La visite que Vladimir Poutine doit faire en France le lundi 29 mai excite beaucoup l’imagination des journalistes et du personnel politique. Le fait qu’il sera reçu au château de Versailles, avec un decorum tout à fait singulier est l’une des causes de cette excitation. Elle montre surtout que les enjeux, que ce soit pour Vladimir Poutine ou pour Emmanuel Macron de cette visite ne sont pas entièrement perçus. Il est en effet hautement symbolique que Vladimir Poutine soit le premier dirigeant reçu par le nouveau président de la République.
Les enjeux pour Emmanuel Macron
Dans quel contexte cette visite aura-t-elle lieu ? À l’heure actuelle, les relations bilatérales entre la France et Russie sont sévèrement contraintes par la politique de l’Union européenne à l’égard de la Russie. Ces contraintes dépassent la simple question des sanctions, dont l’importance, hors les sanctions financières, a été plus symbolique que réel. L’Union européenne a développé depuis 2014, qu’on l’approuve ou qu’on le réprouve, une véritable politique d’hostilité vis-à-vis de la Russie. Ce sera donc un test pour savoir si le Président Macron veut alléger la contrainte de l’UE et mettre en œuvre une politique plus française, plus tournée vers les intérêts de la France, envers la Russie ou s’il place la politique étrangère française sous le cadre de l’UE.
Le fait qu’il souhaite que cette visite ait lieu avec un décorum tout particulier à Versailles ne doit pas être considéré comme une indication quant à la réussite ou non de cette visite. Cela traduit uniquement l’importance que revêt cette visite. Elle constitue, il est vrai, pour Emmanuel Macron, son véritable baptême du feu en politique internationale. De plus, Emmanuel Macron sait très bien que cette visite sera scrutée à la fois par ses opposants comme par ses soutiens. Son action envers la Russie et Vladimir Poutine sera donc observé avec un grand intérêts à la fois par ses opposants (le parti des « Républicains », mais aussi la gauche radicale de M. Melenchon et le Front national de Marine le Pen sont tous en faveur d’une amélioration des relations franco-russes) et par ses partisans (qu’il s’agisse du MODEM de François Bayrou, du Parti socialiste ou de son propre parti maintenant appelé LREM). Si cette visite devait se conclure par une annonce dramatique quant à l’amélioration des relations bilatérales, il serait fortement critiqué par ses propres amis. Si la visite est un échec, ses adversaires cette fois le critiqueront. On peut donc penser que cette visite débouchera sur certaines améliorations dans les relations bilatérales, mais rien de particulièrement spectaculaire. Mais cela ne signifie pas qu’un processus général d’amélioration n’aura pu être lancé par cette visite, un processus qui se déroulera dans les prochains mois.
Emmanuel Macron, en tant que nouveau président français, doit montrer d’abord qu’il a à l’esprit les intérêts français (quelque chose qui avait un peu manqué à François Hollande). Il doit, ensuite, montrer qu’il défend des principes (mais nous devons voir quel principe viendra en premier). Enfin il est clair qu’il cherchera à user de cette visite à son avantage politique. Il a été fortement attaqué lors de la campagne présidentielle pour son manque d’expérience dans le traitement des affaires internationales. Il essaiera donc de montrer que ces attaques n’étaient pas fondées. Dans une certaine mesure, les enjeux sont très élevés pour lui, car c’est sa première expérience dans la diplomatie mondiale et il a désespérément besoin de faire une impression durable ou l’image d’un « gamin inexpérimenté » lui collera à la peau.