La Macronie a poussé sa caricature du libéralisme jusqu’au bout : l’exécutif français est désormais officiellement une caste baignée dans l’entre-soi.
Un entre-soi parfaitement identifiable puisque la majorité des ministres du gouvernement Attal sont non seulement « impliqués politiquement en Île-de-France » mais souvent issus des mêmes arrondissements de Paris (6e et 7e pour ne pas les citer). Se plaignant d’être devenue malgré elle le « symbole » de cette caste, Amélie Oudéa-Castéra illustre parfaitement cette tendance, elle qui était une camarade de promotion de Macron (la fameuse – et fumeuse – promotion Senghor de l’ENA) et dont le mari est un grand banquier…
Plus que le symptôme d’une déconnexion, c’est la preuve d’une séparation. Une séparation voulue par cette élite parisienne de technocrates pour laquelle le travailleur français est une variable d’ajustement à contenir et à « redresser ». Une élite parisienne en vase clos communautaire qui constitue aujourd’hui l’exact opposé de l’agriculteur de province, déclassé, hétérosexuel et de souche.
Cette opposition, la Macronie en a parfaitement conscience, elle qui vient de « réarmer » ses équipes : resserré, le gouvernement Attal ne compte aucune femme aux postes régaliens, comme pour signifier que le « Nous sommes en guerre » qu’il porte vient d’entrer dans une nouvelle phase de gestion des crises. Et des crises, la France n’en manque pas…
Surendetté par le « Quoi qu’il en coûte », menacé par la configuration géopolitique, le pays des droits de l’homme est au bord de l’effondrement, du moins son pouvoir central. Pouvoir central ou hyper central qui ressemble de plus en plus à une monarchie absolue, l’hyper-Président Macron incarnant cette dérive autocratique et autoritaire d’un régime qui piétine la démocratie parlementaire après avoir éborgné ses manifestants.
La réforme des retraites avait acté la rupture institutionnelle, la récente loi sur l’immigration censurée par le Conseil d’État dans le dos de la représentation citoyenne la confirme. En 2024, le Parlement n’a plus de raison d’être ; sauf qu’il reste trois ans de gouvernance à la Macronie, c’est-à-dire trois ans de réformes à imposer à la France périphérique donc autant de 49.3 et de passages en force. Et les échéances se présentent vite : le Salon de l’agriculture dans trois semaines, les européennes dans quatre mois, les JO dans six, l’avancée de l’armée russe dans l’année… Le tout dans un inquiétant contexte d’inflation économique.
Concrètement, la mobilisation des agriculteurs est un basculement dans le rapport de force au sens où la répression, symbolique et matérielle, sera beaucoup plus difficile à exercer que sur les Gilets jaunes pour le système de domination. Voilà pourquoi les portes de Paris leur sont fermées. Et voilà pourquoi il est de la responsabilité des Parisiens (et des Parisiennes, un peu de réconfort féminin ne ferait pas de mal à nos paysans combattifs arrivés dans la capitale) de les accueillir comme des libérateurs, quand bien même viendraient-ils assiéger la ville d’Anne Hidalgo.
Seule, la révolte du secteur primaire ne suffira sûrement pas à faire chuter le régime en place et donc à changer les choses, si tant est que ce soit son objectif ; rejointe par d’autres actifs essorés par la gestion rothschildienne dans une perspective de défense légitime des intérêts des travailleurs, la perspective s’élargit.
C’est là où cet outil historique des syndicalistes révolutionnaires de la fin du XIXe et du début du XXe siècle qu’est la grève générale fait figure de déterminant. Utilisée en réaction à l’usage de la force étatique légale par la bourgeoisie, elle permit aux prolétaires de l’époque d’éviter toute compromission politique et interdisait toute corruption par la « paix sociale ». Les actuels militants de la CGT, exemplaires lors des manifestations contre la réforme des retraites, doivent sérieusement réfléchir à cette filiation sorélienne.
Quoi qu’il en soit, les dés sont jetés depuis longtemps pour la Macronie : son destin est de devenir officiellement un État policier chargé de taxer toujours plus les Français sans leur garantir aucun service et aucune qualité de vie réelle en contrepartie. Et pour achever sa mutation, cet État sera obligé de toucher d’une manière ou d’une autre à la Constitution, ce qui, dans le contexte décrit ci-dessus, équivaudra à convoquer un Congrès revanchard et politiquement… assiégé !
La révolution est souvent une question de timing, au-delà des divisions de principe… Il faut pousser.