J’ai visité Bethléem aujourd’hui. Je suis définitivement sous le charme ! Tellement d’histoire, tellement de choses à voir dans un si petit recoin de terre ! C’est hallucinant !
J’ai prié à la Basilique de la Nativité où le Christ est né.
Edifice modeste. Au sous-sol, on découvre une grotte et une étoile à quatorze branches. C’est là que tout a commencé… C’est dans cette toute petite bourgade palestinienne où il y a deux mille ans, l’une des plus belles histoires de la civilisation a débuté.
Dommage toutefois, que la proportion soit de 99% de touristes/photographes pour 1% de réel pèlerin…
Plus émouvant, il n’est pas rare de voir des pèlerins musulmans venu d’Inde, se déchausser à l’entrer pour se recueillir auprès d’Issa et demander grâce au Tout-Puissant. Attestant encore une fois que musulmans et chrétiens ont un destin commun.
Pour faire un peu d’histoire ; quand les musulmans ont conquis la ville, il y a treize siècles, le calife Omar s’est agenouillé devant et a prié. Le patriarche surpris, lui propose alors de prier à l’intérieur. Le calife décline, en expliquant que s’il prie dedans les musulmans voudront ensuite construire une mosquée pour commémorer l’endroit où il a prié et détruiront ainsi l’église. Et en effet, les musulmans ont bien construit une mosquée (qu’on peut encore visiter) en face de l’église là où Omar c’était agenouillé.
Tout aussi surprenant en l’an 614 quand les Perses s’emparèrent de la ville, et qu’ils l’a mirent à feu et à sang ; la Basilique de la Nativité reste miraculeusement épargné, car les soldats sont émus par la représentation des Rois mages qui portent des vêtements perses…
Autre édifice majeur de la ville, le tombeau de Rachel, femme de Jacob décédé en donnant naissance à Benjamin, qui est vénéré par les juifs, les chrétiens et les musulmans. Pardon ! En parlant d’autre édifice majeur, je devrais plutôt parler du mur de séparation. Bien que le tombeau fait partie intégrante de la Cisjordanie, il se trouve de l’autre côté du mur. Les palestiniens n’y ont donc pas accès. Muni du sésame rouge à croix blanche, je n’ai aucun problème à franchir ce qu’on appelle ici la clôture de sécurité ; qui est en réalité un mur en béton armé de plus de 700 km de long avec miradors, caméras et mitrailleuses ultras modernes. Plus cocasse, il est aussi devenu le support d’œuvres d’art engagé absolument sensationnelle.
C’est d’ailleurs fascinant de voir comme les palestiniens se le sont réapproprié. On peut y découvrir entre autres, quelques perles du talentueux et mystérieux Banksy (NDLR : la 7e photo ci-desssous). Cette appellation abusive de clôture de sécurité n’est pas la seule à faire partie de la bataille des mots. Tsahal par exemple, au lieu de dire comme partout, armée. En nommant ainsi l’armée israélienne par ce terme abscons - comme on appellerai l’équipe de football de France les Bleus - on occulte tout le champ lexical que le mot armé produirai sur le citoyen lambda ; guerre, arme, mort, sang, etc. Horizon qui est définitivement masqué par l’usage de ce terme obscur.
La mécanique de communication – c’est-à-dire de propagande- reprise par la communauté internationale est bien rodée. Tous les jours, toutes les semaines, tous les mois, ce qu’on a envie d’entendre nous est dit. Processus de paix, feuille de route, accord de je ne sais quoi… Ce matin tenez ! Sur France Culture – inculture devront-on dire - Relance ! Optimisme nouveau ! Netanyahou rencontre machin ! Retrait des colons (on en enlève huit) et on en fait trois colonnes en première page du Monde « Tsahal a déplacé de force huit colons d’Hébron » les pauvres chéries… Et ce qui n’est pas dit mais qui a lieu : expropriation, destruction des maisons, prolongement du mur, colonisation, détention de prisonnier, encerclement des localités palestiniennes, meurtre ! et j’en passe est ainsi oublié.
En écoutant France Culture le matin, il y a toujours une note d’espoir en Palestine : Tzipi Livni qui a fait un sourire, nouveau round des négociations à Amman, bla-bla-bla…
Si Israël à dix mille prisonniers et qu’on en libère cinq : deux titres sont possibles dans la presse : « Israël maintien en détention parfaitement illégale et abusif 9 995 prisonniers », ou « Israël fait un geste et libère cinq terroristes » ! Et c’est évidement la deuxième version qui l’emporte tout le temps.
On a ainsi comme le dit si bien Régis Debray, notre dose, notre piqure quotidienne de rappel, qui nous faire dire « Ah oui ! C’est quand même en train de progresser ». Or, on sait que ça sera encore pire l’année prochaine ! D’ailleurs, c’est encore pire l’année prochaine. Brandir des slogans, des marionnettes telles que la paix, le retrait font partie de la stratégie médiatique visant à dompter l’opinion publique.
Prenez ce critère pour lire la presse, ça marche systématiquement. Et pourquoi ça marche si bien ? Parce que les discours de domination passent toujours pour des discours de libérations. L’ingérence humanitaire cher au Docteur Sac de riz ou " la guerre pour sauver des vies " de Botul-Henri Lévy, nous donne ici : " Je tape sur le Hamas. Mais c’est pas pour faire mal aux palestiniens ; c’est pour libérer la femme palestinienne ! " Voilà le tour de passe-passe ! Avec toute la rhétorique coloniale. Libérer la femme palestinienne en cassant son père, son frère et son fils…