Zineb El Rhazoui (photo ci-contre), journaliste membre de la rédaction de Charlie Hebdo, a reçu, mercredi 13 mai, un courrier de la direction la convoquant à un entretien préalable à un licenciement pour faute grave, a appris Le Monde.
Elle est d’ici là mise à pied. Contactée, la direction refuse de commenter « une procédure en cours et interne », mais insiste sur le fait qu’il ne s’agit que d’une convocation à un entretien, pas d’un licenciement effectif. La décision intervient dans un contexte de tensions entre la direction et la rédaction.
Zineb El Rhazoui dit ne pas comprendre le motif du courrier ni la faute grave évoquée et s’étonne de la méthode « bureaucratique » employée, « sans discussion préalable ».
« Je suis choquée et scandalisée qu’une direction qui a bénéficié d’autant de soutien après les attentats de janvier fasse preuve d’aussi peu de soutien envers un de ses salariés, qui est sous pression comme tous dans l’équipe et fait l’objet de menaces. »
Menaces de mort
Sociologue des religions, franco-marocaine et militante contre l’islamisme et l’intégrisme, Zineb El Rhazoui, a notamment fait l’objet de menaces de mort de la part d’islamistes, mi février. Visant également son mari, ces menaces ont été dénoncées par des sociétés de journalistes. Par ailleurs scénariste de La Vie de Mahomet, dessiné par Charb, Mme El Rhazoui vit depuis sous protection renforcée, à Paris.
« Mon mari a perdu son emploi car des djihadistes ont dévoilé son lieu de travail, il a dû quitter le Maroc, je suis menacée, je vis dans des chambres d’amis ou à l’hôtel et la direction envisage de me licencier... Bravo Charlie », ironise Zineb El Rhazoui.
Conditions chaotiques
Sans préjuger du motif du courrier reçu, Mme El Rhazoui explique qu’elle n’a pas pu travailler normalement depuis les attentats qui ont décimé la rédaction en janvier. « Je ne suis pas la seule. On ne peut pas reprocher aux gens d’aller mal et de ne pas se comporter en bons ouvriers, on vit dans des conditions chaotiques. C’est impossible de faire des reportages sous protection policière... », explique-t-elle.
Avant janvier, Zineb El Rhazoui réalisait pour Charlie Hebdo des reportages en France et à l’étranger, notamment en Afrique, souvent sur les religions. Elle a été recrutée en 2011 pendant les « printemps arabes ». Auparavant, elle a été militante au Maroc, opposée au régime ou au ramadan, via notamment le mouvement alternatif pour les libertés individuelles, qu’elle a confondé. Elle a aussi été très active au sein de l’association Ni putes ni soumises.
Depuis janvier, Mme El Rhazoui est souvent apparue dans les médias, notamment au « Grand Journal », afin de défendre la laïcité contre l’islamisme ou le droit au blasphème, des thèmes liés à Charlie Hebdo et aux attentats, comme lors de conférences, à Chicago, Montréal ou Paris.