Quand la porte-parole du parti des Indigènes de la République décerne des permis de discrimination anticommunautaires selon des critères pour le moins communautaristes. Sidérant.
Détourner un avion est spectaculaire et dangereux. Détourner des valeurs est moins spectaculaire, mais tout aussi dangereux. Tel est l’exercice auquel se livre Houria Bouteldja, égérie des Indigènes de la République, dans son dernier ouvrage, Les Blancs, les Juifs et nous, petit bréviaire de l’antiracisme détourné en racialisme décomplexé.
Pour ce genre d’exercice, mieux vaut avoir des parrains. On se référera donc à Sartre. Attention ! Pas n’importe quel Sartre, mais celui justifiant les attentats de Septembre noir contre l’équipe israélienne participant aux jeux Olympiques de Munich, en 1972 (11 morts). On invoquera alors le principe selon lequel le terrorisme est, certes, une arme terrible, mais nécessaire quand les opprimés n’en ont pas d’autres, argument qui peut servir en d’autres occasions, encore plus sanguinaires. Bravo, donc, à Jean-Paul Sartre, cet homme qui a osé être « un traître à sa race », celle des Blancs – les Blancs racistes, s’entend, ce qui est une tautologie.
On se réclamera également de Jean Genet, qui s’est réjoui de la débâcle française en juin 1940. Genet est formidable, car « il s’en fout, de Hitler ». Lui, au moins, va à l’essentiel : la primauté du conflit de race sur le conflit de classe, invariant structurel qui désigne l’ennemi, « le peuple blanc, propriétaire de la France ».
Évoquant cet enfer hexagonal, on administrera une leçon condescendante aux juifs. On les accusera de prétendre s’intégrer dans le royaume du « racisme républicain » où le « philosémitisme béat » est « le dernier refuge de l’humanisme blanc ». On niera évidemment toute forme d’antisémitisme (comment pourrait-on penser une chose pareille ?). Mais on rappellera avec des mots choisis que « pour le Sud, la Shoah est - si j’ose dire - moins qu’“un détail” ». Sans illusions, on sommera les juifs de se libérer de « l’État-nation français et de l’État-nation israélien », ce qui est tout un programme.