Inutile de tirer sur l’ambulance. Ce chirurgien de formation qui a d’abord travaillé dans la cardiologie dans le public, avant de basculer dans l’esthétique (les implants capillaires) déjà par goût du fric, n’est qu’un symptôme d’une maladie beaucoup plus grave qui gangrène la France : la corruption endémique avec ses corollaires la disparition de la vertu et la suspicion généralisée.
Une UMP toujours aussi pestilentielle
Un mot tout d’abord sur l’UMP : les caciques du "parti de la droite et du centre" ont décidément tous les culots. Alors que leur ex-futur champion vient d’être mis en examen pour abus de faiblesse dans l’affaire Bettencourt, alors qu’un ouvrage (Le coup monté de Bruno Jeudy et Carole Barjon) confirme les tricheries de Copé lors de l’élection interne de l’UMP, avec l’appui de Sarkozy qui n’y voyait que des avantages, alors que la tragédie de Karachi n’a pas encore révélé tous ses secrets, alors que le scandale lié à l’arbitrage Lagarde-Tapie n’en est peut-être qu’à ses balbutiements, alors que les sondages de l’Élysée vont peut-être encore faire du bruit, alors que les barbotages de Copé dans la piscine de Takieddine sont encore dans toutes les mémoires, on aurait pu espérer de l’ancien parti majoritaire un minimum de retenue, de réserve et de décence.
C’était trop en demander à ces sinistres sires ! D’autant que l’ineffable Éric Woerth est suspecté d’avoir superbement ignoré des avertissements formulés à l’encontre de Cahuzac alors qu’il était encore à Bercy et que lui aussi prétendait lutter contre l’évasion fiscale ! Il n’étonnera personne dans ces conditions d’apprendre, pour ceux qui l’ignorent, que le maire de Chantilly fut le premier à défendre Cahuzac dès le mois de décembre, donc dès les premières révélations de Mediapart.
Magouille de la clique rocardienne ?
Après avoir laissé planer le doute sur l’année de création du compte suisse, il semblerait finalement que ce dernier fut ouvert chez UBS en 1992 par Philippe Péninque, un proche de Marine Le Pen, et ex-avocat spécialisé dans les montages fiscaux. Il faut rappeler que le "frère" Cahuzac (il est membre du Grand Orient de France) fut le "responsable médicament" du ministre Claude Évin entre 1988 et 1991.
Or, des soupçons persistent sur la nature et la provenance des fonds. D’aucuns supposent qu’il pourrait s’agir de pots-de-vin des laboratoires pharmaceutiques qui auraient monnayé des faveurs ministérielles.
Ensuite, Jérôme Cahuzac via Cahuzac Conseil, qu’il créa en 1993, promulgua moult conseils au Big Pharma. Conflits d’intérêts et mélange des genres, dites-vous ?
Mais le plus intéressant est que tout cet argent amassé a peut-être profité à la galaxie rocardienne. En guerre ouverte fin 80-début 90 avec les réseaux mitterrandiens. Et la sphère rocardienne s’est ensuite muée en machine strauss-khanienne. Ce qui pourrait aussi expliquer l’attitude troublante de Moscovici. Ce dernier a-t-il seulement utilisé les rouages de l’État dans le but de blanchir un copain comme le sous-entend le journaliste de Mediapart Fabrice Arfi ou a-t-il tenté de faire d’une pierre deux coups en tentant de protéger maladroitement ses arrières ? Le silence de Manuel Valls depuis 48 heures s’explique peut-être aussi par ses anciennes accointances rocardiennes.
Mais pour l’instant, il ne s’agit que de supputations. Il faut en revanche espérer que la justice ira jeter un œil de ce côté-là. [1]
Les aigrefins de Havas Worldwide
Soulignons également que la bande Havas Worlwide (ex-Euro-RSCG), Stéphane Fouks en tête, a poussé Cahuzac à mentir et affabuler et à s’enfoncer dans le déni.
Les mêmes personnes ont assuré la communication de l’ancien directeur du FMI en période de crise...
Aquilino Morelle, conseiller politique du président Hollande, est également un ancien salarié d’Euro-RSCG, ainsi que Gilles Finchelstein en charge des discours et des conseils de stratégie de "Mosco". Le monde est petit...
Hollande et Ayrault : nullissimes et dans l’impasse
Ce ne sont pas les menaces d’inéligibilité, de création d’un délit de parjure, le non-cumul des mandats ou la publication des patrimoines (même si ces idées sont bonnes), qui calmeront la colère des Français et restaureront la confiance. Le mal est trop profond. Le discrédit total. La morale publique est six pieds sous terre. [2]
Un régime au bout du rouleau
L’affaire Cahuzac vient s’ajouter au succès phénoménal de la Manif pour tous, à la colère qui monte au sein de la CGT et de FO concernant l’accord national interprofessionnel (ANI), accord qui signe l’arrêt de mort du CDI et qui sera prochainement discuté au Parlement, aux fermetures d’usines qui se poursuivent inexorablement, au braquage de Chypre qui a failli emporter la zone euro dans le gouffre, aux annonces de baisse des allocations familiales et d’allongement du départ de l’âge à la retraite. Deux éléments qui risquent de passablement énerver les Français. Et avec raison.
Après une telle succession de désastres, que peut faire l’exécutif désormais ?
Une dissolution ? La déroute est assurée. L’étendue de la défaite serait probablement équivalente aux élections législatives de 1993.
Un remaniement ? C’est moins risqué, mais il est quasi-certain que la sanction électorale n’en demeurera pas moins paroxystique lors des municipales de 2014.
Ne rien faire alors ? Dans ce cas, la situation pourrait vite devenir incontrôlable.
Ce qui pourrait devenir intéressant, il faut bien l’avouer...