Suite au visionnage de la vidéo du mois d’Alain Soral, dans laquelle il évoquait la situation inquiétante de l’armée française et de son commandement (cf. entretien de janvier 2013, partie 3), je tenais à partager quelques épisodes de mon expérience militaire, bien que modeste en durée, mais pour le moins significative...
Je tiens a préciser qu’il n’est question que d’un témoignage personnel, de ce que j’ai pu voir durant mes trois années d’engagement volontaire de 2006 à 2009. Dans la vidéo, Alain Soral évoquait le cas des généraux planqués dans leurs bureaux, qui n’ont que très peu ou pas du tout d’expérience du terrain, ces mêmes généraux qui ont sous leurs ordres des hommes compétents, allant pour les plus anciens à plusieurs dizaines d’années d’expérience. Le problème est encore plus grave car il n’y a même pas besoin de monter jusqu’aux généraux pour faire ce genre de constats ! Voici donc quelques faits (et je vous en épargne certains, bien que tout aussi consternants, mais qui n’ont pas de rapport avec le sujet en question) que j’ai pu voir durant mon cursus militaire.
Pour commencer, j’ai vu mon capitaine de compagnie (une femme) sans aucune autorité, humiliée dans son propre bureau par un adjudant, et fondre en larme. Je garde également en souvenir les sursauts de ce même capitaine lorsque le caporal-chef mettait la compagnie au garde-à-vous lors du rassemblement matinal, ce qui tournait parfois au petit jeu, étant donné le sourire en coin qu’il nous esquissait avant de faire trembler les rangers de la « pit » !
C’est ensuite lors d’une manœuvre d’exercice en plein hiver (on a signé, c’est pour en chier, il paraît !), dans le terrain d’une célèbre école d’officier (Saint-Cyr Coëtquidan pour ne pas la nommer), que le capitaine (adjoint cette fois) bien cloîtré dans son shelter climatisé ne cherchait non pas à « soulager » ses subordonnés du froid qui congelait les tentes... Non, il cherchait qui pourrait bien l’emmener... chez le coiffeur !!
Pour finir, lors de ma projection en République de Côte-d’Ivoire en 2007, on dénombrait des colonels par dizaines, quelques-uns avaient d’ailleurs été priés de rentrer au bercail, car avec des missions plus ou moins fictives, ça commençait à se voir ! (Et je vous passe le montant des soldes perçues par un colonel en opération extérieure.)
Durant cette même OPEX, j’ai été chargé d’escorter un convoi à la frontière... Le plan de route étant décidé par le commandement, on exécute ! Faute grave, nul ! Zéro ! (cf. Dieudo) Nous nous sommes retrouvés bloqués dans un village où se déroulait une manifestation hostile à l’armée française (il faut dire que la raison de cette colère était légitime, si j’en crois les raisons évoquées, mais n’étant pas certain de la véracité des retours que j’ai pu avoir, je préfère ne pas la mentionner). Dans ce même village, des militaires étaient réfugiés dans l’école, mais ne voulaient pas nous laisser rentrer sous peine de « déranger leur dispositif ». Après environ deux heures d’attente tendues (menaces, insultes et provocations), notre chef de convoi (sergent-chef d’expérience) a pu débloquer la situation, demi-tour et changement d’itinéraire ! Merci le commandement !
En conclusion, il est clair que les derniers surpris concernant les morts de dizaines de soldats français, notamment en Afghanistan ces dernières années, ce sont bien les militaires eux-mêmes ! L’armée française, ou quand la théorie des écoles dirige et néglige l’expérience du terrain ! Le soldat français n’a pas de valeurs pour nos chefs, ce n’est que du consommable que l’on remplace, à coup de spots publicitaires.
PS : Pour toucher mes allocations de chômage suite à la fin de mon contrat, j’ai dû attendre 10 mois ! Je me considère néanmoins comme chanceux, au moins je les ai touchées, ce qui n’est pas le cas de tous !