Depuis qu’elle a pris la tête du FN en 2011, Marine Le Pen a hissé son parti au rang des premières forces politiques françaises. Lors du second tour de la présidentielle, elle a engrangé plus de 10 millions de voix. Un score que son parti n’avait jamais atteint auparavant.
Pour réaliser cette prouesse, l’actuelle candidate aux législatives a modifié la ligne de son parti. Dans son livre, Cette France de gauche qui vote FN (Paris, Le Seuil, 2017, 142 p.), le politologue Pascal Perrineau explique comment le parti s’est adressé aux électeurs orphelins d’un Parti socialiste qui les a abandonnés au profit des habitants des grands centres urbains. Et raconte que ces électeurs n’ont pas forcément l’impression de trahir la gauche. Au contraire, pour eux, c’est la gauche qui les a trahis. Entretien.
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Le FN, c’est l’extrême droite et l’extrême gauche ?
Depuis une dizaine d’années, une partie de la dynamique électorale s’alimente d’une déception des électeurs de gauche. Lors du second tour de la présidentielle 2017, le FN a obtenu une majorité absolue seulement dans deux départements : le Pas-de-Calais et l’Aisne. Ce sont deux départements où voter à gauche est une tradition historique. En 1981, tous les députés de ces départements étaient de gauche. Déjà, lors de la victoire du non au référendum de 2005, il y a eu une confluence électorale entre la gauche de la gauche et le FN.
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Une partie des cadres du FN imputent la défaite à la gauchisation du parti impulsé par Florian Philippot et réclame un coup de barre à droite…
Quand le FN plaçait la barre complètement à droite, il faisait 10 % ou 15 %. Je ne suis pas persuadé qu’il ferait plus aujourd’hui avec une autre ligne. C’est la ligne plus ou moins incarnée par Florian Philippot qui les a fait décoller. Marine Le Pen a rassemblé, en 2017, près du double des voix gagnées par son père en 2002...
Finalement, plus que la droite ou la gauche, n’est-ce pas la sortie de l’euro qui a effrayé les électeurs ?
Concernant la souveraineté nationale, les gens veulent que la France « récupère ses billes » dans certains domaines, mais la question européenne reste pour eux relativement lointaine. La vraie raison de l’échec du FN, c’est son absence de culture de gouvernement. Les frontistes sont apparus comme n’étant pas crédibles. Marine Le Pen a perdu 6 points à cause du débat raté de l’entre-deux-tours. On n’a jamais vu ça dans l’histoire des débats sous la Ve République qui a commencé en 1974.