La Russie. L’Ukraine. Poutine. On ne pourra jamais comprendre ces réalités si l’on se fie à Radio-Canada et Québécor. Mieux vaut ressortir des cartons quelques livres pas trop datés pour saisir ce qui se passe, avec toutes les subtilités. Dans La Bataille de Russie, publié en 2016, Israël Shamir, nous offre ici une série d’articles abordant toutes les questions entourant l’Ukraine, les luttes de pouvoir et d’influence entre Occident et Russie.
Écrits entre 2012 et 2014, ils sont tout simplement prophétiques et s’il y en a un qui n’a pas dû être surpris par l’invasion russe et par l’étrange stratégie militaire déployée, c’est bien Shamir.
Il décortique ainsi les évènements de Maidan et la politique d’apaisement du président russe qui refusa toute ingérence, sauf en Crimée après le référendum de rattachement.
Tout lui faisait conclure en 2014 qu’« une guerre entre les États-Unis et ses relais contre la Russie semble très probable. La Syrie et l’Ukraine sont deux champs de bataille en perspective où l’affrontement des volontés précède la bataille d’acier. La guerre peut être conventionnelle ou nucléaire, régionale ou à l’échelle mondiale. L’enjeu, c’est la domination globale des États-Unis sur tous les plans ». Difficile d’être plus prophétique.
Notons aussi que Shamir n’est pas le genre à diaboliser à tous vents. Il se penche avec honnêteté, ce qui est rare sur « le cas Poutine » et les rapports de force avec les oppositions, car non, l’opposition libérale pro-occidentale encensée par nos médias est loin d’être majoritaire. Les libéraux sont bien loin derrière les nationalistes et les toujours très populaires communistes, mais au pays de l’Ours, il n’y a pas que les nombres qui pèsent dans la balance. Grâce aux gros sous et aux enveloppes brunes, les oligarques exercent une influence considérable quoique celle-ci soit souvent exagérée par les Occidentaux.
Alors pourquoi avec une telle opposition, Poutine continue-t-il de rassembler le peuple russe ? Car c’est l’homme du compromis, celui qui se place à mi-chemin avec les nationalistes Grande Russie et ceux qui veulent une ouverture. Concernant l’Ukraine, il fut à mi-chemin entre les faucons qui le traitaient d’inaction et ceux qui auraient aimé que la Russie se couche devant l’Oncle Sam. Poutine est un stratège.
Et pour ce qui est du Poutine va-t-en guerre, il nous explique huit ans avant les faits que « depuis le début, le département d’État a eu beau prétendre le contraire, Poutine ne voulait pas la guerre en Ukraine, et encore moins contre l’Ukraine. Il aurait préféré que l’Ukraine reste neutre et amicale », une option impossible de par l’implication américaine dans le dossier depuis Maidan.
Israël Shamir, israélien converti au christianisme, fait partie de ceux qui recherchent la vérité à tout prix et son recueil le démontre parfaitement. Ni poutinolâtre ni américanophile, il offre ce qu’on a réellement besoin : une attitude lucide et honnête. Et, contrairement aux spécialistes patentés de nos médias ; il écrit de son bureau en Russie. Ancien proche d’Édouard Limonov et du national-bolchévisme, il a une certaine fascination pour Staline, ce qui prouve du coup que Shamir n’est pas nécessairement de notre camp, ce qui n’enlève rien à la prescience de ses analyses.
La Bataille de Russie, un ouvrage disponible chez Kontre Kulture :
À revoir : Alain Soral présente La Bataille de Russie (2015)