Comme Rome, le déclassement ne se fait pas en un jour. La paupérisation de la classe moyenne française – on ne parle même plus de la classe dite inférieure, qui est bien consciente de sa pauvreté, voire de sa misère maintenant, parce que c’est son quotidien – est une réalité difficile à appréhender, de l’intérieur et de l’extérieur.
De l’intérieur, parce que les Français se font bourrer le mou avec la « crise » depuis 50 ans, alors que cette crise est inhérente au capitalisme, qui est capable d’enrichir rapidement un pays, mais aussi, dans la foulée, de l’appauvrir aussi rapidement. La crise, c’est la domination capitaliste, point. On ne se voit pas paupérisé, ou en voie de l’être, parce que c’est lent, progressif, indolore.
Des petites touches si ténues qu’on ne fait pas attention à la courbe, celle qui dévie de la normalité, de l’équilibre, d’une certaine aisance. Une aisance dont les Français n’ont pas à rougir puisqu’elle est le fruit de leur travail.
Cherchez l'erreur !
2008 - Prix du baril pétrole 147 € et le litre à 1,32 €
2022 - Prix du baril pétrole 83 € et le litre à 1.70 €— Pascal Beuvelet (@Pascal_Beuvelet) January 19, 2022
De l’extérieur, parce que les médias, l’INSEE, les politiques, les économistes de plateau, mentent sur le sujet comme des arracheurs de dents saines. On ne doit pas dire la paupérisation, qui est le programme néolibéral : plus pour peu, moins pour (presque) tous. C’est seulement quand les choses vont très mal, qu’on ne peut plus nier les évidences, que la colère monte, que les Français de la périphérie (les relégués, les Zeks) enfilent leur gilet jaune, que la pince médiatico-politique prend conscience qu’il faut relâcher un peu sur la tension. C’est en général trop tard, et puis les extorqueurs de la nation n’en ont jamais assez. Un sénateur résume très bien cette situation, ce décalage, cette injustice.
petit dej copieux a vos frais les gueux. pic.twitter.com/WAd94f1Z48
— Jean Luc (@jeanluc_claude) January 26, 2022
dans l'ordre pti dej , réunion, midi et apéro j'ai pas le souper. pic.twitter.com/35pCY15ITo
— Jean Luc (@jeanluc_claude) January 26, 2022
Termites mondialistes
Le Français moyen, avec sa petite famille de deux enfants, se rend compte, au bout de 20 ans, que quelque chose ne tourne pas rond : malgré toutes les promesses (électorales), malgré tous les communiqués de victoire (économique), il a moins d’argent, plus de travail (quand il en a), moins de protection sociale, des soins de plus en plus chers ou de moins en moins remboursés par la Sécu ou les mutuelles voraces (lunettes, dents), des vacances qui raccourcissent dans le temps et dans l’espace, des postes qui disparaissent comme la viande, le fromage ou les sorties culturelles. Quelque chose venu d’en haut, ou de loin (la mondialisation, la robotisation, l’uberisation), grignote ses avantages acquis, le fruit de son travail, sa protection contre le danger.
Mais c’est tellement subreptice qu’il faut le savoir pour le comprendre. L’Autre n’a-t-il pas dit qu’on ne chercherait que lorsqu’on aura déjà trouvé ? Le Français moyen paupérisé par sa dominance, qui se cache derrière la mondialisation, cette fatalité, met en général une génération à piger, tout simplement parce qu’à ce moment-là, il peut comparer sa situation avec celle de ses parents. Et là, y a pas photo, pour reprendre le titre de l’émission de Bataille & Fontaine.
Aujourd’hui, après 5 ans de néolibéralisme forcené dont 2 ans de covidisme délirant sous l’égide du médiocre banquier rothschildien installé à l’Élysée par un coup d’État politico-médiatique, une partie de la classe moyenne a glissé dans la catégorie inférieure. Une autre partie, mieux protégée par ses diplômes, est passée dans la catégorie supérieure. La classe moyenne est en train de se disloquer sous les coups néolibéraux.
Pour recoller un peu avec la réalité du terrain, les médias mainstream, histoire de montrer leur côté social, se dépêchent, à 50 jours du premier tour, de faire semblant de découvrir la nouvelle pauvreté française (NPF). Libé, ce canard mondialo-gauchiste lu par quelques lycéens parisiens, cède devant la réalité.
Dans ce grand article, on apprend que des Français de la classe moyenne rognent sur tout, sauf sur la nourriture. C’est le premier stade. Ensuite, on s’attaque à la bouffe. La paupérisation doit toujours commencer quelque part. Mais comme Libé ne peut pas se départir de son antipopulisme, il faut toujours qu’à l’arrivée, la colère sociale se transforme en fascisme. Regardez plutôt :
On traduit : la pauvreté française c’est dangereux, monsieur le Président, parce qu’à l’arrivée, c’est le fascisme qui risque de gagner, genre 1933. Donc la paupérisation, c’est mal, non parce que les Français, ce peuple populiste, souffrent, mais parce qu’à la fin ils votent pour un Hitler !
Dans le reportage suivant, qui évoque justement une paupérisation plus dure, celle qui touche à l’alimentation, on ne parle pas politique, mais une figure populiste plane : on sent bien que ce couple ne va pas voter pour un larbin de Rothschild... Et s’il ne vote pas, c’est tant mieux, ce sera toujours ça de gagné pour le Système. L’abstention, jusqu’à un certain point, sert le Système. Mais en dessous de 50 % de participation, il doit se poser des questions sur sa légitimité.
"Dès fois, ça nous arrive de sauter le repas du midi et du soir"
Dans ce nouvel épisode de #mavoixcompte, les bouleversants témoignages de Benoît et Béatrice, à Reims
#franceinfo canal 27 pic.twitter.com/SDDoVEHp8u
— franceinfo plus (@franceinfoplus) February 16, 2022
Le service public audiovisuel, avec des années de retard, essaye de socialiser ses reportages, tout en mettant le holà sur le populisme. Pas facile ! C’est le même Système qui nourrit la propagande médiatique qui défend les mesures de rétorsion économiques qui paupérisent les Français, d’où le dilemme. Si on en parle, on fait monter la colère contre le Système, contre Macron, contre la Banque, et si on n’en parle pas, on passe pour les « putains » du Système. Bonne chance, France Télévisions.
Voir ici un reportage de France Info sur trois familles des trois classes sociales.
Pendant la paupérisation, la propagande continue...
Une croissance spectaculaire en 2021 qui illustre la bonne gestion de la crise par le @gouvernementFR une croissance au service des Françaises et des Français ! #avecvous https://t.co/xO8HTXuLEM
— Roland Lescure (@RolandLescure) January 28, 2022
❌ Faux !
En données brutes, nous sommes à 3,4 millions de chômeurs de catégorie A ; soit toujours 400.000 de plus que lorsque François Hollande et Emmanuel Macron sont entrés ensemble à l’Elysée, il y a 10 ans. https://t.co/z1AnMTnI9W— Eric Schahl (@eschahl) February 18, 2022
Rappel : la baisse de 7.2% du chômage correspond à une généralisation de l'emploi précaire (les 2/3 des 107 000 "emplois" nets créés au 4ème trimestre 2021 sont dans l’intérim) et à une augmentation des radiations de Pôle emploi. C'est un désastre social, pas une bonne nouvelle.
— Claire Lejeune (@ClaireMLejeune) February 18, 2022