L’armée française lutte contre les djihadistes (au Sahel), Charlie a eu sa rédaction décimée par deux djihadistes, ça ne fait rien : l’armée c’est de la merde, comme les curés, les beaufs, les Français, bref, tout ce qui n’est pas de la haute, c’est-à-dire les réseaux de pouvoir occultes auxquels se soumet idéologiquement l’hebdomadaire.
Profonde indignation et incompréhension à la vue de ce dessin de @Charlie_Hebdo_ . Mes pensées vont d’abord aux familles de tous les soldats morts au combat pour défendre nos libertés. pic.twitter.com/55L8hvV3ZF
— Chef d'état-major de l'armée de Terre (@CEMAT_FR) November 29, 2019
En 2015, les petits gauchistes – pas à l’abri d’une contradiction – applaudissaient les forces de police qui avaient sauvé les survivants du Bataclan et les militaires qui patrouillaient dans les rues pour la sécurité de tous. Quatre ans plus tard, l’armée, c’est à nouveau de la merde et les militaires aussi, comme Marine Le Pen, caricaturée en étron – merci la justice antifrançaise – et Dieudonné en singe. Quel talent ! Quel sens de la synchronisation (on n’a plus le droit de dire « timing » depuis qu’on s’est fait houspiller en commentaire) cinquante ans après Mai 68 et l’antimilitarisme de Cabu ! Un Cabu qui avait fait trois ans en Algérie, tout de même, mais sans tuer personne.
Le CEMAT (chef d’état-major de l’Armée de terre) Thierry Burkhard a donc dégainé un tweet pour dire son « indignation » devant le détournement des affiches de recrutement de l’armée par le dessinateur Biche, suite à la mort des 13 militaires français au Mali, dans une collision de deux hélicos.
Voici les réflexions du quotidien L’Opinion :
« Charlie est fidèle à sa vieille tradition antimilitariste, mais ces dessins seront évidemment très mal perçus par les familles et les camarades des militaires morts en opération. Leur réaction sera légitime et je la partage.
Le général Burkhard, comme de nombreux chefs militaires, est très sensible à la question d’un antimilitarisme latent dans la société, notamment parmi ses élites. On ne peut toutefois ignorer que l’armée est l’une des institutions les plus aimées et respectées par les Français, même s’ils la connaissent souvent mal. »
Il est vrai que l’armée a été humiliée par le nouveau président de la République quasiment dès sa prise de fonctions. De plus, ses chefs réclament plus de moyens, car les matériels et les hommes, usés par de nombreux conflits sur plusieurs théâtres d’opérations, sont exsangues. Mais Macron et son libéralisme veulent le prestige sans les moyens. Heureusement pour lui, la haute hiérarchie de l’armée est gavée d’étoiles et de privilèges, donc elle ne se révoltera pas. Tout pourra continuer comme avant avec des hommes de base qui feront le sale boulot pour les autres, qu’ils soient de l’oligarchie française ou étrangère...
La (petite) Shoah du 7 janvier
Osons le dire : Charlie a le droit d’être en retard d’une guerre avec son antimilitarisme gentillet, la guerre c’est pas bien, les militaires sont des gros cons et compagnie. Mais Charlie peut chier sur tout le monde, ses cibles idéologiques qui ne mangent pas de pain car elles sont sans défenses médiatiques, tandis qu’on n’a pas le droit de chier sur Charlie, rapport à sa « Shoah » du 7 janvier 2015. On dirait que quelque chose se sanctuarise et se sacralise de ce côté-là...
« C’est un carnage de guerre, une attaque massive. Le hasard a fait que le matin, au SAMU de Paris, avait été organisé un exercice sur des attentats multi-sites, donc on était préparés... » (Pellloux le 13 novembre 2015 au soir)
La preuve, ce bon docteur Pelloux, l’urgentiste qui a découvert les corps de ses amis après la tuerie du 7 janvier (il a ensuite participé à la grande répétition du SAMU à Paris organisée par hasard le matin du 13 novembre 2015...), nous annonce dans Marianne qu’« il faut entretenir la mémoire de Charb ». En vertu de quoi ? De sa présidence du Prix de la laïcité 2012 aux côtés de l’immense humaniste Pierre Bergé ? Ça ne devait pas trop le changer de Philippe Val...
Marianne : « Charb, c’était un grand homme ? »
Pelloux : « En tous cas, c’est quelqu’un qui a apporté énormément à la presse et au dessin de presse. Ça peut paraître dérisoire mais ça peut rester. J’ai dit un texte lors de ses obsèques mais ce sont des mots qu’on est si malheureux d‘écrire… Dans le livre, je voulais raconter l’homme formidable qu’il était. Il ne faut pas qu’il reste seulement un type assassiné à Charlie Hebdo. Il faut entretenir sa mémoire car ses livres disparaissent peu à peu des librairies… »
Marianne : « Ça devient quoi « Je suis Charlie » cinq ans après ? »
Pelloux : « Il ne faut pas baisser la garde sur la laïcité qui est attaquée de toute part. Le droit à la caricature, à l’humour et l’ironie est toujours largement malmené. On ne peut plus faire du deuxième, troisième ou du quatrième degré, tout est pris au premier. Et la bataille contre l’islam radical n’est pas finie. On l’a vu avec le récent attentat à la préfecture de police. Il faut combattre la montée de cet islam qui se veut politique. On ne peut pas se dire que l’évolution de la France, ce soit une mainmise de la religion qui écrase toutes les consciences. »
De quelle religion parle-t-il ? De la religion dominante ou des religions dominées ?