s’intègre à nous. […] La France ne sera plus jamais comme dans les films de Fernandel. Notre simple existence, doublée d’un poids démographique relatif (1 pour 6) africanise, arabise, berbérise, créolise, islamise, noirise la fille aînée de l’Église, jadis blanche et immaculée, aussi sûrement que le sac et le ressac des flots polissent et repolissent les blocs de granit aux prétentions d’éternité. »
Houria Bouteldja, 19 septembre 2009
« Y a-t-il un seul soldat français qui en Algérie n’ait pas violé ? J’en doute, j’en doute vraiment. […] Des générations entières de français ont participé à cela. »
Youssef Boussoumah, conférence « Justice universelle et massacres de masse au XXème siècle », avril 2010
Le Mouvement des Indigènes de la République (MIR) a été créé en janvier 2005. Un groupuscule qui va devenir un interlocuteur médiatique dans la représentation des musulmans de France après les émeutes de 2005. Il s’agit bien entendu d’un rôle de sparring-partner des néoconservateurs sionistes dans un théâtre télévisuel, où les Indigènes de la République jouent le rôle du musulman aigri et haineux envers la France et les Français, validant ainsi, par leurs outrances, le choc de civilisations et induisant le téléspectateur de souche, insulté, à se ranger derrière ceux qu’ils prétendent combattre. Loin de la noblesse du nationalisme arabe, les Indigènes qui prétendent « combattre les inégalités raciales qui cantonnent les noirs, les Arabes et les musulmans à un statut analogue à celui des indigènes des anciennes colonies », sont en réalité intégralement chapeautés par l’extrême gauche.
En effet, interrogée en 2006 par Jérémy Robine (Hérodote, n°120), Houria Bouteldja explique :
« Les frontières m’emmerdent, l’espace est à tout le monde, on est partout chez soi... L’État-nation m’emmerde, c’est ce qui produit le racisme, pour moi [...] Ça crée des frontières, ça homogénéise les populations, sur des bases raciales, ethniques, ou religieuses, et donc, pour la France, ceux qui ne sont pas catholiques, blancs, ils ne sont pas vraiment français. Les juifs par exemple, ils ne sont pas vraiment français : ils sont plus français que les musulmans, mais ils sont dans la périphérie. [...] Nous, ce qu’on veut montrer, c’est qu’il faut que la France repense l’identité française. L’identité française doit exploser. »
En mars 2010, le mouvement se dote d’une association de financement du Parti des Indigènes de la République (AFPIR) et devient un parti qui espère « être présent lors des échéances électorales de 2012 à 2014, et notamment aux élections présidentielles, législatives et municipales de manière à construire l’autonomie politique indigène [sic] et à renforcer la dynamique décoloniale ». Le Parti des Indigènes de la République aura pour slogan : « Le PIR est avenir. » Tout un programme…
Tout commence en décembre 2003. Pour le blog « Les mots sont importants », Houria Bouteldja, Catherine Grupper, Laurent Lévy et Pierre Tévanian produisent un texte intitulé « Le voile à l’école : une nouvelle affaire Dreyfus ». Dans ce texte, les signataires se rêvent évidemment en dreyfusards, et mélangent tout, allègrement :
« D’un côté, nous avons aujourd’hui une droite très massivement favorable à l’exclusion des élèves voilées, comme elle fut naguère massivement antidreyfusarde, mais avec des exceptions (comme Guy Sorman). De l’autre, nous avons une gauche très divisée. »
Le texte sera publié le 26 janvier 2004, sur le blog animé par Sylvie Tissot (professeur à l’université Paris VIII) et Pierre Tévanian. Né en 1970, ce dernier est professeur de philosophie au lycée de Drancy. Formé par le sociologue d’extrême gauche Laurent Mucchielli, cet ancien élève de l’École normale supérieure de Saint-Cloud a fait partie des initiateurs du collectif « Une École pour tous et pour toutes » (contre la loi relative au port de signes religieux à l’école), dans lequel militera Houria Bouteldja. Ses autres principaux engagements portent sur les luttes en faveur de sans-papiers et « Résistons ensemble contre les violences policières ». Il a été président du comité local Paris 20e du MRAP (il y avait adhéré en 2004, mais sera débarqué en 2005 pour des prises de positions pro-voile). Au sein de son lycée, il s’est notamment opposé à la Ligue communiste révolutionnaire et à Lutte ouvrière pour soutenir les élèves voilées. Il fut à l’initiative de la pétition « Oui au foulard dans l’école laïque » et organisa une manifestation de soutien aux sœurs Lévy (dont le père judéo-arabe appartenait au MRAP). Il a notamment signé Stop quelle violence (2001), Le Racisme républicain. Réflexions sur le modèle français de discrimination (Esprit Frappeur, 2002), Le Ministère de la peur. Réflexion sur le nouvel ordre sécuritaire (Esprit Frappeur, 2004), Le Voile médiatique, un faux débat : « L’affaire du foulard islamique » (Raison d’agir, 2005) ou encore un Dictionnaire de la lepénisation des esprits (2002). Un temps proche du Mouvement de l’immigration et des banlieues, il se rattache à la mouvance anarchiste-libertaire.
Pierre Tévanian est considéré par les observateurs, comme le véritable idéologue des « Indigènes » et fut, en janvier 2005, un des signataires de l’Appel des Indigènes de la République pour la tenue d’assises de l’anticolonialisme, sorte de manifeste du mouvement :
« Nous sommes les indigènes de la République ! [...] NOUS, descendants d’esclaves et de déportés africains, filles et fils de colonisés et d’immigrés, NOUS, Français et non-Français vivant en France, militantes et militants engagé-e-s dans les luttes contre l’oppression et les discriminations produites par la République postcoloniale, lançons un appel à celles et ceux qui sont parties prenantes de ces combats à se réunir en assises de l’anticolonialisme. »
- Blanc et bourgeois, Pierre Tévanian participait le 1er octobre 2011 au colloque « La France en situation postcoloniale ? », organisé rue d’Ulm à l’École normale supérieure par Esther Benbassa, avec le soutien de la Région Île-de-France, de la mairie de Paris et de… l’ambassade des États-Unis
À l’origine de ce manifeste, on trouve également Nicolas Qualander, 30 ans, militant de la LCR depuis l’âge de 15 ans ou encore Saïd Bouamama. Issu des quartiers rouges de Roubaix, ce dernier a participé à la Marche des Beurs des années 1980, ayant notamment accueilli dans le Nord la Marche pour l’égalité. Il fut ensuite un des organisateurs de Convergence 84, puis Divergence 85. Il a également participé à la création du collectif « Mémoire fertile ». Impliqué dans la reconnaissance de droits politiques aux résidents étrangers, ce docteur en socio-économie vit également aux frais du contribuable, comme chargé de recherche à l’IFAR (Intervention formation action recherche) de l’université de Lille, où il s’est spécialisé dans des sujets aussi passionnants que « Face au politique : persistance des rapports coloniaux ». Un extrait de son jus de cerveau :
« La lutte pour l’accueil aux droits politiques des résidents étrangers s’ancre sur le postulat démocratique que la citoyenneté est indivisible et qu’elle ne saurait accepter que des populations vivant ensemble et assumant ensemble les devoirs citoyens soient divisées en plusieurs catégories aux droits inégaux. »
En réalité, il conduit de modestes enquêtes de terrain dans les zones de non-droit de la communauté urbaine de Lille. Il a signé des livres tels que Jeunes Manosquins issus de l’immigration algérienne : les héritiers involontaire de la guerre d’Algérie (L’Esprit frappeur, 2000), Dix ans de marche des Beurs, chronique d’un mouvement avorté (Desclée de Brouwer, 2004), Familles maghrébines de France, de la galère à la citoyenneté, ou encore Vers une nouvelle citoyenneté. Crise de la pensée laïque (La Boîte de Pandorre, 1991). Il a signé (avec Pierre Tévanian, Étienne Balibar, Françoise Gaspard et Catherine Lévy) une tribune parue dans Libération (20 mai 2003) : « Oui au foulard islamique à l’école laïque. »
Bouteldja et Boussoumah, fonctionnaires de la politique du PIR
Youssef Boussoumah est un des deux porte-parole des Indigènes de la République, fonction qu’il partage avec celle qui est généralement présentée comme sa compagne à la ville (cf. Wikipédia par exemple), Houria Bouteldja, de vingt ans sa cadette. Comme la plupart des cadres des Indigènes de la République, Boussoumah et Bouteldja sont fonctionnaires.
Né en 1954, Youssef Boussoumah déteste l’État français mais en est salarié, financé par les impôts des contribuables. Il enseigne l’histoire-géographie en collège. Il a participé à l’organisation en 1998 de la campagne pour le droit au retour des Palestiniens et, en 2001, à la fondation des Missions civiles internationales pour la protection du peuple palestinien. Il est un des coordinateurs des fantomatiques Campagnes civiles internationales du peuple palestinien. Il a soutenu de très près José Bové en 2007. Il dénonçait en avril 2011 le fait que les « manifestations religieuses traditionnelles » (comprendre catholiques) ne soient pas incluses dans la loi contre la dissimulation du visage. Sa façade de défenseur d’un islam persécuté cache mal son obsession anticatholique. Il fustige en effet les « porteuses de burqa françaises » (les bonnes sœurs), ironise sur « notre belle France, fille aînée de l’Église pour l’éternité » et compare le hijab au vendredi saint :
« Ce vendredi (vendredi saint) comme chaque année, auront lieu les processions traditionnelles de pénitents, rejouant la Passion du Christ, dans plusieurs villes du sud de la France dont Perpignan, Collioure, Villefranche, Nice etc. Elles susciteront sympathie et joie. Pendant ce temps on criera haro sur Ibtissame ou Fatoumata, coupables elles de ne pas avoir la bonne religion. Religion traditionnelle, oui, religion de Noirs et d’Arabes, jamais, pensent-ils tout bas. »
Comme si l’Église catholique avait encore une quelconque influence sur la politique française ou européenne (absence de toute référence aux racines chrétiennes de l’Europe dans la Constitution européenne).
Dans la même veine, sa défense de la cause palestinienne vire systématiquement à la mise en accusation du « Blanc » :
« Une fois de plus, le PS apparaît pour ce qu’il est, un parti admiratif du colonialisme et de la prééminence blanche. Bref, une grosse larve putride. C’est en tant qu’État blanc garantissant le pouvoir occidental en Orient arabe qu’Israël est soutenu. » (Communiqué du PIR, novembre 2012)
Comme le résume Youssef Boussoumah : « Beaucoup des Indigènes sont des Algériens... ou d’origine algérienne » (op. cit.). Son véritable but étant de faire payer (financièrement) à la France son passé colonial, par une culpabilisation et des demandes de réparations. Pour ce faire, il reprend la rhétorique des associations mémorielles juives, comme le révèle cette conférence donnée en avril 2010 :
Les « Indigènes » organisent des manifestations, comme le 8 mai 2008 pour célébrer la défaite française de Dien Bien Phu (350 manifestants selon les médias). Pourtant, les Asiatiques sont absents du mouvement, Houria Bouteldja reconnaît qu’« ils ne sont pas dans nos réseaux[...], dans les réseaux militants [autour de l’immigration] » (op. cit.). Comprendre : ils ne sont pas sous la tutelle de la gauche…
Mais surtout, le PIR participe annuellement à une marche de commémoration du massacre du 17 octobre 1961, non sans quelques difficultés d’organisations, comme en 2010…
Ce ne sont pas ces mini-happenings qui ont fait connaître le PIR au grand public, mais le nombre pléthorique de passages de sa porte parole, Houria Bouteldja, dans l’émission Ce soir ou jamais de Frédéric Taddeï (plus de 10 passages, ce qui la place au niveau de Jacques Attali ou d’Alain Finkielkraut), avec des analyses du type :
« Un Noir ou un Arabe qui dit “sale Blanc” exprime au pire un sentiment d’intolérance ou de haine en réaction aux humiliations qu’il subit, un Blanc qui dit “sale Noir” ou “sale Arabe” exprime forcément un sentiment raciste. » (Ce soir ou jamais, 5 décembre 2006)
Une tribune inespérée, où ses outrances feront d’elle la championne toutes catégories et l’idiote utile de la mise en scène médiatique du choc des civilisations. Représentante, de fait, des musulmans de France, le grand public la connaît pour avoir qualifié les indigènes français d’un mot nouveau, les « souchiens », qui peut bien évidemment être entendu phonétiquement et compris comme « sous-chiens » (le chien étant un animal maudit dans l’islam) : «
On met toujours la focale sur les quartiers populaires qui seraient en déficit de connaissances, de conscience politique. C’est le reste de la société qu’il faut éduquer […] ceux qu’on appelle nous les “souchiens”, parce qu’il faut bien leur donner un nom, les Blancs. » (France 3, 2 juin 2007)
Elle sera poursuivie, évidemment sans succès, par l’Agrif. Elle arguera :
« Je maîtrise parfaitement ce que je dis et fustiger la souche est justement antiraciste : c’est une critique de ceux qui discriminent. » (26 janvier 2012)
Pour elle :
« Seuls les Blancs peuvent faire preuve de racisme, du fait de leur position dominante. » (Colloque Foucault et la colonialité du pouvoir, mai 2011)
Née en 1974 en Algérie, Houria Bouteldja a rejoint la métropole où elle a pu suivre, à moindres frais, ses études de langues étrangères appliquées arabe-anglais. En 2003, elle fut une des cofondatrices d’un collectif féministe et musulman, Les Blédardes, qui s’opposait aux Ni putes ni soumises de Fadela Amara. En 2006, elle dénonce dans Les Habits neuf du doriotisme la dérive nationale-populiste de certains courants de la gauche française. Avec, entre autres Pierre Bellanger, elle a signé La Révolution en 2010 ? Les vrais enjeux de 2007 (Descartes & Co). En réalité, elle est salariée à l’Institut du Monde arabe, financé par une fondation qui regroupe la République française et les pays des membres de la Ligue arabe, institut dirigé aujourd’hui par Jack Lang (et dont l’État français paie l’essentiel du budget).
Forte de son brevet télévisuel, elle est désormais persona grata, invitée à des colloques universitaires comme à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) de Paris, le 18 mai 2011. Au côté de Rokhaya Diallo, elle intervient sur le thème : « Comment le militantisme indigène et la participation des femmes troublent le champ politique. » Ce qui est évidemment essentiel en cette période de chômage.
Le 3 mai 2012, invitée à un colloque international sur l’islamophobie (avec Tarik Ramadan) au Center for Race & Gender de l’université de Berkeley en Californie, Houria Bouteldja va, une fois encore, cracher sur la France :
« Le racisme structurel de la société française provoque un conflit d’intérêt entre les classes populaires indigènes et les classes populaires blanches, les premières se battant pour l’égalité des droits et pour le respect, les autres bien sûr pour préserver leurs acquis ou gagner des droits mais aussi pour maintenir leurs privilèges vis-à-vis des premiers. Ce conflit d’intérêt “Blancs/non-Blancs” empêche les alliances entre les classes populaires et pousse les indigènes à s’organiser de manière autonome. Le PIR est un produit de ce conflit d’intérêt. La race est ainsi un principe organisateur de la société française autant que peuvent l’être le genre ou la classe. »
Sa carrière de rebellocrate aurait pu tourner court le 23 octobre 2012, quand elle s’en prit radicalement au sionisme sur LCP, expliquant que le sionisme et l’antisémitisme sont devenus « absolument indissociables » puisque « malheureusement, qui sont invités sur les plateaux de télé ? Les juifs sionistes, jamais les juifs antisionistes ! »
Suite à cette sortie, Houria Bouteldja sera agressée par la Ligue de défense juive (LDJ) le 31 octobre 2012. Elle publiera dans la foulée une vidéo intitulée « Houria Bouteldja le démon antisémite », dans laquelle elle pointait le rôle du décret Crémieux comme responsable de la situation des musulmans d’Algérie.
Elle rentrera rapidement dans le rang, comme le montre sa lettre ouverte à Éric Zemmour publiée le 12 juin 2014 sur le site Internet du PIR :
« Les Juifs (lorsque la bonne conscience blanche s’épuisera – et crois moi, ça s’use ces choses-là) seront les prochains sur la liste. Tu ne peux pas t’imaginer à quel point les artifices rhétoriques des faiseurs d’opinion ont travesti la réalité. Depuis que tout le monde est convaincu mordicus que les islamo-bamboulas sont aujourd’hui le fer de lance de la judéophobie, il en oublie le bon vieil antisémitisme gaulois, sournois et tapis dans l’ombre. Elles sont nombreuses les oreilles indigènes dans les bistrots, les bureaux, les usines, les cages d’escaliers à recevoir les confidences des “vrais” Français sur la “juiverie internationale”. Tu les entends comment ils susurrent à nos oreilles qu’ils croient complices ? Tu les entends tous ces murmures, ces bruissements ? Dans ta famille, ils sont certains à en avoir conscience. Demande à Askolovitch. Il a une idée sur la question. Si j’étais toi, tu vois, je me méfierais grave de tes amis philosémites. Ils sont comme toi, les islamophobes d’aujourd’hui, mais aussi les antisémites d’hier et probablement ceux de demain. Je te proposerai bien de méditer la mise en garde de Fanon sur ce sujet, mais je préfère l’économiser pour ceux qui le méritent. Et pourtant…Souviens toi de Raymond Barre et de ses « Français innocents » tués près de la synagogue de la rue Copernic.[…] Sache que si nous combattons le soralisme et l’antisémitisme qui le sous-tend c’est pour ne pas connaître ton destin de petite frappe et de renégat. La seule chose qui me chagrine c’est que si incha Allah notre lutte contre le racisme républicain devait aboutir, elle bénéficierait à des connards comme toi. »
- La Gaza Firm, elle, arborait des drapeaux français et chantait La Marseillaise au cours des manifestations pro-palestiniennes
(Photo : Paris, juillet 2014)
Cet article a été écrit en exclusivité pour Égalité & Réconciliation par la revue Faits & Documents d’Emmanuel Ratier.
Visiter le site de la revue : faitsetdocuments.com.