Porté à la boutonnière, son attachement indéfectible à la Palestine aurait pu devenir un hymne à la résistance s’égrenant sur sa guitare au rythme de mots qui résonnent, Roger Waters, le bassiste de légende et membre fondateur des Pink Floyd, est de cette trempe d’artistes qui ne craignent pas de troquer leur habit de lumière contre celui d’artistes maudits...
Sur la scène publique de l’appel au Boycott d’Israël et de la condamnation de son impérialisme inassouvi, illégal mais impuni, les stars, auréolées de gloire, ne se bousculent pas au portillon pour décrocher le premier rôle, préférant, en l’occurrence, l’ombre à la lumière. Ce n’est pas le cas de Roger Waters, qui a choisi de s’exposer sous ces feux de la rampe-là, depuis son séjour électrochoc en Cisjordanie en 2006, au cours duquel sa prise de conscience a trouvé un exutoire : peindre, sur le mur de la honte, l’inscription « Nous n’avons pas besoin d’un contrôle de la pensée », extraite du célébrissime titre des Pink Floyd « Another brick in the Wall (part 2) ».
Dès lors, Roger Waters n’a eu de cesse de briser la chape de plomb du silence, rejoignant les rangs du mouvement BDS (Boycott, Désinvestissements, Sanctions), dont il est l’un des plus fervents avocats. Membre du Tribunal Russell sur la Palestine, qui a récemment recommandé aux Nations unies de réinstaurer le Comité spécial contre l’apartheid afin de dénoncer les pratiques d’Israël envers les Palestiniens, Waters, l’activiste pro-palestinien, a accusé le gouvernement de Netanyahu d’être un régime d’apartheid sur le site The Electronic Intifada, insistant sur les similitudes saisissantes avec les pires moments de l’apartheid en Afrique du Sud.
Si les ambassadeurs de la politique conduite par Israël sont légion, les partisans de son boycott sont aux abonnés absents dans le showbusiness, une désaffection à laquelle compte bien remédier Roger Waters en sensibilisant, dans une lettre ouverte, ses pairs de l’industrie de la musique à la cause palestinienne.
C’est également par écrit que l’ex-auteur-compositeur des Pink Floyd a réussi à ouvrir les yeux au géant de la musique Stevie Wonder, en l’appelant à ne pas se produire lors d’une soirée de bienfaisance, le 6 décembre 2012, organisée par "les amis des Forces de Défense d’Israël". "Je lui ai dit que s’il donnait ce concert, ce serait comme jouer lors du bal de la police à Johannesburg, le lendemain du massacre de Sharpeville en 1960. Ce ne serait pas une bonne chose à faire, d’autant plus qu’il est investi d’une noble mission par l’ONU : celle de prêcher la paix. Je ne suis pas le seul à avoir tenté de le dissuader, Desmond Tutu l’a interpellé dans ce sens, de son côté", a déclaré Roger Waters, tout en déplorant vivement que le revirement de Stevie Wonder, qui a choisi d’annuler son concert, ait été passé sous silence dans un black-out médiatique toujours aussi assourdissant.
Il n’y a guère que l’omerta qui se fasse écho par-delà les océans, dès que l’on ose égratigner le vernis de la "seule démocratie du Proche-Orient".