Rwanda 1994 :
"Si la question était « La France, complice ? », Hubert Védrine n’aurait pas tort. Mais ce n’est pas la bonne question. Celle-ci est bien plus simple. Et c’est pour cela qu’elle l’effraie et qu’il fait tout pour l’enterrer.
La question est : François Mitterrand, complice ?
Et par voie de conséquence : Hubert Védrine, complice ? Le commandant Paul Barril, complice ? Dominique de Villepin, complice ? Le général Huchon, complice ? Le général Quesnot, complice ? L’amiral Lanxade, complice ? Édouard Balladur, complice ? Alain Juppé, complice ?…
On ne fait jamais assez attention aux évidences. Il en est pourtant une, aveuglante : « la France » n’a pas à endosser ce dossier. C’est une politique secrète qui fut menée par Paris au Rwanda de 1990 à 1994. Elle fut décidée par quelques-uns et mise en œuvre par un noyau, au prix d’importantes entorses avec la légalité républicaine. Jamais le Parlement ne fut informé. Jamais « la France » ne fut au courant. Cette politique a été tramée dans les coulisses du pouvoir, dans les officines de la cour. Hors de toute règle. Hors de tout débat.
Elle ne fut mise au jour qu’une fois le pire commis. Et dès lors, pour masquer les responsabilités, « la France » servit de paravent. Tout comme les maîtres d’œuvre du génocide s’abritèrent derrière leur peuple, les responsables français impliqués dans le dossier se sont retranchés derrière « la France ».
Ce tragique cache-cache dure depuis maintenant 15 ans. Depuis 15 ans, « la France », c’est-à-dire vous et moi, nous trouvons sommés d’accepter ou de refuser la marque d’infamie alors que nous n’y sommes pour rien.
En 2004, lors de la publication de L’Inavouable, j’étais en colère. Je le reste aujourd’hui et le resterai peut-être. Simple Français, je ne peux accepter – comme beaucoup, je pense – de servir de paravent à des hommes qui, après avoir aspiré aux charges, esquivent les responsabilités. Et refusent d’admettre, en propre, leur part d’inavouable"
Répondre à ce message