Saviez-vous que les partis politiques établissent des stratégies de démarchage à partir des données très personnelles des citoyens ? Dans ce 68ème épisode, #datagueule nous explique les tenants et aboutissants de cette pratique et montre comment elle met en danger le débat politique.
Le phénomène est particulièrement dérangeant. Sous notre nez, il prend de l’envergure. Le micro-ciblage, véritable stratégie de marketing pratiquée à l’occasion des campagnes électorales, à la manière des multinationales, est aujourd’hui une réalité rendue possible grâce aux données personnelles collectées par des entreprises spécialisées : les « DataBrokers ». L’entreprise Experian, par exemple, utilise les données personnelles qu’elle a pu collecter et classe ensuite les individus concernés en différentes catégories qui ont de quoi surprendre. Ainsi, l’électeur devient un produit comme un autre qu’il faudra apprendre à séduire en fonction de ses qualités et envies.
Un phénomène en pleine croissance
Les bases de données sur nos comportements et appréciations personnelles sont revendues aux partis politiques qui adaptent leurs stratégies selon les informations qui leurs sont rendues disponibles : ils les utilisent pour cibler précisément leurs potentiels électeurs, et les convaincre définitivement. Ces mêmes données sont exploitées lors d’actions de porte à porte ou par des démarcheurs dans la rue. À partir d’elles, le démarcheur connaît exactement le profil de l’individu à qui il s’adresse, ce qui lui permet de mobiliser les arguments les plus à même de le convaincre. Une offre politique à la carte et hautement personnalisable. Et le débat politique dans tout ça ? Et la démocratie ?
On pourrait croire que le phénomène est marginal, surtout en France, où l’exploitation de données personnelles est en principe strictement encadrée par la loi de 1978 relative au données personnelles dont la CNIL (Commission Nationale de l’Informatique et des libertés) est le garant. Mais malgré les barrières juridiques supposées protéger les citoyens de l’exploitation de données personnelles, la France connaît également ce genre de dérive. Les chiffres apportés par #datagueule en témoignent : les partis politiques se ruent sur les moyens que leur offrent ces nouvelles techniques de persuasion. En 2005, les équipes de campagne de Nicolas Sarkozy ont adressé « 300 000 e-mails à de potentiels électeurs », en se fondant sur les informations fournies dans ces fichiers. Par ailleurs, #datagueule souligne que les partis politiques français qui ont recours à ces fichiers sont de plus en plus nombreux. En 2016, les principaux partis se sont convertis et le micro-ciblage devient un élément à part entière de leur stratégie électorale. Outre-Atlantique, pendant la campagne présidentielle de 2008, les Démocrates ont dépensé 30 millions de Dollars pour mettre à jour leur fichier Catalist, relatif à 220 millions d’américains. Ce dernier collecte jusqu’à 600 informations par personne !
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