Privée par la dominance de toute interprétation sociopolitique lucide, il ne reste plus à la chaîne que la pornographie comme preuve de subversion culturelle.
La chaîne Arte, qui a frôlé la mort économique il y a trois ans, tout en étant chroniquement déficitaire – raison d’État oblige –, a injecté depuis 2013 du divertissement et du sexe dans sa programmation. Et ça va foutrement mieux : sa part d’audience est passée de 1,5 à 2% ! Si chaque foyer français participe financièrement via la redevance, seul un foyer sur cinquante profite de ce mieux-disant culturel, l’autre expression pour propagande télévisuelle.
Une Histoire d’amour, un film d’Hélène Fillières
Une œuvre diffusée sur Arte le 16 septembre 2015. Pour ceux qui l’ignorent, Hélène Fillières est la star de la série de Canal+ Mafiosa, une jeune femme corse qui reprend le clan familial d’une main de fer. Dans la vraie vie, cet ex-mannequin joue et réalise, la plupart du temps dans des films de femmes, pour des femmes. Ainsi, elle a incarné Claire dans Enculées, un court-métrage de Laetitia Masson. Enculées faisait partie d’une série de 10 épisodes érotiques diffusés par Canal+ en 2008 et confiés à des femmes : Arielle Dombasle, Lola Doillon, Héléna Noguerra, Mélanie Laurent, Caroline Loeb, et Laetitia Masson.
Une Histoire d’amour, titre trompeur puisqu’il s’agit de scènes sexuelles explicites entrecoupées de vides censés exprimer de la profondeur psychologique (de nombreux ignorant(e)s pensent que le silence et le vide sont psychologiques), raconte l’histoire d’une femme qui s’ennuie (elle vit dans un appartement high-tech avec son papa ou son tonton Richard Bohringer et un chat noir qui mange dans l’assiette). Nous aussi. Heureusement, elle rencontre un masochiste riche à crever. L’héroïne en vient à fouetter le monsieur, incarné par Benoît Poelvoorde, et à gagner plein de sous. Un travail facile, qui ne demande pas un haut niveau d’études. Mais la fouetteuse se pose des questions, existentielles. On ne sait pas trop lesquelles, car elle ne parle presque pas (économie de scénariste) ; cependant, les courtes grimaces ou les plans longs et fixes sur son visage montrent une certaine anxiété. Tout ceci n’est pas très normal, semble-t-on y lire. Ce qui ne l’empêche pas de poursuivre cette relation complexe, où la femme domine l’homme. À la fin, elle le tue, pan, et ça rappelle la mort du banquier Stern.
On se permet de vous raconter la fin parce qu’on suppose que pas grand monde va se précipiter sur le DVD. Autant spoiler le truc. Ah, autre détail qui compte, le copain ou tonton ou papa de Poelvoorde : un gros beauf qui ne pense qu’à bouffer, boire, traiter les femmes de « putes », et dont le niveau culturel semble nul.
La vision des hommes de la réalisatrice se résume donc en trois typologies : le paumé maso mais friqué, le vieux type à l’ouest qui ne comprend rien aux femmes, et le blaireau immonde. On a en conséquence un peu de mal à s’identifier. Bilan de l’affaire : 42 000 entrées en France pour un budget de 5,5 millions d’euros, soit une rentabilité de 5 %. On est loin du blockbuster. Même Télérama a trouvé ça nul – « ce fait divers hors du commun retombe dans ce que le cinéma d’auteur français a de plus banal et qu’on croyait aujourd’hui dépassé : un petit univers replié sur lui-même » –, alors imaginez. Le seul avantage de cette filouterie est sociologique : on peut estimer la communauté SM française à environ 40 000 personnes, curieux compris.
Le CNC a décrété que Une Histoire d’amour était une « œuvre pour tous publics », avec toutefois l’avertissement suivant : « Plusieurs scènes sado-masochistes sont susceptibles de heurter un public jeune. » Quelle perspicacité !
Douce amère, court-métrage de 16 minutes
Une seconde œuvre, diffusée sur Arte le 13 décembre 2014. Béa va avoir 14 ans (rappel : en France, la majorité sexuelle est fixée à 15 ans, et en dessous de cet âge, le consentement n’est pas reconnu par les tribunaux). Elle est entre l’enfance et la femme. Sa sœur Fanny est une délurée : elle se maquille, met des habits coquins, et évolue dans des fêtes un peu troubles. Profitant de son absence, Béa essaye une tenue interdite, mais sa sœur la surprend quand elle rentre. Béa veut absolument sortir avec elle, l’accompagner où elle va, car c’est tabou. Un soir, Fanny craque et emmène Béa dans un lieu de perdition. Il y a de la musique, des garçons, beaucoup d’alcool, et même de la drogue, sous forme de cigarettes mal roulées et d’une mystérieuse poudre blanche, étalée en petits rails sur une table. Béa, fascinée par cet étalage de débauche, pénètre alors dans l’Enfer des Jeunes Filles. Elle goûte aux produits stupéfiants interdits par la loi, et soudain, en allant aux toilettes (à l’étage), surprend une scène que la décence nous interdit de décrire. Elle semble choquée, et redescend, mais après avoir maté un peu, quand même.
Puis ça se passe mal avec un garçon qui pensait que Béa voulait faire la chose, et finalement Béa et Fanny rentrent, en silence. Un silence lourd de sens. Le film semble être en chti ou dans une langue un peu difficile à comprendre.
Ce court-métrage canadien, que les incultes du 7ème Art prendront pour du voyeurisme pédophile de bas étage (ah les gros incultes de droite !), est réalisé par Adam Kosh. Précisons que Douce amère a été tourné grâce à la surface de financement participatif touscoprod. Et écoutons Éliane Gagnon, à l’origine du projet avec Adam Kosh :
« Enfin, sur une note plus personnelle, j’ai envie de vous dire que cette histoire me touche et que je ressens un profond désir de la partager au monde entier. Douce Amère, c’est une tranche de vie, importante et universelle. Fanny et Béatrice sont mes porte-paroles et je souhaite qu’elles vous touchent autant qu’elles ont pu me toucher à l’écriture de ce scénario que j’ai entamée il y a deux ans. Avec plaisir et conviction, je peux vous dire que je me sens prête à le faire et que le réalisateur, Adam Kosh et moi, ferons de ces pages, un film qui saura autant vous émouvoir que vous ébranler. »
Deux ans pour écrire ça… Si nous éviterons d’emblée les vannes faciles sur son dernier mot, nous ne pourrons pas faire l’économie d’une question, lancinante : comment la chaîne Arte peut-elle diffuser des films à caractère pornographique sur son écran de service public ? Personne ne contrôle ça ? Entre une direction qui valide ces fausses œuvres d’art, un CNC qui accorde une autorisation explicite, et un CSA (voir la photo de son président Olivier Schrameck ci-dessous) étrangement absent, on est en droit de se demander s’il n’y a pas là une vraie politique conjointe d’hypersexualisation du jeune public. Dire que la moindre goutte de sang est absolument interdite dans les dessins animés qui passent le matin ou le mercredi sur les grandes chaînes… Mais à côté de ça les gamins peuvent voir du SM hard et des scènes de triolisme à la pelle. D’aucuns (les intellectuels de gauche) diront que c’est de l’amour, et que c’est toujours mieux que la guerre.
Le CSA, qui perd son temps et notre argent à décompter les temps de parole de partis politique identiques à 99 % sur le fond, n’est même pas foutu de retoquer ces tue-l’amour et souille-l’esprit. Un enfant de 10 ans peut tomber dessus. Alors, évidemment, il peut tout trouver sur le Net. Mais des filtres existent, et le Net n’est pas un service public. Doit-on payer la redevance pour ça ? Le budget du groupe Arte (incluant la branche allemande), en augmentation constante, se chiffre à 450 millions d’euros, dont 267 pour Arte France en 2014, et 127 millions pour ses programmes. Une chaîne qui communique sur son « autonomie financière », alors qu’elle dépend quasi-totalement de l’État, à l’exception de quelques parrainages…
N’exagérons pas non plus le pouvoir nuisible de la télévision, qui n’est pas seule à tenter de salir ou détruire les âmes. Il y a aussi la pub de Maurice Lévy, la presse de Pigasse et Bergé, l’école de Najat Belkacem, et les parents dénués d’autorité. Mais c’est pas une raison pour rester l’arme au pied.
Prenons de la hauteur
Avant, le sexe, sur Arte, c’était une soirée théma(tique) annuelle, attendue comme la pluie sur le Serengeti. Ça procurait une sacrée bouffée d’air frais au milieu de 350 soirées Shoah, Hitler et autres dérivés. La direction autorisait le téléspectateur exigeant à profiter avec un alibi culturel en béton d’une spéciale « fesses », ou « érotisme féminin » (ça passe mieux), ou « pénis », et le tour était joué.
Désormais, on passe directement des films de cul. Réalisés généralement par des aspirants qui n’ont pas les moyens intellectuels de faire un vrai film. Comme Arte est la chaîne qui prône le féminisme, l’antiracisme, l’homosexualisme et le sionisme, il est normal de trouver un maximum de films de femmes, où l’homme (blanc, de préférence) a le mauvais rôle. Un classique, nous direz-vous, oui mais sur Arte, ça prend des proportions jusque-là inconnues !
Les petits curieux sauront que le nouveau directeur des programmes maison, Alain Le Diberder, est l’ancien directeur des nouveaux programmes sur Canal+, et avant cela, fut un conseiller technique de Jack Lang, en 1989. Véronique Cayla, la présidente du directoire d’Arte, celle qui a choisi avec véhémence Le Diberder, est aussi l’ex-présidente du CNC, qui finance un tas de bouses bien-pensantes. L’épouse du directeur d’Euronews Philippe Cayla a été nommée en 2011 par la paire Sarkozy/BHL pour succéder à Jérôme Clément. Quand Clément, membre du Siècle, a quitté Arte, il a pris la présidence de la maison de vente Piasa. Voici quelques noms tirés au hasard de la liste des 14 investisseurs privés de cet organisme : Claude Berda, Laurent Fabius, Marc Ladreit de Lacharrière, Serge Weinberg (ancien dircab de Fabius, membre de la Trilatérale, président de Sanofi, et membre de la commission Attali), Louis Schweitzer. Bon, on arrête, parce qu’on est en train de sortir dangereusement du sujet. Toujours cette tentation malsaine de voir du réseau partout. L’oligarchie, c’est n’importe quoi ! Rappel, pour ceux qui regardent trop le sexe à la télé :
« L’oligarchie est cette forme de gouvernement où le pouvoir est réservé à un petit groupe de personnes qui forment une classe dominante. » (Wikipédia)
La définition du Larousse est pire :
« Système politique dans lequel le pouvoir appartient à un petit nombre d’individus constituant soit l’élite intellectuelle (aristocratie), soit la minorité possédante (ploutocratie), ces deux aspects étant fréquemment confondus ; ce groupe. »
Pour clore cette étude quelque peu focalisée sur un point de programme, l’honnêteté nous oblige à dire que les documentaires – lorsqu’ils échappent à tout commentaire politiquement correct – peuvent être d’excellente qualité. Pour ce qui concerne les documentaires d’essence politique ou géopolitique, si ces derniers n’étaient pas viciés par un positionnement socialo-sioniste prononcé, et ouvertement affiché (pour l’influence occulte, vous repasserez), alors le public se précipiterait littéralement dessus. Quand la chaîne bloque tout projet offrant une autre vision du monde, comment en vouloir aux sociétés de production extérieures de ficeler des projets aussi uniformes ? Il n’y a en effet même pas une once de subversion, ni directe, ni indirecte – c’est-à-dire glissée avec talent dans un autre type de programme – sur la chaîne en question. Aucune prise de risque, malgré la modestie de l’audience. La décision, qui est une décision d’État, malgré une autonomie de gestion qui ne présente en vérité aucun danger (voyez le réseau très oligarchique qui tient la chaîne dite culturelle dans ses filets), est à l’origine de l’échec absolu, sur tous les plans, commercial et pédagogique, d’une télévision de propagande : ça nous coûte une blinde (267 millions d’euros), ça ne parle à personne ou presque (2 % du public télé, ce qui veut dire moins de 1 % des Français), et ça nous prend pour des enfants, pour rester polis.
« ARTE propose des programmes pour tous les goûts et tous les publics : amateurs de cinéma d’art et d’essai ou de patrimoine, de films muets, de thrillers, de sagas historiques, de séries audacieuses, de documentaires culturels ou de découverte. Ancrée dans le présent, la Chaîne porte un regard européen sur l’actualité du monde, donne la priorité à l’investigation et pose des repères pour comprendre et aller plus loin. »
Aller plus loin dans quoi ? La soumission à l’idéologie dominante ? C’est encore possible ? La retape d’une Europe qui a failli ? Le budget ? Les sermons sur la shoah ?
Tout cela est bien dommage : imaginez, avec ne serait-ce que le centième de ce budget, ce qu’une association d’intérêt vraiment public comme Égalité & Réconciliation pourrait produire !
Eh bien, imaginons : une webtélé de flux, des reportages non censurés, des documentaires éclairants, des débats agités entre personnalités non-conformes (et pas les clashes de pacotille entre people du même sérail), des fictions originales, de la comédie (eh oui, pourquoi pas ?), une pièce de théâtre avec des gros morceaux de vérité, un paquet de nouveaux livres, et des articles traduits en plusieurs langues.
La culture, la connaissance, on croyait naïvement que c’était pour tout le monde.