En complément du plan schématique déjà diffusé sur notre site, veuillez trouver ci-contre le verbatim de la présentation de l’atelier de l’Université 2008 dédié à la ligne économique d’E&R, tenu le 1er novembre 2008 à Villepreux.
Egalité et Réconciliation a enclenché ces derniers mois une réflexion collective qui a permis d’élaborer une première ligne générale, disponible sur le support qui vous a été remis. La première partie de cet atelier sera consacrée à la présentation de cette ligne générale, et la deuxième partie au libre débat. Jean-Marie S. animera le débat, Alain H. est secrétaire de séance. Dès le mois de mai, nous sommes partis du principe qu’il faudrait agir assez vite, car notre analyse de la situation générale, c’est qu’il peut y avoir en France des ruptures de contexte très rapides. A partir de là, nous avons choisi de construire une générale pour avoir un discours articulé, et pour pouvoir ensuite embrayer sur l’action, et cela même si nous savons très bien qu’à ce stade, l’organisation est encore en voie de constitution, et que toutes les régions ne sont pas encore en situation de participer efficacement aux travaux. Nous accompagnerons les régions au fur et à mesure de leur montée en charge.
La ligne actuelle a été construite essentiellement par E&R Paris et E&R Normandie, les deux sections qui fonctionnent déjà de manière efficace – E&R Languedoc vient de se joindre aux travaux. En aucun cas cette ligne n’est figée. Le choix fait sur le mode de fonctionnement par rapport à l’économie, c’est la reformulation permanente de la synthèse. Cela veut dire que tout est constamment révisable, mais qu’il n’y aura pas de tendances à l’intérieur d’E&R. Nous reconstruirons constamment un discours fédérateur, qui traduira le centre de gravité de l’organisation à un instant T. Cette construction sera évidemment progressive, car E&R réunit sur le plan économique des sensibilités très diverses : de l’aile gauche du Parti des Travailleurs à l’aile droite du Front National ! Concrètement, nous sommes partis du programme du Front National 2007, et nous avons demandé aux militants de le critiquer. Cela nous a permis de construire une ligne, mais aussi de commencer à faire émerger des compétences, et cette démarche sera prolongée. Un point d’organisation à ce propos : notre objectif est d’organiser progressivement une filière de militants spécialisés dans les questions économiques. J’attire en effet votre attention sur le fait suivant : à la différence d’autres domaines, l’économie demande de la technicité. C’est pourquoi, en cible, nous voulons au moins un correspondant économie dans chaque section régionale, quelqu’un capable, par exemple, de répondre aux citoyens lors d’une opération de tractage. S’il y a parmi vous des camarades qui disposent d’une technicité en la matière, même modeste, surtout qu’ils n’hésitent pas à se manifester. Toutes les bonnes volontés sont les bienvenues.
Passons maintenant à la ligne économique proprement dite.
L’objectif stratégique que nous nous donnons, c’est de préparer l’opinion à la nécessaire reconstruction de l’économie nationale. Préparer l’opinion : cela veut dire que nous ne sommes pas dans l’idée de participer directement à des revendications catégorielles précises, sauf si cela sert notre objectif stratégique. Nous somme à E&R là pour que l’opinion de nos concitoyens évolue dans le sens favorable à nos idées. A noter qu’on peut distinguer trois cibles : les militants du FN ou d’autres formations politiques proches de nos idées, cible prioritaire, à qui nous devrons apporter le discours fédérateur qui fait défaut ; les électeurs non militants proches de nos idées, que nous devons ancrer dans notre camp en existant par des actions symboliques ; et enfin le reste de la population, que nous avons peu de chances de toucher dans l’immédiat, sauf en martelant quelques messages médiatiques forts.
Ces messages, vous les avez sous les yeux. Les mots essentiels, c’est : « nous pouvons ». Notre analyse de la situation présente, c’est qu’à court terme, une bonne partie de la population, qui dormait depuis longtemps, va être réveillée par la crise économique. Le modèle social français peut imploser. Si nous arrivons avec un discours qui dit : « nous pouvons » sauver ce modèle, alors nous aurons une chance d’être entendus. En ce qui concerne les grands axes de la ligne éco, à présent, je vous propose de nous limiter dans le format de cet atelier aux passages mis en gras.
Nous considérons que l’économie doit être mise au service des hommes, et non l’inverse : je ne m’y attarde pas, c’est un constat que nous avons tous fait, et c’est la base naturelle de notre réflexion.
A la mondialisation financière fondée sur le pillage destructeur, nous voulons donc substituer une alliance d’Etats-nations souverains, réunis par de grands projets de développement mutuel, prélude à la construction d’une Europe économique unissant vraiment les peuples européens : ce passage implique qu’E&R n’est pas une association anti-Europe. Nous avons un problème avec l’euromondialisme bruxellois, pas avec l’Europe des peuples. Il n’y a pour nous pas d’opposition entre l’Europe et la nation : pour que l’Europe soit, il faut qu’elle soit faite par ses nations, pour que les nations soient souveraines, il faut qu’elles coopèrent. En conséquence, nous appelons à la réhabilitation du rôle des Etats européens non pas contre le marché, mais au contraire pour sa correcte régulation : en d’autres termes, E&R n’est pas une association socialiste révolutionnaire, même si elle héberge en son sein une sensibilité socialiste révolutionnaire. Le « centre de gravité » de l’organisation se situe du côté de la tendance keynésienne, majoritaire, à côté de laquelle gravitent deux tendances secondaires : une gauche national-révolutionnaire, et une petite sensibilité libertarienne, pro-PME.
Nous entendons conduire une réflexion pragmatique, sans exclure la confiscation pure et simple du capital spéculatif prédateur, mais en conservant toujours à l’esprit la préservation des intérêts légitimes des véritables entrepreneurs : si nous ne sommes pas des socialistes révolutionnaires, nous sommes en revanche très clairement dans une logique d’opposition frontale avec ce que l’on pourrait appeler la mauvaise finance. Donc : nous ne sommes pas a priori favorables à la collectivisation des moyens de production, mais nous estimons qu’il sera nécessaire de reprendre le contrôle du secteur bancaire, quitte à le mettre en redressement judiciaire global, quitte, même, si on ne peut pas faire autrement, à le nationaliser purement et simplement.
La reconstruction des solidarités enracinées passera nécessairement par le démantèlement des structures fondatrices de l’aliénation : cette phrase un peu pompeuse permet de définir l’esprit de la rénovation socioéconomique que nous appelons de nos vœux. Nous voulons donner les moyens aux gens de leur souveraineté, à tous les niveaux. C’est ainsi que nous voulons donner les moyens aux régions de leur souveraineté, pour les matières qui sont de leur ressort. E&R n’est pas une association anti-régionale : exactement comme pour nous, il n’y a pas d’opposition entre une nation forte et une Europe des nations, de même il n’y a pas d’opposition entre des régions fortes dans leur sphère et une nation forte dans sa sphère. Des acteurs locaux qui se prennent en main et qui possèdent un haut niveau d’autonomie ne sont pas incompatibles avec un État qui détient la monnaie et les grands leviers de l’action économique : au contraire, c’est parce que la nation peut résister au mondialisme prédateur que les régions peuvent être dynamiques.
Nous voulons défendre une économie de proximité. Nous voulons remettre en cause la dictature des logiques purement financières. C’est pourquoi, très clairement, notre démarche inclut un volet protectionniste (remarque du secrétaire de séance : il serait préférable de parler de « juste échange », afin de contourner certains faux débats). Quant à la manière dont ce protectionnisme doit être déployé, droits de douane modulables et/ou quotas d’importation, c’est un point qui doit être étudié.
La mise en application d’un programme conforme aux quatre points précédents passe par le retour à une monnaie saine, garantie par un Etat impartial et dynamique privilégiant le financement de l’économie productive : cet Etat-nation souverain dans sa sphère, nous voulons le reconstruire d’abord en reprenant les leviers de la création monétaire. Ceci implique : les dettes publiques artificielles, accumulation indue d’intérêts composés ne correspondant à aucune opération de production réelle, devront faire l’objet d’un processus d’annulation concertée à l’échelle européenne. Qu’est-ce que ça veut dire concrètement ? Cela veut dire : guerre à la finance mondialisée. Donc, c’est très clair : sur ce point-là, c’est une ligne économique révolutionnaire. Sur ce point-là seulement : il n’y a pas, dans la ligne économique d’E&R, de révolution contre les entrepreneurs. Il n’y a même pas de révolution contre une finance saine. Mais il y a une révolution contre la dictature des banques. Sur ce point-là, et uniquement sur ce point-là, nous sommes révolutionnaires. C’est très simple : il y a un pouvoir mondialiste financier monétariste, et nous voulons le renverser.
La structure démographique de l’Europe étant déséquilibrée, il faudra repenser la structure de notre modèle social : nous voulons renverser le pouvoir monétariste pour sauver le modèle social français, mais pour autant, nous n’entendons pas pérenniser les aberrations de ce modèle. Quand on arrive dans un système où les jeunes pauvres crèvent pour que les vieux riches prospèrent, il faut repenser le modèle. Nous ne nous interdisons pas de réfléchir sur ce point, afin que la protection sociale serve à ceux qui ont vraiment besoin d’être protégés.
La reconquête de la souveraineté ne sera durable que si le peuple, à travers l’Etat, utilise cette souveraineté pour surmonter effectivement la crise du modèle économique productiviste : enfin, nous avons adjoint à la ligne économique une passerelle vers des domaines connexes, en particulier la recherche (il faut réformer le CNRS), les questions énergétiques (très liées à la recherche), et l’Education Nationale (qui aura un rôle important à jouer, le moment venu, pour former des producteurs autonomes, sans lesquels il n’y a pas de citoyens responsables). Je ne m’attarderai pas sur ces aspects, ils seront développés le moment venu dans d’autres ateliers.
Voilà la ligne économique qui, à ce stade, traduit le « centre de gravité d’E&R ». Elle a été élaborée dans une logique d’écoute et de dialogue, au sein de notre organisation. Nous devons poursuivre ce travail, à chacun d’écouter ce qui vient de tendances a priori très éloignée de la sienne !