C’est l’album de Goscinny le plus vrai, le plus fort, le plus complexe, et aussi le moins drôle, on s’en aperçoit aujourd’hui. La France est déchirée de partout, on peut refaire la liste des lignes de rupture mais on dirait qu’il n’y a que ça, et tous les écarts s’agrandissent : riches/pauvres, travailleurs/chômeurs, homos/hétéros, sionistes/antisionistes, chrétiens/musulmans, hommes/femmes, libéraux/nationaux, et on en oublie. Quelle différence avec la France unie et puissante du traité de Münster en Westphalie, au milieu du XVIIe siècle ! Pour ceux qui s’intéressent à l’histoire, à notre histoire, c’est une paix négociée entre le roi de France, via ses émissaires, et les princes allemands, mais l’Allemagne n’existait pas encore. La guerre européenne (de religions) fratricide mettait le développement des pays en péril, et les hommes politiques de l’époque ont compris qu’ils devaient négocier.
371 ans plus tard, la France vit un moment difficile de sa vie. Elle se remet en question et toutes les questions qu’elle se pose, légitimes ou pas, nourrissent la désunion. Il faut cependant distinguer deux forces, celles qui viennent de l’extérieur, et auxquelles nous ne pouvons rien ou pas grand-chose (surtout avec notre diplomatie arrimée à des intérêts extérieurs), et celles qui viennent du dedans, les plus dangereuses car elles émanent de groupes ou d’organisations qui ont intérêt au dépeçage de notre pays, et à son affaiblissement. En d’autres termes, la mondialisation et la tendance à la multipolarisation du monde ont un impact sur notre pays, mais pas au point de le détruire. En revanche, toutes les forces qui lardent notre pays de coups de couteau séparatistes sont le danger majeur. Elles doivent être montrées, isolées et attaquées. On parle d’attaque idéologique, pas à coups de marteau dans la rue.
Indépendances
La menace d’éclatement est réelle, il y en a qui n’attendent que ça, et on ne parle pas que de Taubira et sa Guyane natale, qui appartient – héritage insolite de l’histoire – à la France. Et la Guyane, quoi qu’on en dise, profite aujourd’hui économiquement de la domination française, si l’on peut dire, métropolitaine si vous préférez.
Les désirs d’indépendance régionaux rencontrent peu d’adeptes, et même en Corse il n’est pas sûr qu’un référendum sérieux donne la main aux autonomistes et autres indépendantistes. Pourtant, les gouvernements les uns après les autres, lassés des pressions venant de l’île, lâchent du lest en ce sens.
Non, le danger le plus grand est sociétal, et on le voit tous les jours : les Français se déchirent sur les réseaux sociaux – au moins il servent à ça – autour de questions qui ont l’air anodines pour certains mais qui ne le sont pas. Même la brouille entre les carnassiers et les vegans, les climatosceptiques et les adeptes du réchauffisme sont dangereuses pour l’unité de la Nation. On ne peut évidemment pas les interdire mais pour limiter leur effet néfaste sur l’unité de la Nation, il faut en trouver les ressorts et donc, les organisateurs. Car ces débats ne tombent pas du ciel. Certes, tout n’est pas de l’ordre du complotisme séparatiste, par exemple le fait de mieux se nourrir, de manger moins de viande, surtout de la viande de mauvaise qualité, qui fait mal à tout le monde, animaux, hommes et terre compris. Il y a des débats passionnant qui méritent d’exister, mais il y a aussi des organisations idéologiques qui y voient un affaiblissement de la France.
Alors, au milieu de tous ces affrontements, qui a intérêt à diviser notre pays et à l’affaiblir ? Pour en faire quoi ?
« La décentralisation aura été un des actes essentiels du premier septennat. Je suis contre l’État glouton. Maintenant vont en profiter ceux qui étaient contre : la droite, bien sûr, mais aussi certains technocrates qui craignaient d’être délestés de leur pouvoir. L’État a été privé de ses attributs seigneuriaux. Nous avons fait une République plus moderne, bien adaptée à l’environnement contemporain et aux ententes européennes. Vous devez défendre ce label de la République d’aujourd’hui contre ceux qui s’y sont opposés. Il faut les dénoncer comme les ennemis de l’État et de la nation ! » (Discours de François Mitterrand devant ses ministres le 4 mars 1992 rapporté par Roland Dumas dans son ouvrage Politiquement incorrect)
Parfois, il n’y a pas de volonté maligne, c’est-à-dire humaine précise. Le fait que l’Union européenne dilue les souverainismes pour créer un bloc supranational, mais qui n’a justement pas de souverainisme, alors qu’on aurait pu s’attendre à un suprasouverainisme qui défende les pays qui lui ont délégué leurs défenses immunitaires, c’est déjà notre premier affaiblissement. Certes, l’UE a permis à la France de s’ouvrir à d’autres pays et de développer son économie au-delà de ses frontières, mais après 60 ans d’Europe (des 6, puis des 9, puis des 12, puis des 27), on sent que le développement se fait à notre détriment. Cela a à voir avec les différentiels sociaux internes à l’UE : les 500 000 travailleurs détachés qui bossent chez nous et qui viennent des pays de l’Est sont le résultat de cette union aberrante. Et cela n’a pas de limite : on pourra voir un jour 50 % de chômage en France avec 10 millions de travailleurs détachés chez nous, qu’ils soient originaires de l’UE ou pas, puisque tout finit par se mélanger et que l’État perd chaque jour de l’autorité.
Autorité
L’autorité, parlons-en, certains y voient le mal français numéro un : moins d’autorité à l’école, les racailles qui crachent sur les profs, quand ils ne les giflent pas (monde à l’envers par rapport aux années 50-60), moins d’autorité dans la justice, qui relâche les délinquants par dizaines de milliers (mais en même temps elle n’a pas les moyens matériels et le courage politique de poursuivre les grands délinquants, qui sont justement en lien avec... la politique), moins d’autorité sur la scène diplomatique (mais ça, ça a à voir avec notre alignement désastreux sur l’axe américano-sioniste), l’autorité aux frontières, qui sont devenues des gruyères à clandestins et assassins (les tueurs du Bataclan)...
Dans un lycée de #banlieue parisienne (Gagny 93), une #racaille gifle sa prof sous les hurlements de rire de ses camarades qui filment.
Était-ce vraiment une bonne idée de maintenir les aides sociales pour les parents de délinquants, @jmblanquer ?... pic.twitter.com/pdl4msOdu0— Napoléon (@tprincedelamour) June 13, 2019
Et cette disparition de l’autorité, elle vient d’où ? Majoritairement de la libéralisation de l’État, qui auparavant était tout puissant, économiquement, idéologiquement, juridiquement et matériellement. Un État volontairement affaibli par les forces libérales qui l’ont investi, qui ont placé des hommes à tous les échelons de la décision ou presque, et qui profitent aujourd’hui à plein de cette altération. Le Marché a gagné, il a quasiment battu l’État, qui incarnait la défense du bien public, les intérêts du peuple.
Justement, le libéralisme est-il le choix des Français ?
Demandez aux ouvriers qui y ont laissé leur job et leur niveau de vie, vous allez voir la réponse. Le libéralisme actuel est le résultat de l’affaiblissement de l’État qui ne pèse plus très lourd face à la Banque, qui dicte sa loi au Marché, et à travers lui, à tous les Français, qu’ils soient de gauche ou de droite. L’uberisation du monde du travail est en marche, demain nous serons tous des intermittents et en cela, les grévistes du monde du spectacle avaient raison avant tout le monde : nous dépendrons de la violence du Marché sans aucun garde-fou. On sait tous ça mais il est bon de le rappeler. Vous noterez que la révolte des Gilets jaunes n’a pas bougé le Marché ou la Banque d’un centimètre, c’est autrement qu’il faut s’attaquer à ces colosses.
Icônes
La chose qui a bougé, et même titubé, c’est la certitude des représentants de la Banque ou du Marché au sein du monde médiatico-politique. Eux ont senti le vent du boulet, qui annonce peut-être le vent des rafales. Mais nous n’y sommes pas encore. Les statues des propagandistes du Système ont été mises à terre, à l’image de celles de Lénine en ex-URSS ou de Saddam Hussein en Irak après 2003. Chez nous, démocratie oblige, il n’y a pas une grande mais plusieurs petites statues qui sont tombées, et à jamais. Les idoles médiatiques ont mordu la poussière, les éditorialistes ont été pourchassés dans les rues et les députés du pouvoir libéral ont été traqués jusque chez eux. Selon nous, ce n’est que le début : en histoire comme en sismologie, les choses se font par paliers...
Tout ça pour dire que le virage libéral effectué en 1983 a déterminé pas mal de fêlures dans la France profonde, même si ces fêlures ne doivent pas tout au libéralisme, on ne peut tout lui mettre sur le dos. Voilà pour le côté social, la lutte des classes quoi, et maintenant ouvrons la page sociétale, qui est le lieu privilégié des fractures françaises ouvertes et des débats qui l’incarnent. La différence entre les débats sociétaux d’hier et ceux d’aujourd’hui, c’est que ceux d’hier avaient tendance à se calmer ou à trouver solution. Aujourd’hui, on a plus l’impression de deux armées qui se constituent, qui se font face et qui n’attendent que l’étincelle de la provocation pour se rentrer dans le lard.
Les provocations se multiplient d’un côté et de l’autre de ces nouvelles barrières sociétales : les vegans attaquent des bouchers pour la défense des animaux de boucherie, les féministes traitent les hommes de meurtriers en inventant le féminicide, les homos multiplient les procès publics contre les hétéros, les juifs contre les musulmans...
L’hazizanie
Cette radicalisation des communautés nouvellement formées (il y a 10 ans on rigolait encore de tout ça) est le marqueur de notre époque, et l’honnêteté nous oblige à dire que leur fonctionnement est calqué sur le modèle communautaire du CRIF, le lobby juif français selon Élisabeth Lévy et selon les journalistes honnêtes. Tous les groupes de pression minoritaires aujourd’hui (et les féministes sont minoritaires, pas les femmes) arrachent des morceaux de pouvoir à la barbaque nationale en imitant le CRIF, qui a sonné l’halali.
Le CRIF n’a pas toujours eu ce pouvoir exorbitant : c’est sous Chirac, depuis 1995 et la soumission à la théorie de la France vichyssoise que les gouvernements ont plié, et plié de plus en plus. On rappelle que Mitterrand refusait d’aller aux dîners du CRIF, qui existaient déjà. Avec Sarkozy, tout a basculé. Le pleutre Hollande a suivi, et Macron, en se faisant un peu tirer la manche, y est allé, même s’il sait tout le mal que ça fait à la fonction et au pays. Il y a des forces auxquelles on ne peut résister... Incommensurables, disait Le Pen.
De là à dire que le CRIF à lui seul est à l’origine de tous les déchirements français, il ne faut pas exagérer. Si les Français avaient conscience de leur histoire, de l’importance historique de leur pays, cette troisième voie originale d’entre toutes, alors ils seraient plus enclins à faire front commun. Pour cela, il est bon de conserver un cœur patriote et un esprit nationaliste, ce qui ne veut pas dire, on s’en doute, xénophobe et encore moins raciste. Regardez, chez E&R, on est de bons patriotes, on est nationalistes mais aucunement xénophobes et encore moins racistes. Il ne faut pas croire la propagande sioniste, ou médiatique, ce qui revient au même.
En conclusion
Comme dans Astérix, il n’en faut pas beaucoup pour que la France redevienne un pays perclus de bastons où tout le monde se frite avec tout le monde pour des motifs parfois futiles, ce qui favorise les intrusions étrangères (revoir la Révolution, puis Bonaparte). Le danger vient précisément de ceux qui mettent de l’huile sur le feu de la division, qui couve toujours, ne soyons pas naïfs, dans un pays épris de liberté d’expression. Mais la liberté d’expression, derrière les oppositions de façade, est une force. Et paradoxalement, le fait que le pouvoir profond, via le pouvoir visible, étrangle la liberté d’expression en France – on sent chaque jour les anneaux du boa se resserrer autour de notre cou – va peut-être dans le sens d’un grand réveil national... ou d’une mort par arrêt cardiaque. Car la liberté d’expression, c’est ce qui fait la force de notre pays, c’est l’origine de notre originalité, et c’est ce qui fait le prestige de la France dans le monde, qu’on le veuille ou pas. Si on touche à cette liberté d’expression, et c’est le cas actuellement, la puissance française peut se réveiller, toutes les forces antagonistes se réunissant pour faire exploser le carcan que le pouvoir nous impose.
L’alternative : la liberté d’expression ou la mort. Nous ou eux.