Les prix littéraires de la diversité
Cette année, les thèmes des quatre œuvres en lice pour le Goncourt appartenaient à un registre sombre : infanticide pour Leïla Slimani, suicide pour Catherine Cusset, cannibalisme pour Régis Jauffret et génocide pour Gaël Faye.
Pas mieux. Pour une fois, on donne 100% raison à BFMTV. Dans une littérature investie par les imbéciles pompeux et les bourgeoises pénibles, il ne reste plus grand-chose à se mettre sous la dent. Les auteurs qui ont des choses à dire ne passent pas le barrage des prix dits littéraires, il y a sélection quasi-nazie en amont. Au bout du compte, un torrent de vacuité, avec de faux penseurs qui rament pour trouver un sujet original. D’où le versement du roman dans le fossé du fait divers pour faire plus vrai. Une littérature même pas de gare, tout juste de station de métro.
Diane Shenouda d’Europe 1 vantant en 2015 le « génie » de Yasmina Reza, auteur d’une pièce sur un écrivain – elle – qui raconte sa vie d’écrivain, une mise en abyme qui se résume en une branlette d’ego :
C’est tout le drame des imposteurs : après un livre, il en faut un autre, c’est-à-dire construire une œuvre. Et même si les médias s’en mêlent en essayant de faire avaler de la pisse au grand public en lui faisant croire qu’il s’agit d’un véritable nectar, le mensonge s’empile sur le mensonge, dans un système de mensonge inflationniste généralisé. Impossible de revenir en arrière, on va vers le Big Crunch. Parler de Yasmina Reza comme d’un auteur à « œuvre », ce que fait toute la presse en chœur, c’est se foutre du monde libre. Une œuvre, ce babillage psychologiste qui camoufle mal la platitude intellectuelle ? Il y en a qui se bernent ou bernent les autres, et il y a ceux qui sont bernés. Ce Système a réussi à invalider la fragile qualité pour promouvoir – c’est logique – une déchetterie industrielle. De ces romans bidon il ne restera rien, à la postérité.
Aujourd’hui, à la façon du Festival de Cannes, on ne récompense plus un livre ou un film, mais l’idéologie qu’il charrie. Si cette idéologie – ensemble d’idées donc – correspond à l’idéologie dominante – le règlement interne du Système – alors le produit culturel a toutes les chances de se voir médiatisé. La vessie deviendra lanterne. D’où la profusion actuelle de production shoahtique, forcément de très basse qualité. N’importe qui se met à écrire shoah, chacun cherche son shoah, et le shoah-primé du jour, c’est le Suédois Steve Sem-Sandberg, qui rafle (ha ha ha) le prix Médicis étranger. C’est l’équivalent du meilleur film étranger de la cérémonie des Oscar. Ah oui, le pitch du shoah-book : Steve « raconte l’extermination des enfants handicapés et des jeunes délinquants par le régime nazi », nous dit L’Obs.
Pour les prix de l’an prochain, on propose un mélange de Yasmina et de Steve, par exemple, un vernissage d’art contemporain (du Boltanski) dans le bloc 41 d’Auschwitz, avec toute l’hypocrisie des esthètes nazis, bien habillés mais qui ne pensent qu’à l’argent, à la gloire et à toutes les choses mal.
Le prix littéraire, c’est le beaujolais nouveau
Un pinard artificiel, bourré d’adjuvants chimiques, réhausseurs de goût et autres éclaircisseurs (pour donner cette robe violette surnaturelle et ce goût de banane dans le fion), vendu aux masses comme un nectar léger, alors qu’on trinque au casse-tête national. Ils sont loin les petits producteurs qui font du bon vin avec des méthodes honnêtes sans force de frappe commerciale.
Louis de Funès découvre les petites cuisines dégueulasses de l’édition dite française :
Le grand remplacement dans sa déclinaison littéraire a bien eu lieu : à la place de romans dangereux pour le Système, ceux d’une écriture libre de toute convention (à part la cohérence), comme le furent ceux de Céline, on a droit à du brouet déguisé en subversion. Derrière le papier aux couleurs criardes (la violence), tous ces nouveaux bonbons ont le même cœur : féminisme, shoahtisme, sexualisme, genrisme, diversitisme, bref, du subversisme à défaut de subversion.
Mais pourquoi un bon roman devrait-il être subversif ? Comment reconnaître un vrai roman d’un faux ? Les goûts et les couleurs ne se discutent-elles pas… Ouais, alors buvez du beaujolpif en lisant du BHL, auteur de romans à succès médiatique, uniquement. Un vrai roman ne remplit pas sa mission propagandiste foncière. Il surgit, rompt avec les règles (on ne parle pas ici de règles morales mais de règles idéologiques) et décoche une flèche au cœur de la vérité. C’est Les Choses, de Perec, Les Particules élémentaires, de Houellebecq (avant de sombrer dans la redite et le porno de gare), ce genre de miroir.
Pas ces raconteurs de salades qui exploitent la souffrance des autres (génocide, homicide, infanticide, suicide, et à propos de suicide, lire l’extrait que donne franceinfo en fin d’article...) parce qu’ils ne souffrent pas suffisamment pour écrire avec leur sang. Revenez quand vous aurez souffert, bande de nazes !
Le roman sociologique majeur de Georges Perec, Les Choses, l’histoire de ce couple « sans psychologie », aux accents clousclardiens avant l’heure :