Comme nous le relations dans un précédent échange de courriers entre Germain Gaiffe-Cohen, son chef de détention à la maison centrale de Saint-Martin-de-Ré et le préfet de Charente-Maritime, le directeur adjoint de la publication d’E&R est empêché part le ministère de l’Intérieur et l’administration judiciaire de se présenter aux élections législatives, ce qui est pourtant son droit. Dans une lettre reproduite ci-dessous, le préfet lui a répondu, mais ses propos appelaient un nouveau courrier de Germain Gaiffe, reproduit à la suite.
La lettre du préfet
République française
Préfet de la Charente-Maritime
Monsieur,
Par courriers en date des 17 avril et 9 mai 2017, vous m’avez fait part de votre souhait de déposer votre candidature aux élections législatives qui auront lui les 11 et 18 juin 2017.
Je vous rappelle que l’article L 157 du code électoral dispose que « les déclarations de candidature doivent être déposées, en double exemplaire, à la préfecture, au plus tard à 18 h le quatrième vendredi précédant le jour du scrutin. La déclaration de candidature est remise personnellement par le candidat ou son suppléant ».
Concrètement, le service des élections de la préfecture enregistre les candidatures à la préfecture, 38 rue Réaumur, en salle 3, du lundi 15 au jeudi 18 mai de 8 heures 30 à 12 heures 30 et de 13 heures 30 à 16 heures 30, ainsi que le vendredi 19 mai de 8 heures 30 à 12 heures 30 et de 13 heures 30 à 18 heures.
Il appartient donc à chaque candidat de prendre toutes dispositions pour être présent à la préfecture lors des créneaux indiqués ci-dessus.
Le memento du candidat qui est disponible sur le site internet de la préfecture vous informe sur tout ce que doit savoir un candidat, notamment les documents à fournir lors du dépôt de la candidature.
Je vous prie d’agréer, Monsieur, l’assurance de ma considération distinguée.
pour le Préfet,
Le Secrétaire Général,
Michel TOURNAIRE
La réponse de Germain Gaiffe
Germain GAIFFE
Maison centrale
17410 Saint-Martin-de-Ré
Préfecture de la Charente Maritime
38, rue Réaumur
17017 La Rochelle cedex 01
Objet : dépêcher en urgence un agent préfectoral en l’établissement ce jour avant 18 heures pour y recueillir ma déclaration de candidature aux élections législatives de 2017
Monsieur le Préfet,
Par ordonnance rendue ce jour à 9 heures 30, Monsieur ROUVIERE, juge de l’application des peines au tribunal de grande instance de La Rochelle, vient de rejeter la nouvelle (ça fait 3) demande de permission de sortie sous escorte, pour me rendre en vos locaux, à la préfecture, procéder personnellement à la remise de ma déclaration de candidature, demande dont je l’avais saisi lundi 15 mai 2017 en début d’après-midi, consécutivement à votre courrier du même jour, et concomitamment à en avoir pris connaissance.
Ce courrier rédigé pour votre compte par votre secrétaire général, Michel TOURNAIRE, est l’acte par lequel vous avez rejeté ma requête formulée le 17 avril 2017 et réitérée le 9 mai 2017, qu’un agent préfectoral soit dépêché en l’établissement pour prendre ma déclaration de candidature, requête mienne qui invoquait le fait que le juge de l’application des peines a rejeté mes 2 demandes de permission de sortie sous escorte précédentes, deux rejets qui ont été confirmés en cause d’appel par le président de la chambre de l’application des peines de la cour d’appel de Poitiers.
Et pour justifier cette vôtre décision expresse de rejet, vous y avez indiqué ceci, je cite :
« C’est à vous qu’il appartient de prendre toutes dispositions pour être présent à la préfecture. »
Cela bien que vous sachiez pertinemment, puisque je vous en ai fait le rappel par 2 fois dans ma requête, qu’en tant que citoyen détenu, la seule et unique disposition que je peux prendre pour être présent à la préfecture, consiste à saisir le juge de l’application des peines d’une demande de permission de sortie, sous escorte en l’occurrence, la condamnation que j’exécute actuellement étant assortie d’une période de sûreté qui ne sera purgée que très postérieurement au 19 mai 2017, date limite fixée pour le dépôt des candidatures cette année.
Donc voulez-vous par là me contraindre à me rendre coupable de l’infraction d’évasion ?
Ou est-ce là une façon que vous croyez amusante, comique, de m’envoyer « à la douche », dirais-je, histoire d’adresser un clin d’œil du même acabit douteux à Heinrich Himmler, étant donné que de l’avis de Sarah Cohen, mon arrière-grand-mère maternelle qui en a « profité », vous semblez, par cette vôtre décision expresse de rejet, rendre un hommage à titre posthume à Maurice Papon, votre « illustre » homologue de la Gironde s’étant distingué sous l’Occupation, en en faisant partir quelques uns, des trains express, direction les chambres à gaz ?
« Oui » est la réponse à la première de ces 2 questions, l’évasion étant la seule disposition que je peux prendre pour me rendre à la préfecture désormais que le juge de l’application des peines a rejeté ma demande de permission de sortie sous escorte, seule disposition légale que je pouvais prendre en ce sens en tant que citoyen détenu. Et « non » est la réponse à la seconde.
En effet, nonobstant la rétroactivité rigoureusement anticonstitutionnelle spécifique au crime contre l’humanité, les actes administratifs qui procèdent de la mise à exécution des déportations décidées par l’administration de l’époque, que Maurice Papon a pris dans l’exercice de ses fonctions de préfet de la Gironde, ces actes étaient strictement conformes à la législation alors en vigueur : la stricte application de l’ordonnance du maréchal Pétain, cosignée par Pierre Laval, par laquelle l’État français avait décidé de livrer ses ressortissants juifs à l’occupant allemand.
Alors que, à l’inverse, votre décision expresse de rejet, elle, est strictement contraire à la loi, cela tout aussi manifestement, qu’il serait pareillement incontestable que le délit de mise en échec de l’exécution de la loi par personne dépositaire de l’autorité publique agissant dans l’exercice de ses fonctions, fût consommé par un maire qui refuserait de dépêcher un adjoint en l’établissement, pour procéder à la célébration du mariage d’un citoyen détenu, qui se trouve dans l’impossibilité de se rendre à la mairie pour exprimer personnellement son consentement, comme la loi l’exige pour l’exercice de ce droit, le mariage, une impossibilité tirée du rejet par le juge de l’application des peines, de la demande de permission de sortie sous escorte dont ce citoyen détenu l’avait saisi pour pouvoir se rendre à la mairie.
Eh oui ! Être candidat aux élections législatives est un droit consenti par la loi à tout citoyen qui comme moi satisfait à toutes les conditions qu’elle détermine, la loi, pour pouvoir être candidat, exactement comme pour le droit au mariage.
En cela, je vous saurais gré de me permettre d’estimer que votre décision expresse de rejet ne matérialise pas une volonté vôtre de vous rendre coupable dudit délit en tant qu’auteur, et dès lors ne pas devoir vous en poursuivre devant le tribunal correctionnel par la voie d’une citation directe (à laquelle bien sûr je ferais donner la publicité requise pour que vous ayez une « bonne » presse), en dépêchant un agent préfectoral en l’établissement, ce jour, vendredi 19 mai 2017 avant 18 heures, pour que je puisse exercer ce droit que me consent la loi d’être candidat aux élections législatives, conformément à la condition qu’elle fixe, c’est-à-dire en remettant personnellement ma déclaration de candidature, agent préfectoral qui m’en délivrera reçu, la loi, toujours elle, là encore l’exigeant.
Je vous en remercie à l’avance, et je vous prie de bien vouloir croire, Monsieur le Préfet, vous l’avez compris, à ma pleine et entière considération.
PS : le Président de la République ayant fait savoir aux Français, lors de son discours d’investiture, que l’application de la loi à tous les citoyens, notamment concernant les droits qu’elle consent à tous, est l’une des priorités de son quinquennat, je lui expédie un original de la présente.