Le 22 juin 2015, dans L’Obs, sous le titre Théorie du complot, intox... J’éduque mes élèves à discerner les vraies infos sur le net, l’enseignante signait de son nom complet Rose-Marie Farinella Elkabbach.
Attention aux faux amis (ou aux faux ennemis) : Rose-Marie n’est pas la fille de Jean-Pierre Elkabbach, qui a déjà une fille, Emmanuelle Bach, qui est comédienne pour la télé (Un Village français, une série sur la résistance et la déportation pendant la Seconde Guerre mondiale) et le cinéma (Post coïtum animal triste, l’histoire d’un coup de foudre entre un homme et une femme).
Est-ce le respect ou la crainte que ce nom inspire dans la sphère médiatique, toujours est-il que Rose-Marie a été primée lors des Assises du journalisme et de l’information de Tours en 2016.
Visiblement, elle peut en toute tranquillité bourrer le mou de ses élèves en leur expliquant que la propagande c’est de l’information, et que la résistance à la propagande c’est de la désinformation, ou du hoax. Si cette expérience désastreuse pour l’intelligence de nos enfants et le futur de tous se multiplie, on a des chances de devenir le pays le plus con du monde.
Rose-Marie Farinella, institutrice en Haute-Savoie, expérimente depuis trois ans un programme d’éducation aux médias. Les élèves apprennent grâce à sa méthode à distinguer l’info de l’intox. Interview.
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Cette scène se déroule dans l’école primaire de Taninges (Haute-Savoie), en juin 2016, précisément le jour où ces élèves de CM2 ont reçu leur diplôme d’« apprenti hoaxbuster ».
Rose-Marie Farinella, institutrice de maternelle et ancienne journaliste, a conçu et expérimente pour la troisième année consécutive un programme d’éducation aux médias pour lequel elle a été récemment primée. Objectif : que les élèves, en aiguisant leur regard, parviennent à distinguer l’info de l’intox.
Christophe Michel, enseignant et créateur d’une chaîne YouTube, a diffusé sur sa chaîne (Hygiène mentale) deux intéressantes vidéos qui racontent cette expérience. Deux autres devraient être diffusées prochainement.
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Rue89 : Pourquoi avoir mis en place ces ateliers ?
Rose-Marie Farinella : J’ai commencé à y réfléchir en 2014. J’étais très préoccupée de recevoir plein de « hoax ». Comment font les internautes pour se repérer ? Et a fortiori, comment vont faire les jeunes générations ? Je me suis dit qu’il allait falloir créer des outils.
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Quels type de questions vous posaient-ils ?
« C’est quoi un “creepypasta” ? » « Qu’est-ce que tu penses de la zone 51 ? » « Des illuminati ? » Dans la classe, 8 élèves avaient entendu parler des illuminati, 9 de la zone 51 alors que moi je ne connaissais pas.
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C’est compliqué à leur âge de comprendre ?
Bien sûr mais ils le sentent – et on a évidemment abordé cela plusieurs fois.
À un moment, alors qu’on travaillait sur les sites complotistes, c’est parti tout seul en scène d’impro. Je leur ai montré un article sur les attentats de Charlie hebdo dans lequel l’auteur expliquait qu’untel était un agent du Mossad. « Quelques femmes m’ont dit que... », écrivait l’auteur. Quand on a lu sa source, on rigolait comme des baleines. Et les enfants ont commencé à imaginer « quelques amis nous disent que sur Mars il y avait des sapins... », etc. Ils ont bien compris qu’il s’agissait d’une opinion, pas de faits prouvés.
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Pour chaque fausse information, je leur demande pourquoi, à leur avis, cette image a été diffusée. Pour faire rire ? Par négligence ? Pour faire du clic ou de la pub ? Pour convaincre ? Pour nuire ? On a notamment étudié une photo où l’on voit des hommes et des femmes noirs dans une piscine ; la légende dit que ça se passe à Créteil alors qu’elle a été prise au Sénégal. Pourquoi écrire cela ? Ils ont trouvé la réponse tout seuls : pour nuire !
Ça nous amène à des discussions sur le racisme – là je déborde de ma séquence. Ça nous permet de réfléchir aux contenus haineux, racistes, complotistes et à la cybercitoyenneté. Que faire face à ces contenus ? Eux étaient très radicaux : ils ne comprenaient pas comment ça se fait qu’on a pas tout interdit. Alors on a été obligé de parler de liberté d’expression.