La raison est effectivement le besoin de propagande qui est né au XIXe siècle, pour faire passer la centralisation et l’immense pouvoir des députés et gouvernements sur les populations. Du moins c’est mon analyse. Dans l’Ancien Régime, le pouvoir était en réalité très diffus, il y avait peu d’institutions, peu de fonctionnaires, et dans l’immense majorité du pays, on réglait les choses entre soi, on avait ses particularisme, ses privilèges hérités de temps immémoriaux, etc... Bref, il n’y avait pas vraiment de lois communes, ou du moins, elles n’étaient qu’excessivement rarement imposées d’en haut par voie hiérarchique. Avec la Révolution, la naissance de la Nation, et tout le bordel, on est passé d’un système très libre, décentralisé et particulariste à un système jacobin, centralisé, et autoritaire.
Et bien ça a plutôt tendance à énerver les gens le fait qu’on leur retire leur autonomie et qu’on désagrège leur patrimoine de normes. Aussi, il a fallut artificiellement imposer, pour justifier tout cela, l’idée d’une nation, et d’une histoire nationale, pour gommer les identités locales (parfois très locales), et inventer une nouvelle identité commune, nationale. Les Gaulois, Clovis, Jeanne d’Arc, tout cela a été mis en avant dans cet effort de propagande, et distordu aux limites du tolérable pour servir ce but politique et idéologique. Il fallait des figures percutantes, des histoires simples mais frappantes, pour bien toucher tout le monde. Il fallait un coté mythique, héroïque, exceptionnel, pour remplacer les histoires traditionnelles de héros de jadis par des histoires concoctées par le pouvoir pour faire accepter ses intrusions dans les traditions.
Autre point : dans l’Ancien Régime, l’armée et la défense était l’affaire du roi et de la noblesse. Jamais on a dit au paysan qu’il devait se battre pour son pays : la guerre était une affaire de professionnels, souvent sans trop d’attaches. Mais à la Révolution et après, avec la fin de ces castes qui prenaient en charge cet aspect de la vie d’un pays, et avec l’invention de la circonscription, il a bien fallut mettre dans la tête des gens les moins enclins au carnage que si on le leur ordonnait, ils devaient aller crever à la guerre, et si possible avec la fierté du devoir accompli. La propagande de cette époque visait aussi à instaurer cette mentalité du sacrifice glorieux à la guerre en plus de celui au travail, brisant le schéma trifonctionnel hérité du tréfonds des ages.